Ancien chef du Pentatogne, Robert Gates éreinte l’administration Obama

En juin 2010, le général Stanley McChrystal, alors commandant la Force internationale d’assistance à la sécurité (ISAF), déployée en Afghanistan sous l’autorité de l’Otan, avait défrayé la chronique après avoir tenu des propos peu amènes à l’égard de l’administration Obama. Ce qui lui valut, d’ailleurs, une retraite anticipée et son remplacement par le général David Petraeus, l’homme qui avait réussi quelques mois plus tôt à rétablir une situation alors compliquée en Irak.

A l’époque, le général McChrystal avait soumis une nouvelle stratégie à appliquer en Afghanistan. Après de longues semaines de tergiversations, elle avait fini par être adoptée par la Maison Blanche, du moins en grande partie, à l’issue d’un débat acharné au sein de l’administration américaine.

D’un côté, l’on trouvait ceux qui soutenaient l’envoi de renforts massifs en Afghanistan, conformément à ce que préconisait le général McChrystal. De l’autre, il y avait ceux, dont le vice-président Joe Biden, qui estimaient qu’il valait mieux se concentrer sur les opérations anti-terroristes, avec le recours aux forces spéciales et aux drones.

Seulement, quand on décide d’une stratégie, le minimum est d’y croire et de la soutenir. Chose que le président Obama n’a pas fait, si l’on en croit Robert Gates, qui  a été son secrétaire à la Défense jusqu’en 2011 après avoir été celui de George W. Bush. S’il en fallait une preuve, annoncer l’envoi de 30.000 hommes supplémentaires en Afghainstan tout en fixant immédiatement une date de retrait, comme l’a fait l’actuel locataire de la Maison Blanche, en décembre 2009, en est une…

Ancien directeur de la CIA et proche du Parti républicain au moins jusqu’en 2008, Robert Gates n’a ainsi pas ménagé ses critiques à l’égard de l’administration Obama, qu’il a pourtant servie, dans son livre intitulé « Devoir, mémoires d’un secrétaire à la Défense », et dont des extraits ont été publiés par la presse américaine.

« Je n’ai jamais douté du soutien du président Obama pour les troupes, mais de son soutien à leur mission », écrit-il. Et de raconter une réunion, en mars 2011, au cours de laquelle le chef de la Maison-Blanche donna des signes montrant qu’il ne semblait plus croire à la stratégie décidée 18 mois plus tôt et qu’il doutait des capacités du général Petraeus…

« J’étais assis là, je me suis dit : le président ne fait pas confiance à son commandant (militaire), ne peut pas supporter (le président afghan Hamid) Karzaï, ne croit pas en sa propre stratégie et ne considère pas cette guerre comme la sienne. Pour lui, il s’agit juste de se retirer », a rapporté Robert Gates dans son livre. « Il était sceptique sinon totalement convaincu que (sa stratégie) allait échouer », a-t-il ajouté.

Cela étant, l’ancien patron du Pentagone admet que le président Obama a su prendre des risques quand il le fallait, en particulier quand il s’est agi de lancer le raid des Navy Seals à Abbottabad, contre Oussama Ben Laden, le chef d’al-Qaïda, alors que lui-même avait déconseillé une telle opération. « C’est l’une des décisions les plus courageuses que j’aie jamais pu voir à la Maison Blanche », a-t-il reconnu, lui a qui a servi 8 présidents dans ses diverses fonctions.

Face à ces critiques, la Maison Blanche n’a pas manqué de réagir. « Il est de notoriété publique que le président a toujours été déterminé à mener à bien la mission visant à démanteler Al-Qaïda tout en s’assurant que nous ayons un programme clair, qui s’achèvera cette année, pour mettre progressivement fin à la guerre (en Afghanistan, ndlr) », a ainsi fait valoir Caitlin Hayden, porte-parole du Conseil à la sécurité nationale (NSC) de la présidence américaine.

Mais plus globalement, Robert Gates pointe un climat de défiance entre la Maison Blanche et le commandement militaire et fait part de son exaspération face à la gestion des affaires de défense par l’administration Obama et sa tendance au micromanagement et à s’immiscer dans les opérations.

« Bien trop tôt sous cette administration, la suspicion et la méfiance à l’égard des généraux par les responsables de la Maison Blanche, y compris le président et le vice-président, sont devenus un gros problème », a expliqué Robert Gates, lequel en fait porter une large part de responsabilité à Joe Biden, qu’il ne ménage pas dans ses écrits.

« Il s’est trompé sur quasiment toute décision majeure de politique étrangère et de sécurité nationale ces quatre dernières décennies », estime-t-il à son sujet, tout en reconnaissant toutefois son intégrité.

Ce à quoi la Maison-Blanche a rétorqué que « de son rôle dans les Balkans lorsqu’il était au Sénat à ses efforts pour mettre fin à la guerre en Irak, Joe Biden a été l’un des hommes d’Etat majeurs de son époque et a contribué à faire progresser le leadership américain dans le monde ».

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