L’opération Sangaris est peu soutenue par l’opinion publique

Quand des militaires français interviennent sur un théâtre extérieur, il est important que leur mission soit soutenue par l’opinion publique, surtout dans le cadre d’une armée professionnelle. Or, pour ce qui concerne l’opération Sangaris, lancée le 5 décembre dernier par le président Hollande pour sécuriser la Centrafrique, deux enquêtes d’opinion qui viennent d’être publiées présentent des résultats contradictoires, si ce n’est mitigés.

Premier sondage, celui réalisé par l’institut OpinionWay dans le cadre du baromètre Clai-Metronews-LCI. Selon cette enquête, 64% des personnes interrogées se disent opposées à l’opération Sangaris, dont 31 % « tout à fait opposés ».

« Il y a certainement un effet de répétition dans l’opinion. Après le Mali, il y a eu l’épisode syrien, où François Hollande parlait d’une intervention imminente, et maintenant la Centrafrique. Les Français ont un peu l’impression que l’on passe son temps à faire le gendarme du monde, à un moment où la situation intérieure se dégrade », a commenté Bruno Jeanbart, d’OpinionWay.

Seulement, ce sondage a été réalisé avant le lancement officiel de l’opération Sangaris, à savoir entre les 2 et 4 décembre. Car pour l’IFOP, qui a interrogé 950 personnes deux jours plus tard, le rejet de cette intervention est nettement moins massif. Entre temps, il y a eu les accrochages meutriers à Bangui (on parle maintenant de près de 400 tués) et la presse a diffusé de nombreux reportages sur la Centrafrique.

Ainsi, pour l’IFOP, donc, 51% des personnes questionnées approuvent l’opération Sangaris, alors que l’intervention au Mali avait recueilli plus de 60% d’opinions favorables, selon le même institut.

Et Jérôme Fouquet, le directeur du Département opinion publique de ce dernier d’expliquer : « Le contexte de crise économique engendre dans l’esprit d’une partie de population que ce n’est pas une priorité que de dépenser d’importantes sommes d’argent et le sang de nos soldats quand la situation économique dans notre pays est aussi problématique pour les Français ».

En somme, si les deux instituts de sondage donnent des résultats contradictoires, ils partagent les mêmes conclusions pour expliquer le rejet pour l’un et le soutien timoré pour l’autre, de cette nouvelle intervention militaire en Afrique. Et l’on pourrait aussi ajouter la communication officielle pour le moins poussive lors du lancement de cette opération, malgré les efforts de l’Etat-major des armées sur les réseaux sociaux.

Cela étant, parmi la classe politique, Bruno Le Maire, député UMP et ancien ministre de l’Agriculture, a fait part de ses doutes au sujet de cette opération en Centrafrique. Et il est probable qu’ils soient partagés chez ceux qui ne la soutiennent pas.

« Je veux dire mes fortes réserves sur modalités de cette intervention en Centrafrique », a-t-il affirmé ce 9 décembre, à l’antenne de France 2, après avoir rappelé qu’il avait approuvé l’intervention au Mali « que nos armées vont là-bas pour lutter contre le terrorisme islamiste radical ».

Pour la Centrafrique, l’ancien ministre ne voit « l’intérêt stratégique de la France » dans l’opération Sangaris, qui estime par ailleurs que le devoir de cette dernière est « de défendre les intérêts de la nation française ».

« Pourquoi est-ce que ce n’est pas une opération de maintien de la paix ? Pourquoi est-ce que nos partenaires ne sont pas avec nous? », s’est interrogé le député de l’Eure, pour qui la « la responsabilité de la France » était « de construire une coalition » avant d’intervenir en Centrafrique. « Est-ce qu’on croit sérieusement qu’avec 1 600 hommes qui vont intervenir dans un Etat plus grand que la France, nous allons pouvoir rétablir l’Etat de droit « , a-t-il aussi estimé.

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