L’Inde mécontente de sa coopération avec la Russie pour le développement de l’avion furtif T-50 PAK FA

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Quand, suite aux troubles de l’été 2013, Washington décida de suspendre ses livraisons d’armes à l’Égypte, personne ne s’était demandé de savoir si cela allait avoir un impact sur les contrats à l’exportation en cours de négociation par les industriels américains de l’armement, même si ce cas de figure était particuliers (Le Caire bénéficie d’une aide militaire des États-Unis). Finalement, cette mesure n’empêcha pas les groupes d’outre-Atlantique d’engranger d’importantes commandes… Même chose quand le Congrès vota l’annulation de la vente de 28 F-16 au Pakistan, en 1990…

Cela étant, la décision du président Hollande de suspendre – et non d’annuler – le livraison à la Russie des BPC Mistral peut être interprétée comme un mauvais signal envoyé à des clients potentiels de l’industrie française de l’armement. Des voix se sont même élevées pour exprimer leur inquiétude au sujet de la vente de 126 avions Rafale à l’Inde. Sauf que, par le passé, l’embargo décrété par le général de Gaulle sur les armes française à destination d’Israël n’empêcha nullement l’exportation, par exemple, du Mirage 5 ou du Mirage F1, dans les années qui suivirent. En clair, chaque cas est différent : tout dépend de la relation de confiance établie au plan bilatéral, que ce soit aux niveaux politique, stratégique et diplomatique.

Dans le cas indien, Paris et New Delhi ont lancé un partenariat stratégique en 1998. En outre, l’Inde est une bonne cliente de l’industrie française de l’armement (Mirage 2000, sous-marins scorpènes, missiles). Et cela ne date pas d’hier… Et puis les relations militaires entre les deux pays sont bonnes, avec notamment la tenue régulière d’exercices conjoints (comme Garuda).

S’agissant de la vente des 126 Rafale, les forces aériennes indiennes ont un besoin urgent de ces appareils – leur chef d’état-major l’a dit et répété – pour remplacer leurs MiG-21 qui ont largement fait leur temps (les premiers exemplaires commencent à être retirés du service). Relancer un appel d’offres demanderait trop de temps. Même chose pour les négociations concernant les aspects industriels et les transferts technologiques d’un tel contrat. Et si New Delhi renonçait à l’avion de Dassault, quel appareil serait choisi? L’Eurofighter, qui, visiblement, n’a pas satisfait aux critères de sélection?

Certains ont cependant leur petite idée… Dans une tribune publiée par The New Indian Express, en juillet, un chercheur du Center Policy Research a dit tout le mal qu’il pensait de l’acquisition des Rafale pour mieux plaider la cause du Su-30, du Tejas (un appareil de conception locale) et surtout le SU-50 PAK FA, l’avion dit de 5e génération que Moscou a proposé de produire en collaboration avec New Delhi.

Cette position est identique à celle qu’avait exprimé, il y a à peine un an,  Victor M. Komardin, un responsable de Rosoboronexport, l’agence chargée de l’exportation des équipements militaires russes, dans les colonnes de The Hindu. Les forces aériennes indiennes n’ont pas besoin du Rafale puisque « l’avion de combat de 5e génération développé conjointement par l’Inde et la Russie sera prêt dans les 5 prochaines années », ce qui « éviterait le besoin d’un avion moins capable de quatrième génération », avait-il affirmé.

Dans le même temps, histoire de faire bonne mesure, l’édition indienne de la « Russie d’aujourd’hui », émanation de la Russian daily Rossiyskaya Gazeta, une publication officielle russe, avait développé presque les mêmes arguments. « L’acquisition du Rafale à un coût prohibitif est une extravagance que l’Inde ne peut pas se permettre à un moment où sa croissance économique a atteint un embarrassant 5% et que la roupie est en chute libre », fit-elle valoir.

Le fait est, l’Inde avait l’intention d’acquérir 244 exemplaires du T-50 ou PAK FA ((Fifth Generation Fighter Aircraft – FGFA). Par la suite, cette commande a été ramenée à 144 unités. Seulement, New Delhi a exprimé quelques préoccupations au sujet de ce programme… tout en reprochant à la partie russe de ne pas y répondre.

Les autorités indiennes sont « particulièrement contrariées par le fait que, tout en étant un partenaire à part entière dans le projet FGFA, Moscou n’est pas désireux de partager les détails techniques sur cette prochaine génération d’avion de chasse furtif, sur laquelle la version indienne sera basée », écrit ainsi India Today.

Ainsi, les responsables indiens n’ont pas pu obtenir d’informations sur les raisons d’un récent incendie qui a gravement endommagé un prototype… Et quant à leurs interrogations au sujet de la qualité des moteurs AL-41F1, la sécurité et la fiabilité de l’appareil, elles ne trouvent aucune réponse… En outre, ils estiment que la furtivité de la cellule ne correspond pas aux attentes, de même que les performances du radar à antenne active N036 mis au point par NIIP Tikhomirov.

En outre, aucun pilote indien n’a été autorisé à voir de près l’avion. Dommage quand l’on sait que l’Inde y a investit 295 millions de dollars. Quant aux transferts technologiques, ils se limitent à la portion congrue (13%), Hindustan Aeronautics Limited (LTD) étaint réduit à fournir les pneumatiques et quelques éléments de l’avionique. Ce qui fait dire à India Today que New Delhi n’est pas « considéré comme un partenaire à part entière », sauf pour « en termes de contributions financières ». Et d’ajouter : « Le retard dans la résolution des problèmes techniques fait que l’IAF (Indian Air Force) n’aura pas de chasseur de cinquième génération avant la prochaine décennie ».

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