Le ministre norvégien de la Défense plaide pour un engagement accru de l’Otan dans la région Asie-Pacifique

novege-20140626

Nommée à la tête du ministère de la Défense en octobre dernier, Mme Ine Eriksen Søreide a été, à ce titre, invitée à s’exprimer lors d’un colloque, qui, organisé le 25 juin par l’Atlantic Council et l’Institut norvégien des études de défense, avait pour thème « l’Otan à l’ère de la concurrence mondiale« .

C’est ainsi qu’elle a plaidé pour une implication plus grande de l’Otan dans la région Asie-Pacifique, désormais prioritaire pour Washington. Cet engagement dans cette zone est « crucual pour la stabilité mondiale », a-t-elle dit, selon le verbatim de son intervention publié par Defense News.

« Ce qui peut se passer dans la région Asie-Pacifique aura un impact mondial et pourrait aussi avoir des conséquences pour la Norvège », a fait valoir Mme Ine Eriksen Søreide. « Nous devons y être engagés », a-t-elle estimé. D’où la présence inédite d’une frégate de la marine norvégienne à l’édition 2014 de l’important exercice aéro-naval Rim of the Pacific (RIMPAC), organisé par les Etats-Unis. « Notre participation envoie aussi un message plus large : la Norvège se soucie des intérêts de sécurité des États-Unis », a-t-elle ajouté.

Voilà une déclaration qui va dans le sens de Leon Panetta, l’ancien secrétaire américain à la Défense, qui insistait sur le fait que l’Europe ne devait pas redouter la politique des Etats-Unis dite du « pivot » vers la région Asie-Pacifique mais au contraire s’y positionner.

D’ailleurs, l’Otan et le Japon ont récemment renforcé leur coopération avec la signature par le Premier ministre nippon, Shinzo Abe, d’un « programme individuel de partenariat et de coopération (IPCP) ». « Nos discussions ont mis en relief tout l’intérêt que nous attachons à notre relation et tout le potentiel d’action qu’elle offre », avait commenté, en mai, Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l’Alliance.

L’importance de la région Asie-Pacifique avait été soulignée par le dernier Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (LBDSN) français. C’est une zone qui « joue un rôle déterminant dans la mondialisation » et qui constitue aujourd’hui « le principal foyer de croissance du monde, mais aussi l’une des régions où les risques de tensions et de conflits sont les plus élevés ».

En clair, une guerre dans cette partie du globe aurait des conséquences en Europe. « Toute crise ou conflit dans l’un des deux continents affecterait immanquablement les intérêts de l’autre, au sens large. Malgré la distance qui sépare nos continents, notre sécurité comme notre prospérité sont désormais inséparables », avait récemment écrit Jean-Yves Le Drian, le ministre de la Défense, dans la préface d’une brochure diffusée par la Délégation aux affaires stratégiques (DAS).

Par ailleurs, Mme Søreide a également plaidé pour que les membres européens de l’Otan arrêtent de baisser leur effort de défense. « Les courbes doivent être inversées. Nous devons ous entendre sur la façon dont nous, au fil du temps, pouvons atteindre l’objectif de consacrer 2% de notre PIB à la Défense et 20% de nos budgets militaires aux investissements », a-t-elle dit.

Là encore, les propos du ministre norvégien vont dans le sens des responsables américains, Barack Obama en tête, qui déplorent la baisse continue des dépenses militaires de la plupart des pays européens. Mais le cas de la Norvège est particulier au sein de l’Otan : grâce à sa rente pétrolière, ses finances publiques se portent bien, ce qui fait c’est un des rares pays du Vieux Continent à avoir maintenu son effort de défense, voire même à l’augmenter.

Enfin, Mme Søreide a estimé que les pays européens membres de l’Alliance doivent faire des efforts dans plusieurs domaines, notamment en partageant davantage le renseignement. « C’est un paradoxe que l’Otan semble être prise au dépourvu quand des crises comme celles de la Crimée et de la Géorgie se produisent », a-t-elle déploré. « Notre manque de connaissance de la situation cause des dommages à notre crédibilité et porte atteinte à notre capacité à assurer la sécurité collective », a-t-elle ajouté.

Autre secteur abordé par Mme Søreide : celui de la préparation des forces. Une « réaction rapide » de l’Otan signifie qu’elle doit prendre « quelques jours et pas quelques mois », a-t-elle dit. Pourtant, les pays de l’Alliance n’ont pas tardé à mettre en application les mesures de « réassurance » au profit des pays de l’Est lors de la crise russo-ukrainienne…

Enfin, le ministre norvégien a estimé que les pays de l’Otan devraient mener d’avantage d’exercices, basés sur des scénarios faisant appel au « spectre complet des capacités militaires ». Et pour cause. D’après les propos du lieutenant-général Morten Haga Lunde, recueillis par Stephen Saideman, un professeur canadien spécialiste des relations internationales; lors d’une visite à l’ambassade de Norvège à Ottawa, Oslo craint l’activité russe dans l’Arctique. Et l’affaire de la Crimée n’est pas faite pour rassurer sur les intentions de Moscou.

« Les Norvégiens voudraient voir plus d’activité de l’Otan dans le Grand Nord – avec plus de formation, plus de doctrine, plus d’exercices, etc.. – puisqu’il s’agit d’un environnement de combat difficile », rapporte Stephen Saideman.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]