Viktor Orban demande l’autonomie pour les minorités hongroises en Europe

La coalition qu’il dirige ayant triomphalement gagné les dernières élections législatives hongroises (133 sièges remportés sur 199), Viktor Orban a logiquement été reconduit dans ses fonctions de Premier ministre, poste qu’il occupe depuis 2010 non sans avoir d’ailleurs suscité des polémiques.

Alors que la tension entre Kiev et Moscou ne retombe pas en raison de l’activisme des séparatistes pro-russes dans l’est de l’Ukraine, M. Orban a réclamé, lors de son investiture, le 10 mai, l’autonomie pour les minorités hongroises des pays frontaliers de la Hongrie, y compris chez son voisin ukrainien.

« Les Hongrois qui vivent dans le bassin des Carpates ont le droit d’avoir la double nationalité, des droits communautaires et aussi l’autonomie », a-t-il affirmé devant ses partisans, rassemblés devant le Parlement.

Pour comprendre les revendications de M. Orban, et tout ce qu’elles supposent, il faut remonter à la fin de la Première Guerre Mondiale. L’empire austro-hongrois ayant été vaincu, la Hongrie se retrouva, en vertu du Traité du Trianon de juin 1920, réduite à 92.000 km2 avec 8 millions d’habitants, contre 325.000 km2 et 21 millions en 1914.

Les conditions de l’armistice imposées par les Alliées prévoyaient en effet le « dépeçage » de la Hongrie au profit de la Tchécoslovaquie, du Royaume de Roumanie et de l’État des Slovènes, Croates et Serbes (lequel fusionnera avec la Serbie et le Monténégro pour former le Royaume de Yougoslavie en 1929).

En 1918, s’étant emparés du pouvoir à Budapest, les communistes hongrois refusèrent ces conditions. Ce qui donna lieu à une courte guerre (perdue) pour reprendre la Transylvanie à la Roumanie, laquelle était soutenue par la France (Georges Clémenceau, le « Père la Victoire », n’étant en plus pas très bien disposé à l’égard des « complices de Lénine »).

Depuis, cette question des minorités magyares est restée en l’état. Ou presque. Actuellement, il est estimé qu’environ 2,5 millions de personnes d’origine hongroise vivent en Roumanie (1,4 millions), en Slovaquie, en Ukraine ou encore en Serbie.

En 2010, Viktor Orban leur a accordés la nationalité hongroise et, récemment, le droit de vote aux élections législatives. Bien évidemment, cette politique n’est pas sans susciter quelques tensions avec les pays concernés. Et plus particulièrement avec la Roumanie.

Ainsi, un site d’informations hongrois (publié en français) a rapporté que, à l’appel du Forum d’Union Civile (CÖF), proche de Viktor Orban, des milliers de personnes avaient manifesté à Budapest, en octobre 2013, pour demander l’autonomie du pays Sicule, en Transylvanie roumaine, où vivent de nombreux habitants d’origine hongroise. Ces derniers ont même un parti, à savoir l' »Union démocratique des Hongrois de Roumanie (UDMR) ».

Pour le moment, il n’est guère probable que cela aille plus loin, même si la question d’une annexion par la Hongrie de la Transylvanie a clairement été posée à János Martonyi, le ministre des Affaires étrangères hongrois, en mars 2013. « Il s’agit d’un tel non-sens que je suis incapable de réagir à cela », s’était-il insurgé.

En outre, la Hongrie est membre de l’Union européenne et de l’Otan depuis 2004, ce qui limite toute idée aventureuse… Et cela, même si M. Orban affiche une hostilité (de façade?) à l’égard des institutions européennes, qu’il accuse de tous les maux (oubliant au passage que son pays a bénéficié des fonds structurels européens, lesquels ont permis de financer 97% des infrastructures construites en Hongrie depuis 10 ans…).

Mais en sera-t-il toujours ainsi? Aux dernières élections, le Jobbik, un autre parti qui dénonce le Traité de Trianon tout en fustigeant la construction européenne, a obtenu 20% des voix (23 sièges), soit 3% de plus par rapport au précédent scrutin.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]