Le président Obama s’en remet au Congrès avant une éventuelle intervention militaire en Syrie

Un pas en avant, un pas en arrière. Décidément, le président Obama danse le tango sur le dossier syrien. Le 30 août, le chef de la diplomatie américaine, John Kerry, s’était montré particulièrement déterminé à « punir » le régime de Bachar el-Assad, tenu pour responsable – preuves à l’appui – de l’attaque chimiques effectuée quelques jours plus tôt dans les faubourgs de Damas.

Une détermination d’ailleurs confirmée le même jour par un communiqué diffusé par la présidence française, à l’issue d’un entretien téléphonique entre les présidents Hollande et Obama. Les inspecteurs des Nations unies envoyés sur place pour enquêter sur cette attaque chimique ayant quitté la Syrie le lendemain, l’on s’attendait au lancement imminent de cette opération « punitive ».

Le régime de Damas se tenait prêt, son Premier ministre, Waël al-Halqi, ayant même affirmé que l’armée syrienne avait « le doigt sur la gâchette » et qu’elle se tenait « prête à faire face à tous les défis et les scénarios. »

Du côté de la Russie, alliée indéfectible de la Syrie, le président Poutine a qualifié « d’absurdité totale » les accusations portées contre le régime de Bachar el-Assad. Quant aux preuves des services de renseignement américains, il a demandé à ce qu’elles soient produites devant le Conseil de sécurité et les inspecteurs des Nations, en soulignant que « l’interception de conversations quelconques ne pouvait pas servir de base pour la prise de décisions fondamentales, notamment le recours à la force contre un Etat souverain. »

Seulement, ce qui semblait imminent il y a 24 heures ne l’est plus. Le président Obama, s’il reste convaicu de la nécessité d’une intervention militaire « limitée en durée et en portée » contre Damas, a décidé de consulter le Congrès.

« Nous sommes déterminés à frapper quand nous le choisirons », a-t-il ainsi déclaré, le 31 août. « J’ai décidé que les Etats-Unis devraient agir militairement contre des cibles du régime syrien. Ce sera demain, la semaine prochaine ou dans un mois », a-t-il insisté. Mais, a-t-il ajouté, « j »ai discuté avec l’ensemble des leaders du congrès et il y aura un vote lors prochaine session ». Et d’expliquer : « J’ai possibilité de mener cette action militaire sans autorisation. Mais nous devons avoir ce débat, car le problème est trop important pour faire sans. »

Comme le Congrès reprendra ses travaux le 9 septembre prochain, aucune action militaire américaine ne pourra donc avoir lieu d’ici cette date. Dans le texte de la résolution envoyée aux parlementaires après les déclarations de Barack Obama, il y est écrit que « le président est autorisé à utiliser les forces armées des Etats-Unis comme il l’estime nécessaire et approprié en relation avec l’utilisation d’armes chimiques ou d’autres armes de destruction massive dans le conflit en Syrie. »

Et la résolution fixe deux objectifs à l’opération militaire envisagée en Syrie : « empêcher ou dissuader l’usage ou la prolifération (y compris le transfert à des groupes terroristes ou d’autres acteurs étatiques ou non-étatiques), à l’intérieur, vers ou depuis la Syrie de toute arme de destruction massive, y compris chimiques ou biologiques » et « protéger les Etats-Unis et ses alliés et partenaires contre la menace que constituent ces armes. »

Ainsi, avec une Chambre des représentants tenue par le Parti républicain, le président (démocrate) Obama prend le risque de se voir opposer un refus à cette intervention militaire, à l’instar du Premier ministre britannique, David Cameron, lequel a subi un camouflet de la part des élus de la Chambre des communes, cette semaine, alors que le Royaume-Uni venait de déposer un projet de résolution devant le Conseil de sécurité des Nations unis autorisant le recours à la force contre le régime syrien. En d’autres temps, un dirigeant de la trempe de Churchill aurait certainement démissionné après un tel désaveu. Passons.

En France, le président Hollande n’est pas dans l’obligation de consulter le Parlement avant de lancer une opération militaire, mais de l’en informer dans un délai de 3 jours après qu’elle a commencé. Un débat concernant la situation syrienne aura lieu le 4 septembre mais il ne devrait être suivi d’aucun vote. Cependant, de plus en plus de voix demandent à ce que les parlementaires puissent se prononcer sur ce sujet.

C’est ce qu’a exigé Jean-Louis Borloo, le président de l’UDI. « Comme le Président des Etats-Unis, qui a décidé de consulter le Congrès américain au titre des principes démocratiques, le Président français doit faire de même et organiser après le débat, un vote formel au Parlement », a-t-il affirmé par voie de communiqué.

« Je pense que dans les circonstances actuelles la France ne peut pas partir en guerre sans le soutien clair du Parlement. J’ajoute que les socialistes n’ont eu de cesse à chaque intervention militaire que de réclamer ce vote. Cette hypocrisie devient insupportable », a surenchéri François Fillon, l’ancien Premier ministre.

Techniquement, il est possible qu’un tel vote puisse avoir lieu. En janvier 1991, le président Mitterrand avait eu recours à l’article 49-1 de la Constitution concernant le discours de politique générale.

A l’époque, et alors que les forces françaises se préparaient à participer à l’opératon Tempête du Désert en Irak, le Premier ministre d’alors, Michel Rocard, avait prononcé un discours de politique générale axé sur le Moyen Orient.

Une autre possibilité est d’utiliser l’article 50-1, lequel précise : « Devant l’une ou l’autre des assemblées, le Gouvernement peut, de sa propre initiative ou à la demande d’un groupe parlementaire au sens de l’article 51-1, faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat et peut, s’il le décide, faire l’objet d’un vote sans engager sa responsabilité. »

En outre, et d’après un sondage BVA pour I>Télé et Le Parisien, l’opinion publique française n’est pas favorable à une intervention militaire française. Ainsi, 64% des personnes interrogés s’y disent opposées (ndlr, une autre enquête, réalisée par CSA pour Atlantico indiquait récemment que 45% des sondés y étaient favorables… allez comprendre).

Quant à la question de savoir s’il fallait faire confiance au président Hollande pour mener une intervention militaire de la France en Syrie, ils ne sont que 40% à répondre par l’affirmative….

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