Kader Arif : « Cette guerre en Indochine fut trop longtemps oubliée »

indochine-20140427Oubliée la guerre d’Indochine? Déjà, entre 1945 et 1954, elle ne suscitait qu’une relative indifférence, car trop lointaine et ne concernant que des engagés volontaires. L’on se souvient de la cuvette de Dien Bien Phu, d’ailleurs plus pour critiquer le commandement de l’époque que pour souligner le courage et le sacrifice des soldats français. Quant aux combats de la RC4 et des camps de prisonniers Viet-minh, ils seraient probablement totalement ignorés s’il n’y avait pas les témoignages des survivants, les livres d’un Erwan Bergot ou encore les films d’un Pierre Schoendoerffer.

Cette guerre, contrairement à ce que beaucoup pensent, qui n’a pas été seulement coloniale (d’où le soutien des Etats-Unis à la France), n’a pas eu bonne presse dans certains milieux non sans influence. Faut-il oublier les débarquements de blessés pendant la nuit pour éviter les manifestations de mouvements politiques soutenant ouvertement Ho Chi Minh? Ou encore les sabotages de munitions? (voir à ce sujet « Par le sang versé », de Paul Bonnecarrère) Ou la mansuétude à l’égard de ceux qui affichèrent leur soutien au Viet minh, comme un certain Georges Boudarel, qui fit l’objet, en 1991, d’une plainte pour crimes contre l’humanité déposée par d’anciens prisonniers du camp 113? Et que dire des condoléances élogieuses adressées au « peuple vietnamien » par le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, au moment de la mort du général Giap, alors que la diplomatie américaine fit le strict minimum?

Cela étant, le secrétaire d’Etat aux Anciens combattants et à la mémoire, Kader Arif, a rendu un hommage appuyé au combattants d’Indochine, lors d’un déplacement à Fréjus visant à commémorer le 60e anniversaire de la fin de cette guerre, le 26 avril.

Entre le centenaire du début de la Grande Guerre et les 70 ans des combats de la Libération, calendrier des commémorations est chargé cette année. Aussi, le secrétaire d’Etat a invité « les Françaises et les Français à honorer la mémoiçre de nos soldats qui ont combattu en Indochine entre 1945 et 1954 », d’abord contre les forces japonaises, puis contre le Viet-minh, qui avait attaqué les garnisons françaises.

« Officiers, sous-officiers, soldats, vous avez fait la fierté et l’honneur de la France, vous lui avez été fidèles, vous avez été les combattants de la Nation et de la République. Aujourd’hui, c’est la République, à travers ma voix, qui vous témoigne de sa fidélité et de sa reconnaissance », a déclaré M. Arif, en s’adressant aux anciens d’Indochine.

« Dès l’automne 1945, le général de Gaulle envoie le corps expéditionnaire Français d’Extrême-Orient en Indochine. A partir de 1946, les effectifs augmentent. Les soldats de l’armée française, venus de métropole, d’Afrique du Nord et d’Indochine, tous iront jusqu’au bout de leur devoir pour la Nation et pour la République, en un mot pour la France », a-t-il rappelé. Et, citant Romain Gary, il a ajouté qu’il s’agissait-là du « témoignage d’un véritable patriotisme, celui qui est ‘l’amour des siens' ».

Et le secrétaire d’Etat de lancer que « cette guerre en Indochine fut trop longtemps oubliée ». Car, a-t-il poursuivi, « la France oublia qu’elle put compter pendant 8 ans sur l’héroïsme et le professionnalisme de son armée, une armée de toutes les origines, de toutes les couleurs, de toutes les confessions » et aussi qu’elle « put compter aussi sur le courage et la détermination d’hommes qui ont sacrifié leur jeunesse, qui ont donné leur vie ».

Aussi, pour Kader Arif, « 60 ans après, se souvenir est non seulement un devoir mais aussi une nécessité », envers les « soldats morts pour la France qui firent de la terre d’Indochine leur tombeau », les 24.000 militaires et civils qui reposent à la nécropole de Fréjus, « ceux qui sont revenus blessés dans leurs corps et dans leur esprit », les « prisonniers du Vietminh et leurs familles ».

Enfin, le secrétaire d’Etat aux Anciens combattants a aussi insisté sur le dévoir et la nécessité de « rappeler que la France en Indochine, par l’héroïsme déployé de ses soldats, par le sang versé de ses combattants, par la volonté sans faille de ses chefs, a écrit une page importante de son histoire militaire ».

« Hier, nos soldats ont répondu à l’appel de la France en Indochine, comme beaucoup y répondent encore aujourd’hui, en Afghanistan, au Liban, au Mali, en Centrafrique. La République se doit d’inscrire le souvenir de l’Indochine dans l’ensemble du territoire, dans chacune des communes de France, comme elle doit y inscrire le souvenir des conflits du temps présent », a encore affirmé M. Arif.

« L’identité de notre Nation aujourd’hui est une richesse à l’image de cette mémoire collective que nous partageons, une mémoire vive, une mémoire riche, une mémoire plurielle. Elle incarne notre passé. Elle éclaire notre avenir », a-t-il conclu.

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]