Pourquoi il faut s’intéresser aux îles Éparses

eparses-20140719Tromelin, Les Glorieuses, Juan de Nova, Bassas da India et Europa… Ces noms d’îles de l’océan Indien et qui constituent les Éparses ne disent sans doute pas grand chose à beaucoup. D’une surface très modeste (43,2 km2), elles représentent, avec Mayotte, 636.000 km2 de zone économique exclusive (ZEE), ce qui représente une bonne moitié de la superficie du canal du Mozambique, où elles sont éparpillées du nord au sud (à l’exception de Tromelin)

Or, ces îles sont sous souveraineté française. La plus grande (30 km2), Europa, accueille depuis 1949 une station météorologique et un détachement de 14 militaires, relevés tous les 45 jours. Avec son km2 de surface et ses 285.000 km2 de ZEE, Tromelin a fait l’objet d’un accord très discret de cogestion économique avec Maurice, qui en revendique la possession. Cela avait fait l’objet d’un débat à l’Assemblée nationale, l’an passé… et le texte n’a toujours pas été ratifié.

L’archipel des Glorieuses regroupe l’île du Lys, l’île aux Crabes et la Grande Glorieuse. D’une superficie totale de 7 km2, situé à 220 km à l’est de Mayotte, il est officiellement entré dans le giron français en 1892 alors qu’il était convoité par les Britanniques. Une section de 14 légionnaires du DLEM (Détachement de la Légion étrangère de Mayotte) s’y relaient, là aussi, tous les 45 jours.

D’une surface équivalente, Juan de Nova, situé à environ 150 km de Madagascar et française depuis le 31 octobre 1897, accueille 14 marsouins du 2e Régiment de Parachutistes d’Infanterie de Marine (RPIMa) de La Réunion. Enfin, Bassas da India est un récif coralien dont la partie émergée ne représente seulement que 200 m2. Mais son intérêt tient à la ZEE qu’il permet d’avoir.

Alors, on peut se demander, en effet, pourquoi il faudrait s’intéresser à ces confettis (il y a les Éparses… mais il y aussi Clipperton, dans le Pacifique) aux noms exotiques ou qui rappellent les explorateurs du XVIIIe siècle. Et pourtant, ils ne sont pas à négliger pour une raison simple : outre leur position géostratégique, les ressources de leur ZEE constitueront sans doute demain apport non négligeable à la prospérité économique française.

Selon une étude de l’US Geological Survey (USGS), le canal du Mozambique, qui tent par ailleurs à devenir une voie maritime de plus en plus fréquentée, serait « une prochaine mer du Nord en puissance ». Selon plusieurs études, il est en effet estimé qu’il y aurait, au large du Mozambique, entre 6 et 12 milliards de barils de pétrole et de 3 à 5 milliards de m3 de gaz. D’après l’AFP, des campagnes de prospection sont en cours dans la ZEE de Juan de Nova et d’autres sont à venir pour celle d’Europa.

« L’intérêt pour la France est de savoir s’il existe des gisements entre 1.500 et 2.000 m de profondeur qui pourraient donner lieu à une exploitation. Le Mozambique est déjà passé à la vitesse supérieure, en phase d’exploitation dans les blocs à proximité de ses côtes », a expliqué le préfet Pascal Bolot, en charge des Terres australes et antarctiques françaises (TAAF), dont les îles Éparses forment le 5e district depuis leur création en tant que collectivité, en 2007. « Le fait que l’on puisse y découvrir des ressources, c’est un point positif mais qui ne change pas la position de la France : nous sommes légitimes dans ces îles », a-t-il ajouté.

Car, en effet, la souveraineté de la France y est contesté, en particulier par Madagascar, à qui ces îles avaient été rattachée administrativement, en 1896, c’est à dire quand la Grande Île était une possession française. Mais avant de lui accorder son indépendance, le général de Gaulle signa, en 1960, un décret pour confier la gestion des Éparses au préfet du département de la Réunion. D’où le contentieux actuel entre Paris et Antanarive. Contentieux qui a même été un thème de campagne lors de la campagne pour l’élection présidentielle malgache, en 2013.

Mais le président élu, Hery Rajaonarimampianina, ne parle pas de « revendication » sur ces îles mais de « négociations », l’idée étant sans doute d’obtenir un accord de cogestion, comme Maurice avec l’île de Tromelin (mais qui, comme on l’a vu, n’a toujours pas été ratifié par la France) au sujet des ressources halieutiques.

Au ministère français des Affaires étrangères, l’on fait valoir que la question de la souveraineté française est « réglée », que « les différends sont gelés » et que « l’enceinte des discussions la Commission de l’Océan indien (COI) ». Seulement, l’on assure en même temps être « prêt à discuter » de « cogestion ».

Le sujet sera certainement abordé lors de la prochaine réunion du COI, le 26 juillet prochain, à Moroni, où les présidents Hollande et Rajaonarimampianina se croiseront…

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