Les forces spéciales ne constitueront pas une « quatrième armée »

Pour réduire significativement le budget de la Défense, la tentation serait grande, chez certains, de ne compter que sur les forces spéciales et la dissuasion nucléaire. En tout cas, ce modèle aurait été conforté par le fameux scénario « Z », lequel prévoyait de ne consacrer seulement que 1,1% du PIB aux forces armées d’ici 2025.

Qui plus est, les forces spéciales sont à la mode. Et cela en raison de leurs succès, que ce soit outre-Atlantique, avec le raid réussi des Navy Seals contre Ben Laden au Pakistan ou en France, avec les opérations au Mali. Seulement, si elles sont capables de réaliser des actions « coup de poing », elles ont en revanche besoin de l’appui des troupes classiques, ne serait-ce, déjà, pour assurer leur recrutement.

Etait-il besoin, pour autant, de préciser que les forces spéciales ne pourraient en aucun former une « quatrième armée »? Les députés du groupe socialiste qui ont déposé un amendement allant dans ce sens lors de l’examen du projet de Loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019 ont cru bon de le faire. Et visiblement ils ont eu raison puisque leur texte a été adopté.

Ainsi, l’amendement n°42 stipule que les forces spéciales sont « complémentaires des forces conventionnelles ». Sans doute le terme « classique » aurait été plus approprié. Passons.

Dans l’exposé sommaire, il est précisé qu’il s’agit d’affirmer que « les forces spéciales et conventionnelles vont de pair et ne peuvent se substituer les unes aux autres ». Et d’ajouter : « les forces spéciales ne constituent pas une quatrième armée, mais sont les corps d’élite issus de l’Armée de Terre, de l’Armée de l’Air et de la Marine nationale disposant d’une chaîne de commandement spécifique ».

Cet amendement, défendu par le député Philippe Nauche (qui, au passage, a oublié de faire une référence aux unités de l’armée de l’Air lors de son intervention), a ainsi eu les faveurs du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian. « Bien évidemment, il n’y aura pas une quatrième armée faite des forces spéciales », a-t-il affirmé. « Cela dit, il faut que les choses soient très claires entre nous, qu’il n’y ait pas d’ambiguïté », a-t-il ajouté.

Cela étant, cet amendement a permis au ministre d’évoquer les forces spéciales, qui ont « dans le nouveau modèle d’armée une place particulière ». En effet, leurs effectifs augmenteront de 1.000 personnels, comme ceux affectés à la cyberdéfense, et les « moyens et l’interarmisation du Commandement des opérations spéciales seront donc accrus, comme sa capacité à se coordonner avec les services de renseignement ».

Par ailleurs, le ministre a indiqué que les « forces spéciales bénéficieront de critères de recrutement spécifiques », qu’il n’a toutefois pas détaillés. « Nous avons choisi d’augmenter les effectifs car nous avons pu constater les limites actuelles, alors que leur capacité à entrer en premier a été avérée dans les différentes opérations récentes », a-t-il poursuivi.

Enfin, M. Le Drian s’est attardé sur les matériels qui doteront les forces spéciales. « Le présent projet de loi de programmation prévoit-il à leur bénéfice des programmes classés majeurs », a-t-il dit, en citant les moyens de transmission sécurisés Melchior, des véhicules terrestres spéciaux, des avions C-130 Hercules rénovés ainsi que des hélicoptères Tigre et Cougar rénovés.

« Un effort très significatif est donc fait en direction des forces spéciales parce qu’elles sont tout à fait indispensables et qu’elles entrent dans le nouveau modèle d’armée qui a été esquissé dans le Livre blanc et appliqué concrètement dans le projet de loi de programmation militaire », a encore insisté le ministre. « Il peut y avoir des arrière-pensées, compréhensibles, mais les choix sont faits (…) et ils doivent s’appliquer. La place des forces spéciales doit être significativement renforcée à tous égards », a-t-il conclu.

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