Le Niger veut une intervention militaire internationale dans le sud de la Libye

La chute du colonel Kadhafi a dû réjouir les autorités nigériennes, dans la mesure où l’ex-homme fort de Tripoli avait soutenu, dit-on, les rébellions touareg de 1991-1995 et de 2007-2009. Avant la révolution libyenne, il était intervenu pour obtenir un cessez-le-feu entre Niamey et les rebelles, lesquels réclamaient leur part sur l’exploitation d’uranium dans le nord du pays.

En septembre 2011, le patron du bi-hebdomadaire L’Evènement, Aksar Moussa, avait estimé que Kadhafi avait « toujours utilisé les Touareg pour déstabiliser ses voisins ». Sauf que, désormais, la menace pour Niamey vient des groupes jihadistes qui ont trouvé refuge dans le sud de la Libye, en profitant des difficultés des nouvelles institutions libyennes à imposer leur autorité.

Sur les ondes de Radio France Internationale, le ministre nigérien de l’Intérieur, Massoudou Hassoumi, a affirmé, ce 5 février,  que son pays souhaite « une intervention des puissances étrangères dans le sud de la Libye, qui constitue un incubateur des groupes terroristes ».

« Les puissances qui sont intervenues en Libye pour renverser le colonel Kadhafi, à la suite de quoi la Libye est devenue aujourd’hui le principal sanctuaire terroriste, doivent faire le service après-vente », a-t-il affirmé, ajoutant qu’il « est tout à fait légitime que la France, les Etats-Unis interviennent pour éradiquer la menace terroriste dans le sud de la Libye ».

Lors de son audition devant un comité du Congrès, la semaine passée, le directeur national du renseignement américain, James Clapper, avait indiqué que les pays sahéliens, en particulier le Tchad, la Mauritanie et le Niger, risquaient des représailles de la part des groupes jihadistes implantés dans la région en raison du soutien à l’opération française Serval, lancée au Mali le 13 janvier 2013. Et d’estimer que l’Afrique sud-saharienne « était devenue un incubateur pour les groupes qui lancent des attaques de plus en plus meurtrières dans la région ».

Or, pour M. Hassoumi, le patron du renseignement américain aurait « dû de manière plus précise dire que le sud libyen est un incubateur de groupes terroristes ». « Je pense que la prise de conscience de la menace que constitue le sud libyen est aujourd’hui assez forte, et une intervention entre dans l’ordre du possible », a-t-il encore insisté.

Plus que le Mali, le Niger est directement concerné par cette menace jihadiste étant donné qu’il partage une frontière commune avec la Libye (appelée « morsure de serpent »). Par ailleurs, le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a, à plusieurs reprises lors de sa tournée africaine en début d’année, brièvement parlé de la situation dans le sud libyen.

L’idée d’une telle intervention a été évoquée par l’amiral Edouard Guillaud, le chef d’état-major des armées (CEMA), qui doit prochainement quitter ses fonctions. « L’idéal serait de pouvoir monter une opération internationale avec l’accord des autorités libyennes », a-t-il affirmé, le 27 janvier dernier, en parlant, au sujet du sud libyen, de « trou noir » susceptible de devenir le « nouveau centre de gravité du terrorisme ».

Quoi qu’il en soit, il reste à voir si l’opinion de Massoudou Hassoumi est partagée par le gouvernement auquel il fait partie. Le ministre nigérien des Affaires étrangères, Mohamed Bazoum, a évoqué ce dossier avec Laurent Fabius, son homologue français, lors d’une visite à Paris le 4 février. Selon le bref communiqué du Quai d’Orsay, cet entretien « a permis de faire le point sur les principaux enjeux régionaux, et notamment sur la situation dans les pays du Sahel et en Libye’ et « confirmé la proximité de nos approches et la confiance qui prévaut dans nos relations bilatérales ».

Pour rappel, la France dispose de facilités militaires à Niamey, où sont notamment basés les drones MALE (Moyenne Altitude Longue Endurance) de l’escadron 1/33 Belfort. En outre, le groupe Areva y exploite des mines d’uranium. A plusieurs reprises, au cours de ces dernières années, des intérêts et des ressortissants français ont été visés par des groupes terroristes.

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