La stratégie anti-EI au menu d’une réunion des 22 pays de la coalition à Washington

Dans un premier temps, les raids aériens menés par l’aviation américaine à partir du 8 août ont permis de donner un coup d’arrêt à l’avancée des jihadistes de l’État islamique (EI ou Daesh) dans le nord de l’Irak, plus précisément vers le Kurdistan irakien. Les combattants kurdes (peshmergas) ont ainsi pu écarter la menace visant leur capitale, Erbil, et reprendre le contrôle du barrage stratégique de Mossoul.

Depuis, les États-Unis ont mis sur pied un coalition rassemblant 22 pays, dont la France (opération Chammal) et étendu les frappes contre l’EI en Syrie. Seulement, les jihadistes se sont adaptés à cette nouvelle donne.

« Nous frappons quand nous pouvons. Les jihadistes sont un ennemi qui apprend et ils savent comment manoeuvrer et comment utiliser les populations et le camouflage, donc, quand nous avons une cible, nous frappons », a expliqué, la semaine dernière, le général Martin Dempsey, le chef d’état-major interarmées américain. « Ils deviennent plus adroits dans l’utilisation des appareils électroniques, a-t-il précisé. Et ils ne plantent plus de drapeaux, ne se déplacent plus dans de longs convois comme ils faisaient avant (…) Ils n’établissent pas de quartiers généraux qui sont visibles et identifiables », a-t-il aussi ajouté.

En clair, comme l’a résumé le colonel Gilles Jaron, le porte-parole de l’État-major des armées à Paris, les jihadistes sont maintenant dans « une logique asymétrique » après avoir adapté leurs modes d’actions à la situation créée par la campagne de frappes.

Du coup, les raids aériens n’empêchent pas l’EI de progresser, notamment dans la province irakienne d’al-Anbar, proche de Bagdad et surtout en Syrie, où il menace de s’emparer de la ville kurde de Kobané, sous les yeux des forces turques, qui restent l’arme au pied de l’autre côté de la frontière.

Aussi, les frappes seules ne suffiront pas. Et cela d’autant plus que, comme l’a encore souligné Jean-Yves Le Drian, le ministre français de la Défense, il n’est pas question de viser les infrastructures en Irak afin que le gouvernement irakien puisse en disposer quand l’EI sera défait…

« Il faudrait des troupes compétentes, des combattants rebelles en Syrie ou des forces gouvernementales irakiennes, pour arriver à vaincre l’EI mais cela prendra du temps », a souligné, il y a quelques jours, le contre-amiral John Kirby, le porte-parole du Pentagone… Seulement, du temps, il n’y en a plus beaucoup pour sauver Kobané et la province d’al-Anbar…

D’où la réunion qui se tiendra ce 14 octobre sur une base aérienne située près de Washington DC et qui rassemblera les représentants de 22 pays membres de la coalition (*), sous la houlette du général Dempsey et du général Lloyd Austin, le patron de l’US Centcom, le commandement militaire américain pour le Moyen Orient et l’Asie centrale.

Selon la Maison Blanche, cette réunion devrait permettre de « faire le point » sur les opérations en cours et d’étudier « d’autres options stratégiques ». Le Pentagone a parlé de  « des défis et de l’avenir de la campagne contre l’EI ».

Pour Paris, qui a envoyé le chef d’état-major des armées, le général Pierre de Villiers, il s’agit, d’après le colonel Gilles Jaron, de « participer à l’élaboration d’un plan d’action conjointe à visée régionale » et « se mettre d’accord sur les grands aspects stratégiques » contre l’État islamique.

Toutefois, selon un diplomate américain cité par l’AFP, il ne faudrait pas s’attendre à des « annonces » à l’issue de cette rencontre de haut niveau.

L’un des points abordés devrait être la création d’une zone tampon autour de Kobané, réclamée par la Turquie et soutenue par la France. Il y a « urgence à la mettre en oeuvre », a estimé M. Le Drian, le 12 octobre, lors de l’émission C Politique de France5. Or, il n’est pas question d’une telle mesure pour Washington.

(*) États-Unis, France, Royaume-Uni, Belgique, Pays-Bas, Australie, Émirats arabes unis, Arabie Saoudite, Qatar, Koweit, Jordanie, Italie, Irak, Nouvelle-Zélande, Liban, Espagne, Égypte, Danemark, Canada, Allemagne, Turquie, Bahreïn.

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