La base aérienne de Bordeaux-Mérignac rend un hommage à la mémoire du capitaine Croci

Comme tous les ans, la base aérienne 106 de Bordeaux-Mérignac rend hommage à celui qui est son parrain depuis mai 1995, à savoir le capitaine Michel Croci, mort aux commandes de son Jaguar le 25 janvier 1984, au cours de l’opération Manta, au Tchad. Cette année sera donc particulière étant donné que cet épisode tragique a eu lieu il y a exactement 30 ans.

Né le 26 juillet 1944, le capitaine Michel Croci était un pilote de chasse estimé par ses pairs, de part ses qualités professionnelles et humaines. Engagé en 1965 dans l’armée de l’Air après avoir obtenu son baccalauréat et effectué son service militaire à l’EAA n°603 de Limoges, il entame sa carrière dans le personnel navigant en tant que sous-officier, d’abord en passant par le GE 315 de Cognac, puis le GE 314 de Tours (Ecole de chasse), où il évolua à bord du Lockheed T-33 et du Mystère IV.

A l’issue de sa formation, il est affecté, en 1968, à la la 1ère escadrille de l’Escadron de chasse 3/11 Corse ( alors équipé de North Americain F-100 Super Sabre). De 1970 à 1973, le jeune pilote devient moniteur de pilotage à la base aérienne 709 de Cognac, avant de retrouver la 11e Escadre. Pendant cette période, il passe officier. En 1976, il est muté à l’EC 4/11 Jura, alors basé Djibouti, avant d’être relevé par les Mirage III de l’EC 3/10 Vexin et de se réinstaller sur la BA 106 de Bordeaux-Mérignac avec un nouvel appareil, à savoir le Jaguar.

Commandant l’escadrille SPA 158, le capitaine Croci devient chef des opérations du 4/11. La vie de l’escadron est rythmée par plusieurs détachements en Afrique, dont l’opération Manta.

Cette dernière fut lancée le 10 août 1983, suite à une demande d’assistance militaire adressée à la France par Hissène Habré, président du Tchad à l’époque, alors menacé par les forces coalisées du GUNT (Gouvernement d’Union nationale de transition) emmenées par son prédécesseur, Goukouni Oueddei. Ce dernier s’était allié avec le colonel Kadhafi et bénéificait ainsi de l’appui de l’armée libyenne.

Très vite, les effectifs militaires français engagés au Tchad montèrent jusqu’à 3.000 hommes, soutenus par une vingtaine d’hélicoptères et une trentaine d’appareils de l’armée de l’air (Jaguar, Mirage F1) et de l’aéronautique navale (Bréguet Atlantic). Ce déploiement eut pour conséquence de figer les positions, le GUNT et les forces libyennes étant bloquées à hauteur du 16e parallèle.

Le 24 janvier 1984, les troupes du GUNT passèrent à l’offensive et attaquèrent le poste de Ziguey, près de la frontière nigérienne. Le lendemain, la colonne des assaillants, constituée de véhicules Toyota, de camions et de moyens anti-aériens ZSU 23-2 amorça un mouvement de repli vers le nord, après avoir massacré des soldats tchadiens des FANT (Forces armées nationales tchadiennes) et pris en otage deux travailleurs humanitaires de Médecins sans frontière (MSF).

L’enchaînement des évènements qui suivirent est compliquée à établir, la littérature officielle étant peu claire… Cependant, en 1985, un certain colonel « Spartacus » (pseudonyme d’un officier très bien informé, ndlr), publia un livre (Opération Manta, Plon) qui fit du bruit dans le milieu militaire et dans lequel il revint sur les circonstances de la mort du capitaine Croci.

Ainsi, selon la relation faite par ce colonel Spartacus, la colonne hostile fut repérée près de Torodum (16e parallèle) par 2 avions Jaguar escortés par 2 Mirage F1 de l’armée de l’Air. Plus tard, 3 autres Jaguar photographièrent le dispositif du GUNT ainsi qu’un véhicule appartenant à MSF, celui des otages, puis quelques heures après, un autre patrouille Jaguar/Mirage F1 fut la cible de tirs de missiles SA-7.

Dans l’après-midi, un nouvelle patrouille mixte Jaguar/Mirage F1, commandée par le capitaine Michel Croci, de l’EC 4/11 Jura, arriva sur zone, avec vraisemblablement un « Bingo Vert » (autorisation de tir).

Seulement, il n’était alors pas question de toucher les humanitaires pris en otage. Les Jaguar enchaînèrent donc les passes au-dessus de la colonne et ce qui devait arriver arriva : l’avion du capitaine Croci fut abattu. Ce dernier, bien que s’étant éjecté de son appareil, y perdit la vie.

« Officier aux qualités professionnelles, humaines et militaires exceptionnelles, pilote de chasse de très grande valeur. Chef de patrouille particulièrement expérimenté totalisant 3.860 heures de vol dont 1.100 heures sur Jaguar Sa personnalité, sa foi très profonde en la mission, son rayonnement et son dynamisme lui avaient permis de s’imposer très rapidement comme chef des opérations de l’Escadron. Chef de détachement, dans le cadre de l’opération MANTA, a fait le sacrifice suprême dans l’accomplissement de son devoir au cours d’une mission opérationnelle de reconnaissance au-dessus d’éléments hostiles le 25 janvier 1984, à Torodum « , indique la citation à l’ordre de l’armée aérienne, qui lui fut décernée à titre posthume par Charles Hernu, le ministre de la Défense d’alors.

Photo : Le capitaine Croci

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