M. Fabius recommande de ne plus utiliser l’expression « État islamique » pour qualifier les jihadistes en Irak et en Syrie

À l’origine, il y avait le groupe al-Tawhid, fondé par le jordanien Abou Moussab al-Zarkaoui, passé par l’Afghanistan avant de venir en Irak après un détour par la Syrie. Puis, cette organisation a été absorbée par al-Qaïda en Irak quand son chef en prit le commandement.

Puis, en 2006, cette formation a conclu une alliance avec 5 autres mouvements jihadistes irakiens pour former le Conseil consultatif des Moudjahidines en Irak (Moudjahidine Shura), avant de prendre le nom d' »État islamique en Irak », en octobre de cette année-là. Entretemps, al-Zarkaoui avait été éliminé par une frappe aérienne américaine.

Ensuite, après avoir étendu ses activités en Syrie, l’organisation a pris le nom d' »État islamique en Irak et au Levant » (EIIL), ce qui a provoqué une rupture avec le canal historique d’al-Qaïda, dirigé par Ayman al-Zawahiri depuis la mort d’Oussama Ben Laden. Sous l’autorité d’Abou Bakr al-Baghdadi, la formation jihadiste a pris le contrôle de territoires importants en Syrie, puis, plus récemment, en Irak.

Et, avec la proclamation d’un califat à cheval sur ces deux pays, l’organisation a de nouveau changé de nom, en le simplifiant, pour devenir « État islamique ». Cette expression suscite quelques réserves dans la mesure où l’utiliser reviendrait à reconnaître à ce califat un statut d’État. Ce qu’il n’est pas. D’un autre côté, comment le désigner autrement que par le nom qu’il s’est donné?

Lors du discours qu’il a récemment prononcé, le ministre de la Défense, M. Le Drian n’a pas utilisé l’expression « État islamique » mais l’acronyme « Daech ».

« En Irak et en Syrie en particulier, l’organisation terroriste Daech, qui se prétend  ‘Etat islamique’, atteint des degrés de maîtrise territoriale transfrontières, d’organisation, de capacité financière et d’équipement encore jamais vus. Elle a déjà pris le monde à témoin d’actes barbares », a-t-il en effet déclaré lors de l’université d’été de la Défense.

Le 10 septembre, lors de la séance des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a abordé cette question de vocabulaire.

« Vous avez parlé d’un ‘prétendu État islamique’ : permettez-moi de revenir, un instant seulement, sur cette expression. Le groupe terroriste dont il s’agit n’est pas un État. Il voudrait l’être, mais ne l’est pas, et c’est lui faire un cadeau que l’appeler ainsi. Je recommande même de ne pas utiliser l’expression ‘État islamique’, car cela occasionne une confusion entre l’islam, l’islamisme, et les musulmans. Il s’agit, mesdames et messieurs, de ce que les Arabes appellent Da’ech, et que j’appellerai pour ma part les égorgeurs de Da’ech! Car ces gens n’ont qu’une idée : violer, crucifier, assassiner. Nous devons tous nous mobiliser pour les faire reculer, les neutraliser, et nous débarrasser de cela », a-t-il dit en réponse à une question posée par Mme Guigou, présidente de la commission des Affaires étrangères.

Mais que signifie « Da’ech »? En arabe, « État islamique en Irak et au Levant » se traduit par « Al-Dawla al-Islamiya fi al-Iraq wa al-Sham ». Pour faire court, nous apprend un article de Libération, Da’ech en est l’acronyme. Ce terme « n’est pas péjoratif en soi », explique Myriam Benraad, politologue spécialiste de l’Irak. « Il l’est devenu en raison du contenu qu’on lui associe: les exactions, les exécutions, les offensives, etc », a-t-elle ajouté.

PS : Pour ce qui concerne Zone Militaire, l’expression État islamique continuera à être utilisée quand il s’agira de citer des responsables internationaux, de même que celle de « Da’ech » puisqu’elle a été retenue par le gouvernement français. Mais de préférence, et histoire que tout le monde comprenne de quoi il s’agit, l’acronyme EI sera privilégié autant que possible.

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