Incendie de Carpiagne : L’adjudant Fontaine finalement renvoyé en correctionnelle

En juillet 2009, un violent incendie ravageait une superficie de 1.069 hectares dans les environs de Marseille. Le feu avait pris derrière la butte d’un des champs de tir du camp militaire de Carpiagne, après une séance de tirs au cours de laquelle des balles traçants furent utilisées, alors que cela était formellement interdit à l’époque.

Du coup, un sous-officier du Régiment Etranger (RE) d’Aubagne, l’adjudant Fontaine, qui dirigeait l’exercice, fut mis en examen pour « destruction involontaire par incendie de forêt de nature à causer un dommage irréversible à l’environnement et pour blessures involontaires ».

L’enquête de commandement ordonnée après les faits avait indiqué que le sous-officier qui « détenait toutes les qualifications et les aptitudes techniques pour diriger cette séance de tir », avait « utilisé des munitions traçantes, vraisemblablement à l’origine de l’incendie, alors qu’il avait été informé des directives en interdisant l’usage » et conclu que l’adjudant avait commis « faute professionnelle grave, conséquence d’un acte d’indiscipline flagrant ».

Seulement, une expertise de l’Institut de recherche criminelle de la Gendarmerie nationale (IRCGN) n’était pas aussi catégorique quant à l’origine du feu, étant donné que les fragments métalliques retrouvés sur les lieux « ne provenaient pas d’une chemise de balle traçante de 5,56 mm NATO modèle F-5 du lot 17-RG-02 » utilisé lors de l’exercice de tir. En clair, il n’était pas possible d’établir un lien de cause à effet entre la séance dirigée par l’adjudant Fontaine et l’incendie.

« J’ai décidé d’un tir à 25 m sur une butte de tir parce que, pour moi, il n’y avait pas de danger. Dans les premiers relevés, on me dit que le feu s’est déclaré juste derrière la butte de tir. Or, il faut savoir que ces balles sortent du canon de l’arme à 960 m/seconde et peuvent parcourir jusqu’à 3.000 mètres. Il me paraît impossible que les projectiles soient retombés juste derrière la cible alors qu’elles auraient dû ricocher beaucoup plus loin. Et puis, il y a eu cinq départs de feux quasi-simultanés ce jour là », s’était par ailleurs expliqué le sous-officier, quelques semaines après l’incendie.

Aussi, en 2011, les juges en charge du dossier prononcèrent un non-lieu partiel en faveur du sous-officier, qui restait toutefois poursuivi pour « violation de consigne ». Il avait été sanctionne de 40 jours d’arrêt pour ce motif, selon le quotidien La Provence. L’affaire aurait pu en rester là. Sauf que quelques semaines plus tard, cette décision fut contestée devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, avec à la clé de nouvelles expertises.

Souvent, quand on demande un avis à deux experts, ils sont rarement d’accord… Ainsi, selon l’étude commandée à Alério Nannini, expert judiciaire auprès de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, « la composition pyrotechnique qui permet de tracer le trajectoire de la balle est à l’origine de l’incendie » et « la durée de combustion de deux secondes s’effectue principalement après leur ricochet dans les broussailles ».

Aussi, le 31 janvier, l’avocat général a requis le renvoi de l’adjudant Fontaine, depuis affecté au 2e Régiment Etranger de Parachutistes (REP), devant le tribunal correctionnel pour « l’ensemble des délits ayant donné lieu à sa mise en examen », commis « en temps de paix et dans l’exercice du service », en faisant valoir qu' »en l’absence d’éléments pouvant permettre d’envisager une origine différente à l’incendie qui s’est déclaré à proximité immédiate de l’aire de tir, il paraît donc établi que c’est bien l’emploi de munitions traçantes qui a engendré le départ de feu ».

Un mois plus tard, ces réquisitions ont donc été suivies par la chambre de l’instruction, qui a, le 27 février, renvoyé le légionnaire en correctionnelle pour « destruction, dégradation ou détérioration involontaire du bien d’autrui par l’effet d’un incendie provoqué par la violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence ou de sécurité, en l’espèce en utilisant et en faisant utiliser sans l’accord de sa hiérarchie, lors d’un exercice de tir dont il était le directeur, des balles traçantes dont l’usage était interdit ».

Le sous-officier, qui peut compter sur ses camarades et sur un groupe de soutien dynamique créé sur le réseau social Facebook, pa risque une peine d’un an de prison assortie de 15.000 euros d’amende.

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