Le régime de Bachar el-Assad est à nouveau soupçonné d’avoir utilisé des armes chimiques

Après l’attaque au gaz neurotoxique ayant visé un faubourg de Damas, en août dernier, et l’accord conclu entre les Etats-Unis et la Russie au sujet de son démantèlement, lequel est encadré par la résolution 2118 du Conseil de sécurité des Nations unies, l’on pouvait penser qu’il ne serait plus question, à l’avenir, de l’arsenal chimique syrien.

Depuis, ce dernier (1.290 tonnes d’armes chimiques, dont 300 tonnes de gaz moutarde et du sarin) a en effet été mis sous scellé par les inspecteurs de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) en vue de sa destruction, laquelle doit être effective le 30 juin prochain.

« Jusqu’à ce jour, la Syrie a retiré ou détruit en territoire syrien environ 80 pour cent de ses stocks d’armes chimiques », a même affirmé, le 19 avril, Sigrid Kaag, la Coordonnatrice spéciale de la Mission conjointe des Nations Unies et de l’OIAC. « Le régime syrien semble ainsi en mesure de respecter la date butoir du 27 avril, à laquelle il est supposé ne plus disposer d’aucune arme chimique, comme convenu dans l’accord avec les Etats-Unis et la Russie », a-t-elle précisé.

Pourtant, en février, le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, avait estimé que Damas « freinait sur la destruction des armes chimiques ». Même chose pour John Kerry, son homologue américain. A l’époque, il était question d’un retard de 6 à 8 semaines par rapport au calendrier prévu pour la neutralisation de cet arsenal.

Quoi qu’il en soit, alors qu’il venait d’accueillir sur le tarmac de Villacoublay, le 20 avril, les 4 journalistes français qui venaient d’être libérés par les jihadistes de l’Etat islamique d’Irak et du Levant (EIIL), le président Hollande a indiqué avoir des « éléments » – mais pas de preuve – au sujet d’une nouvelle attaque chimique attribuée aux forces restées fidèles à Bachar el-Assad. « Ce que je sais, c’est que ce régime a démontré à la fois l’horreur des moyens qu’il pouvait utiliser et le refus de toute transition politique », a-t-il poursuivi.

« Des indications, qu’il faut vérifier, nous sont données selon lesquelles il y aurait eu des attaques chimiques récemment », a affirmé, de son côté, M. Fabius. « Beaucoup moins importantes que celles de Damas il y a quelques mois, mais des attaques très mortelles, ponctuelles, au Nord-Ouest, pas loin du Liban », a-t-il ajouté.

Ces soupçons sont également partagés par les Etats-Unis. « Nous avons des indications sur l’utilisation d’une substance chimique industrielle toxique » dans la ville de Kfar Zeita, a en effet affirmé, le lendemain, Jen Paski, la porte-parole du département d’Etat, Jen Psaki. « Nous examinons les allégations selon lesquelles le gouvernement est responsable », a-t-elle expliqué.

La semaine passée, des rebelles syriens ont affirmé que des hélicoptères des forces loyalistes avaient largués, les 11 et 12 avril dernier, du gaz chloré sur le village de Kfar Zeïta. La télévision officielle syrienne avait imputé la responsabilité de l’attaque aux insurgés.

Le gaz en cause serait du dichlore, ou bertholite, utilisé la première fois lors de la Première Guerre Mondiale. Le site « la guerre des gaz » explique à son sujet que « au contact des voies respiratoires, il se transforme en acide chlorhydrique par réaction avec l’hydrogène moléculaire ».

Et d’ajouter : « Son action est ressentie immédiatement, provoquant une vive irritation accompagnée de toux, dyspnée (difficulté de la respiration), hémoptysie (crachement de sang provenant des voies respiratoires). A très forte concentration, il est susceptible de provoquer la mort en quelques minutes. Mais, dans les vagues, les concentrations obtenues étant plus faibles, les effets mortels n’apparaissent qu’après 20 à 30 minutes, suite à un œdème pulmonaire qui peut entraîner le décès quelques minutes ou quelques jours plus tard » et que la « dose létale est estimée à 60 mg (…) ce qui correspond à un séjour de 20 minutes dans une atmosphère à 0,36g/m3, ou 1/10000e . On considère que dans cette concentration, tout homme surpris sans protection est mis hors de combat. » A priori, cette substance n’a pas été recensée par les inspecteurs de l’OIAC.

Ces accusations portant sur l’usage d’armes chimiques viennent quelques jours après la présentation par la France du rapport César, qui, fondé « sur 55.000 photos qui correspondent sans doute à plus de 11 000 cadavres », a dénoncé la « torture de masse perpétrée par le régime syrien ».

Mais les exactions ne sont pas essentiellement commises par les forces loyalistes : les rebelles de la mouvance jihadiste ne sont hélas pas en reste non plus. Des témoignages (et des vidéos circulent aussi sur Internet) font état d’atrocités dont est victime la minorité chrétienne syrienne.

Au total, selon l’Observatoire des droits de l’homme en Syrie (OSDH), 150.344 personnes ont été tués depuis le début du conflit syrien, dont 37.781 insurgés et 58.480 membres des forces du régimes (combattant du Hezbollah inclus).

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