Le Teorem de Thales n’a pas la cote auprès du gouvernement

Plus un jour ne se passe sans que n’éclate une nouvelle polémique au sujet du renseignement américain et la NSA. La dernière en date, révélée par le magazine allemand Der Spiegel, qui fait mine de découvrir l’eau chaude à chaque fois, concerne l’Asie, où les Etats-Unis auraient utilisé des emprises diplomatiques australiennes pour mener des opérations d’espionnage. La Chine, qui n’a pas vraiment de leçons à donner en la matière, a fait part de ses « préoccupations » et l’Indonésie proteste vivement.

Quoi qu’il en soit, si l’on veut protéger ses secrets des regards indiscrets (qu’ils soient américains, russes, ou chinois), il faut prendre ses précautions. En 2009, la Direction générale de l’armement (DGA) a confié, à cette fin, le soin à Thales de produire un téléphone mobile ultra-sécurisé, compatible 2G, 3G, RTC, RNIS et VoIP, pour en doter les services gouvernementaux, à l’instar du Sectera Edge de General Dynamics aux Etats-Unis.

La mise au point du TEOREM (Téléphone cryptographique pour réseau étatique et militaire) a demandé 2 ans de travail et mobilisé une centaine d’ingénieurs. En 2011, les premiers exemplaires ont été livrés aux différents ministères. Au total, 14.000 ont été commandés par la DGA, dont 7.000 pour la Défense.

Seulement, avec son clapet, le TEOREM est loin d’être aussi convivial et d’avoir les mêmes fonctions qu’un smartphone disponible sur le marché. Long au démarrage (30 secondes dit-on…), il est nécessaire de saisir un code confidentiel avant de l’utiliser.

Suite aux révélations sur l’espionnage de la NSA, les services du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, ont demandé aux autres membres du gouvernement d’abandonner leurs smartphones et leurs tablettes pour leurs communications sensibles au profit de terminaux sécurisés, et donc, du TEOREM.

Seulement, d’après la dernière livraison du Canard Enchaîné, il n’y aurait que le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, qui l’utiliserait. A Bercy, écrit l’hebdomadaire, un responsable avoue que le téléphone de Thales est « trop compliqué ». « On ne sait pas le faire marcher », a-t-il confessé.

Au ministère de l’Intérieur, l’on préfére les téléphones Samsung cryptés, dont l’on peut bien se douter qu’ils n’ont pas le niveau requis pour les communications relevant du secret défense. De toute façon, même à l’Elysée, l’on semble préférer l’iPhone d’Apple au terminal de Thales…

Enfin, le Canard Enchaîné ne s’est pas intéressé au cas de Laurent Fabius, le ministre des Affaires étrangères. Car, a priori, il utilise bel et bien le TEOREM puisque l’appareil a été photographié pour illustrer un reportage publié par le magazine Challenges… avec un numéro de téléphone affiché sur son écran, comme l’a remarqué Zataz.com.

Maldonne : pour éviter toute intrusion dans le système, il est prévu de bannir du réseau tous les numéros de téléphone éventuellement « corrompus », c’est à dire perdus ou volés. Espérons que celui affiché à l’écran du Teorem du ministre l’ait été avant la sortie de l’hebdomadaire…

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