La vente de deux BPC « Mistral » à la Russie concerne aussi le Japon

Depuis une semaine et l’affaire du B-777 de la Malaysia Airlines abattu dans l’est de l’Ukraine, les autorités françaises sont mises sous pression en raison de la livraison programmée du premier des deux Bâtiments de projection et de commandement (BPC) commandés par la Russie en juin 2011 poour 1,2 milliard d’euros.

En résumé, étant donné que Moscou soutient les séparatistes ukrainiens, il serait « inapproprié » (le terme utilisé à Washington) de vendre ces deux navires. Cette position est partagée par d’autres pays européens, comme le Royaume-Uni (dont les dirigeants feraient mieux de balayer devant leur porte) et plus généralement les pays de l’ancienne sphère d’influence de l’ex-URSS.

Mais il n’y a pas qu’outre-Atlantique et sur le Vieux Continent que le contrat des BPC « Mistral » est une source de préoccupation. Le Japon est en effet aussi concerné. Pour rappel, aucun traité de paix n’a été conclu entre Moscou et Tokyo depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale.

Et les deux capitales ont des différends territoriaux, notamment au sujet des îles Kouriles, annexées par Staline en 1945 en vertu des accords de Yalta alors qu’elles appartenaient au Japon, où elles étaient appelées Habomai, Shikotan, Etorofu et Kunashiri. Sur un plan stratégique, ces territoires sont importants pour la Flotte russe du Pacifique dans la mesure où ils verrouillent l’accès la mer d’Okhotsk.

Le contentieux n’a donc jamais été tranché et il risque de ne pas l’être avant un bon moment. Et le sujet reste très sensible. Ainsi, quand l’ex-président russe, Dmitri Medvedev (redevenu Premier ministre depuis), s’était rendu sur l’archipel pour y annoncer un renforcement des moyens militaires, les autorités nippones parlèrent d' »outrage impardonnable »…

Si, ces derniers mois, il a souvent été question des frictions entre la Chine et le Japon au sujet des îles Senkaku (dont la souveraineté est cette fois revendiquée par Pékin et Taïwan), il n’en reste pas moins que les forces aérienne d’autodéfense japonaises décollent plus souvent pour aller accompagner un avion de renseignement ou un bombardier russe qu’un appareil chinois (70% des interventions lors du premier semestre 2014).

D’où la préoccupation de Tokyo à l’égard des deux BPC à la Russie. « Il y a sur cette question beaucoup de débats en Europe et je voudrais m’abstenir de commenter. Cependant, sur les deux navires, il semble que l’un soit destiné à être dépêché en Extrême-Orient, ce qui pour notre pays, du point de vue de la sécurité, doit être observé avec attention », a ainsi affirmé Yoshihide Suga, le porte-parole du gouvernement nippon, le 24 juillet.

Certes, tout est possible mais le risque d’un conflit entre le Japon et la Russie est faible. Tout simplement parce que le premier a besoin du gaz russe et qu’il bénéficie (surtout) du parapluie américain.

En outre, malgré les critiques japonaises au sujet de la fourniture par DCNS de grilles d’appontage pour hélicoptères à l’agence de surveillance maritime chinoise (celle qui fait régulièrement des incursions dans les eaux des îles Senkaku), Paris et Tokyo ont convenu, lors d’une rencontre « 2+2 », en janvier dernier, d’approfondir leurs relations militaires.

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