Le transfert des cendres de Jean Zay au Panthéon choque les associations militaires

Le 21 février 2014, à l’occasion d’un discours prononcé au Mont Valérien, le président Hollande a annoncé le transfert des cendres de quatre personnalités censées représenter l’esprit de résistance dans sa diversité, à savoir  Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz, Pierre Brossolette et Jean Zay.

Ces choix n’avaient jusqu’à présent pas (ou peu) été contestés. Ainsi, pour l’historienne Annette Wieviorka, ils étaient « plutôt bons » étant donné que ces quatre personnalités « dépassent largement le cadre de la Seconde Guerre Mondiale par leur engagement éthique et leur itinéraire et incarnent des valeurs universelles ».

Mais tout le monde ne partage pas ce point de vue, notamment au sujet de Jean Zay, ministre de l’Instruction Publique entre 1936 et 1939 et à l’origine de nombreuses réformes, dont la scolarité obligatoire jusqu’à 14 ans et l’interdiction des signes politiques et religieux à l’école. Cet élu du Front populaire fut condamné en octobre 1940 pour désertion en présence de l’ennemi à la déportation à vie et à la dégradation militaire. En juin 1944, il fut abattu par la Milice de Vichy, comme d’ailleurs Georges Mandel, qui lui, avait une sensibilité de droite.

Co-auteur d’une biographie à son sujet, Roger Karoutchi, conseil régional UMP d’Ile-de-France et ancien ministre, s’est réjouit de l’annonce du président Hollande. et cela d’autant qu’il fait partie du comité pour la « panthéonisation » de Jean Zay. « Lui reconnaître une place au Panthéon, c’est lui reconnaître son rôle de grand républicain mais aussi un signe fort par rapport à la façon dont il a été tué », a-t-il dit, sur France3.

Seulement, le Comité national d’entente, qui fédére une trentaine d’associations d’anciens militaires, de vétérans et de réservistes, dont, excusez du peu, la Saint-Cyrienne, le Souvenir Français, la Société des Membres de la Légion d’Honneur, la Société Nationale des Médaillés Militaires, la Fédération Nationale André Maginot ou encore l’Union Nationale des Combattants, a dénoncé le transfert des cendres de Jean Zay au Panthéon, sur le fronton duquel il est écrit « Aux grands hommes, la Patrie reconnaissante ».

« Les trois premiers sont des résistants et répondent à l’objet de cet hommage, il n’en est pas de même pour Jean Zay. Certes il a été interné avant d’être lâchement assassiné en juin 44 mais tant d’inconnus et de célébrités sont morts les armes à la main ou dans des camps d’extermination, après des faits de résistance, que cela ne fait pas de lui un héros », est-il écrit dans le communiqué diffusé le 13 mars par le Comité national d’entente, qui estime que ce ministre du Front populaire n’a été qu’une victime parmi d’autres.

Mais surtout, le texte, signé par le général (2S) Dominique Delort, président de la Saint-Cyrienne et du Comité national d’entente, fait valoir que le transfert de Jean Zay au Panthéon est surtout une « provocation » en cette année de commémoration du Centenaire de la Grande Guerre. « Elle est immense, elle est inoubliable », insiste-t-il.

Il est ainsi reproché à Jean Zay d’avoir écrit un poème ayant porté atteinte « au symbole par excellence de notre patrie, de notre pays, de notre nation, le Drapeau ». Et le fait est que ce texte, qu’il n’a pas renié, a de quoi choquer. « Terrible morceau de drap coulé à ta hampe, je te hais férocement, Oui, je te hais dans l’âme, je te hais pour toutes les misères que tu représentes… Que tu es pour moi de la race vile des torche-culs… » cite le communiqué du Comité national d’entente.

« Certains diront qu’à 20 ans il a commis une faute et qu’il était bien jeune mais 20 ans c’est déjà assez vieux pour mourir pour la France pendant la Grande Guerre, la Résistance et la Libération, aujourd’hui lors des opérations extérieures, en Afghanistan, au Mali, en RCA! », avance le général Delort, au nom du Comité national d’entente, pour qui il est « hautement préférable de transférer les cendres d’un Résistant, d’un Français Libre, d’un Soldat de la 1ère armée, métropolitain ou ‘ indigène’ inconnu, aux côtés de ceux qui sont la mémoire de la France ».

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