Grosses tensions sur les véhicules de l’armée de Terre

Avec la multiplication des interventions extérieures au cours de ces dernières années, il ne faut pas sortir de Saint-Cyr pour comprendre que les véhicules de l’armée de Terre ont été mis à rude épreuve. Et cela d’autant plus que la tendance est à un durcissement des engagements.

Ainsi, d’après les chiffres donnés par le général Jean-Pierre Bosser, le chef d’état-major de l’armée de Terre (CEMAT) lors de son passage devant la commission « Défense » de l’Assemblée nationale, « à ce jour, environ 1.500 engins rentrés d’Afghanistan et du Liban et 500 du Mali doivent être remis en état dont notamment 620 VAB (ndlr, véhicule de l’avant blindé), dont la moitié provient des régiments d’infanterie ». Le député Philippe Vitel a complété le tableau en affirmant que « 300 camions et les 140 véhicules blindés légers (VBL) aujourd’hui totalement immobilisés ».

En outre, signe du durcissement des opérations, entre 2008 et 2013, 109 véhicules terrestres ont « subi des dommages de guerre lourds, dont la moitié par engins explosifs improvisés (IED) et 18 hélicoptères ont été touchés par des tirs directs ».

Pour 2015, 113 millions d’euros seront affectés à la régénération des matériels concernés. Ces derniers, a expliqué le général Bosser, « entreront progressivement chez les industriels, et n’en ressortiront que dans deux à quatre ans – manquant cruellement dans l’intervalle à nos régiments ».

Un autre problème est que l’armée de Terre doit jongler avec des véhicules modernes récemment entrés en service, comme le Casear (Camion équipé d’un système d’artillerie) ou encore le VBCI (Véhicule blindé de combat d’infanterie) avec des matériels très ancien, à l’image du VAB, lequel, au passage, s’use 10 fois plus vite au Mali qu’en Afghanistan.

« Les matériels modernes n’ayant rien à voir avec les anciens, la coexistence des parcs de nouvelle génération et des parcs anciens impose d’assurer la permanence et la concomitance des soutiens. La bonne maîtrise du vieillissement de ces matériels hors d’âge, qui devra être assurée pour encore une quinzaine d’années, a un coût qui devient prohibitif. C’est pourquoi il est capital de respecter la LPM, qui prévoit, fin 2015, le lancement de nos programmes prioritaires », a fait valoir le CEMAT.

Justement, l’année 2015 sera cruciale pour le respect de la trajectoire financière de la dernière Loi de programmation militaire (LPM). Surtout qu’il y aura une difficulté supplémentaire, avec plus de 2 milliards de recettes exceptionnelles (REX) dont on ignore encore si elles seront au rendez-vous.

Pour 2014, l’armée de Terre attend le lancement du programme Scorpion (Synergie du contact renforcée par la polyvalence et l’infovalorisation), qui lui permettra de renouveler ou de moderniser ses matériels les plus anciens. Mais il faudra être patient…

« Ne nous cachons pas cependant, que, avec la LPM 2014-2019, nous serons loin d’atteindre l’objectif capacitaire du programme Scorpion. La première étape prévoit la livraison de 92 véhicules blindés multirôles (VBMR) sur 980, de quatre engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) sur 110 et la rénovation de 12 Leclerc sur les 200 initialement prévus », a affirmé le général Bosser.

L’objectif est de « pouvoir projeter en 2021 un groupement tactique interarmes sur VBMR, et disposer en 2023 d’une première brigade interarmes Scorpion projetable ». En clair, le VAB sera encore pendant longtemps la bête de somme des régiments de l’armée de Terre!

Pour 2015, deux opérations importantes sont attendues par l’armée de Terre. La première concerne le remplacement de ses systèmes de drones tactiques intérimaires (SDTI) Sperwer (notez le mot « intérimaire »…), qui seront à « bout de souffle » en 2017, comme la souligné le CEMAT. Et il « faut songer à (les) remplacer pour éviter une rupture capacitaire », a-t-il ajouté.  »

« La nécessité, déjà avérée en Afghanistan, de disposer de drones tactiques se confirme dans la bande sahelo-saharienne. Il s’agit en effet de compléter la gamme de drone MALE dont les priorités d’emploi de niveau stratégique ne permettent de couvrir qu’à hauteur de 20 % les besoins vitaux en renseignement du chef tactique. Les obsolescences incompatibles avec le maintien en service du SDTI au-delà de 2017 nécessitent le lancement de son successeur dès 2015, pour lequel le financement est programmé », a expliqué le général Bosser.

La seconde opération visera à améliorer la mobilité des forces spéciales de l’armée de Terre, avec le lancement d’un programme destiné à remplacer les Véhicules légers de reconnaissance et d’appui (VLRA) et les Peugeot P4, dont la rénovation, a précisé le général Bosser, coûte « 27.000 euros pièce ».

« La DGA [ndlr, Direction générale de l’armement] comprend tout l’enjeu de ces petits programmes aux montants somme toute assez faibles, même s’il n’est pas toujours facile de protéger ces crédits en période de forte turbulence budgétaire. De plus, en raison du degré de spécification de ces équipements, on est parfois tenté d’attendre quelques années le matériel parfait alors qu’on en a besoin rapidement et qu’il est peut-être déjà disponible sur étagère », a par ailleurs estimé le CEMAT.

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