Le général Paul Aussaresses est mort

Protagoniste de la bataille d’Alger à la réputation sulfureuse, le général Paul Aussaresses, ancien des services spéciaux, vient de s’éteindre à l’âge de 95 ans. L’on peut s’avancer, sans se tromper, que peu d’autorités (voire pas du toute) seront présentes à ses obsèques, qui auront lieu le 10 décembre prochain, à La Vancelle (Bas-Rhin).

Et pour cause! Avec une pointe d’ironie, l’on pourrait dire que le général Aussaresses représente ce que le pouvoir politique n’assume pas. En 2001, il s’était fait connaître du grand public avec son livre, « Services spéciaux, Algérie 1955-1957 », dans lequel il reconnaissait l’usage de la torture lors de la bataille d’Alger, sans exprimer le moindre remord.

Encore récemment, interrogé, en avril 2012 par le quotidien L’Alsace, le général Aussaresses avait déclaré que l’usage de la torture en Algérie avait été « nécessaire quand nous l’avait fait, et utile… ». Et d’ajouter : « Si c’était à refaire, je referais ce chemin. Je ne serais pas content, mais je le referais… C’était pour la France. C’est le devoir d’un soldat. J’assume. C’était une vraie guerre ».

Suite à la publication de son livre et sa condamnation pour « complicité d’apologie de crimes de guerre », le général Aussaresses avait été « exclu de la Légion d’Honneur et, partant, définitivement privé du traitement attaché à la qualité de commandeur de celle-ci ainsi que du droit de porter les insignes de toute décoration française ou étrangère ressortissant à la grande chancellerie » par un décret présidentiel du 14 juin 2005. Une décision qu’il trouvait injuste.  » J’aurais pu dire : ‘Mais ce que j’ai fait, je l’ai fait sur ordre!’ Mais ce serait lâche de le dire, je ne le dis pas, hein? J’ai agi parce que c’était mon devoir », avait-il expliqué au quotidien alsacien.

Cela étant, les affaires judiciaires liées à l’édition du livre du général Aussaresses n’en restèrent pas là puisque la Cour européenne des droits de l’homme, saisie par ses éditeurs, également condamnés, estima que la France avait violé l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme au sujet du droit à la liberté d’expression. Quant aux autres plaintes ayant visé l’ancien officier, elles furent rejetées étant donné que les faits ayant été commis lors de la guerre d’Algérie avait été amnistiés.

Mais la carrière militaire du général Aussaresses ne se limite pas aux évènements en Algérie. Elève officier à l’Ecole spéciale de Saint-Cyr au début de la Seconde Guerre Mondiale, il devient agent de la France Libre dès la fin 1942. Il se porte alors volontaire pour intégrer les commandos Jedburgh, les « forces spéciales » de l’époque.

Il sera ainsi notamment parachuté en août 1944 dans l’Ariège, dans le cadre de l’opération Chrysler et ira même à sauter derrière les lignes allemandes, en 1945, avec en portant un uniforme de la Wehrmacht, pour aller libérer des camps de prisonniers. Après la guerre, il prend part à la formation, sous la direction du colonel Jacques Morlane, au 11e Choc, le bras armé du Service Action du SDECE, avant de partir en Indochine, où, ironie de l’histoire, il sert sous les ordres de il sert sous les ordres du général Pâris de Bollardière, farouchement opposé à la torture, puis en Algérie.

Par la suite, l’officier enseignera les techniques de contre-insurrection à Fort Bragg, aux Etats-Unis. Promu colonel, il est affecté à la section française de l’état-major international de l’Otan avant d’être nommé attaché militaire au Brésil, en 1973, à l’époque de la dictature militaire. Plus tard, il se reconvertira dans la vente d’armes, pour le compte du groupe Thomson. En 2008, le général Aussaresses fera d’autres révélations, notamment une au sujet du versement d’une commission importante par le GIAT (entreprise publique), dans les années 1970, à un certain Klaus Barbie, ancien chef de la Gestapo à Lyon. Et cela, dans le cadre d’une vente d’armes à la Bolivie…

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