Le niveau insuffisant de l’activité aérienne préoccupe le chef d’état-major de l’armée de l’Air

Il y a deux façons d’aborder une situation difficile : la subir ou prendre son destin en main pour chercher à en sortir, en faisant de chaque problème une opportunité pour améliorer les choses. Le général Denis Mercier, le chef d’état-major de l’armée de l’Air, s’inscrit dans la seconde approche, laquelle est d’ailleurs au coeur de son projet « Unis pour faire face ».

Depuis 2008, l’armée de l’Air a perdu 25% de ses effectifs et fermé une douzaine de bases aériennes. Et ce n’est pas fini avec les 23.500 suppressions de postes prévus par le projet de Loi de programmation militaire (LPM) pour la période 2014-2019. Pour autant, le général Mercier voit dans les prochaines restructurations annoncées une opportunité.

« En densifiant certains de nos emprises, nous offrirons à notre personnel de meilleures conditions de vie et de travail grâce à une meilleure concentration des budgets d’infrastructure », a-t-il fait valoir lors d’une audition devant la commission sénatoriale des Affaires étrangères et des Forces armées. « Certains rapprochements permettront aussi de mieux fonctionner, pour une armée de l’air resserrée mais dont la réussite opérationnelle est conditionnée par son aptitude à engager toutes ses capacités dans une manoeuvre d’ensemble », a-t-il ajouté.

Pour le CEMAA, l’essentiel n’est pas le format de l’armée de l’Air (celui l’aviation de chasse a été réduit deux fois d’un tiers en deux restructurations) mais le maintien de la cohérence entre ses capacités opérationnelles, laquelle est garantie, selon lui, par la prochaine LPM, qui prévoit de moderniser « les capacités socles sans en privilégier une par rapport à une autre », même si cette « modernisation se fera à un rythme moins rapide » qu’initialement souhaité.

Le fait est, au cours des 5 prochaines années, même si elle mettra en service des équipements nouveaux (missile Meteor, drones Reaper, etc… ), l’armée de l’Air ne devrait recevoir qu’une partie des 26 Rafale qui seront livrés, 15 A400M Atlas (ce qui demandera de prolonger 14 Transall C-160) et de seulement 2 avions ravitailleurs MRTT sur les 12 prévus. Sur ce point, le général Mercier a d’ailleurs recommandé que la priorité soit donnée au renouvellement des C-135 en cas d' »embellie budgétaire dans les années à venir ».

Cela étant, une question préoccupe plus particulièrement le général Mercier : celle du niveau de l’activité aérienne de l’armée de l’Air. C’est une évidence, pour faire voler un avion ou un hélicoptère, il faut qu’il soit en état. Or, il apparaît que les moyens alloués à l’Entretien programmé du matériel (EPM) ont été insuffisants durant la période 2009-2014. Selon le CEMAA, le déficit serait de plus d’un milliard d’euros par rapport aux besoins.

Conséquence : « En 2013, l’armée de l’air a dû limiter l’activité des équipages et prendre des mesures affectant le niveau de formation et d’entraînement telles que l’annulation de notre participation à des exercices majeurs, comme Red Flag aux Etats-Unis par exemple et à retirer de façon anticipée des équipages des unités de combat », a affirmé le général Mercier.

Et cela ne va pas s’arranger dans un proche avenir. « Les perspectives 2014-2015 conduisent à maintenir le niveau d’activité de 2013, grâce à l’effort financier important consenti sur l’EPM par la LPM, mais cette activité restera insuffisante (environ 20% par rapport aux normes d’entraînement) », a expliqué le CEMAA. « Elle ne pourrait être maintenue à ce niveau dans le temps sans dégradation considérable du niveau opérationnel. C’est pour moi une préoccupation majeure car le maintien de certaines compétences est dès à présent fragilisé », a-t-il assuré.

Pour tenter d’y remédier, le général Mercier compte sur la mise en place de l’entraînement différencié (avec le plan Cognac 2016, lequel, « structurant pour l’armée de l’Air », prévoit, a priori, l’acquisition d’avions Pilatus) et d’un plan d’optimisation du Maintien en condition opérationelle (MCO), « élaboré par la SIMMAD (Structure Intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense) en associant la DGA (Direction générale de l’armement) ». Le CEMAA espère que cela permettra de faire « remonter l’activité aérienne au niveau requis après 2016 ».

Quoi qu’il en soit, les marges de manoeuvres sont des plus réduites. La prochaine LPM sera la « dernière marche pour que notre aviation de chasse reste encore une capacité de combat majeure capable d’être engagée sur tous les théâtres d’opérations extérieures et sur le territoire national », a ainsi estimé le général Mercier.

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