Syrie : L’intervention militaire suspendue aux conclusions des inspecteurs des Nations unies

Alors qu’une intervention militaire visant à « punir » le régime syrien pour avoir utilisé des armes chimiques lors d’une attaque ayant fait au moins 350 tués dans la banlieue de Damas, la semaine passée, paraissait imminente il y a encore peu, le président américain, Barack Obama, et le Premier ministre britannique, David Cameron, en pointe sur ce dossier, semblent faire un pas en arrière.

Comme prévu, la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies qui s’est tenue le 28 août n’a rien donné, la Chine et la Russie ayant réaffirmé leur opposition à toute intervention armée en Syrie. Du coup, le gouvernement britannique a annoncé qu’il n’y aurait pas d’action militaire tant que les conclusions de l’enquête menée actuellement sur place par les inspecteurs de l’ONU ne seront pas connues.

« Le secrétaire général de l’ONU doit pouvoir s’adresser au Conseil de sécurité immédiatement après la fin de la mission de l’équipe », indique ainsi une motion qui doit être présentée ce jour au Parlement britannnique. « Le Conseil de sécurité des Nations unies doit avoir l’opportunité d’avoir ce compte-rendu et tous les efforts doivent être faits pour obtenir une résolution du Conseil de sécurité soutenant une action militaire avant qu’une telle action ne soit prise », indique ce texte.

Le même jour, le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a précisé, lors d’une conférence de presse, qu’il fallait encore 4 jours aux inspecteurs pour mener à terme leurs investigations sur le terrain. « Ensuite, les experts devront effectuer des analyses scientifiques, puis nous devrons faire un rapport au Conseil de sécurité afin qu’il prenne les actions qu’il juge nécessaires », a-t-il ajouté.

A Washington, le président Obama a indiqué, lors d’un entretien diffusé à la télévision, qu’il n’avait encore pris aucune décision au sujet d’une intervention militaire en Syrie. Mais, dans le même temps, si cette dernière doit avoir lieu, il a précisé qu’elle serait limitée et qu’elle se résumerait à un « coup de semonce » au président Bachar el-Assad afin de le dissuader de faire usage d’armes chimiques.

Par ailleurs, le locataire de la Maison Blanche n’a pas avancé d’arguments humanitaires pour justifier cette éventuelle opération militaire. Selon lui, en effet, l’utilisation d’armes chimiques par le régime syrien « met en danger les alliés et les intérêts des Etats-Unis au Moyen Orient ». Sans doute que le président Obama pense que cette explication sera susceptible de convaincre son opinion publique ainsi que le Congrès, où l’opportunité d’une intervention en Syrie est loin de faire l’unanimité, tout comme d’ailleurs au Royaume-Uni, ou le Parti conservateur, dont est issu David Cameron, est divisé sur cette question.

En France, également en pointe dans ce dossier, le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, a seulement indiqué que le président Hollande prendra « le moment venu les décisions qui s’imposent. » Et, selon la porte-parole du gouvernement, Mme Najat Vallaud-Belkacem, il faut désormais « prendre du temps ».

« Attendre ça n’est pas reporter sine die une réaction de la communauté internationale. Prendre le temps de la réflexion, prendre le temps de la concertation avec les partenaires. Prendre le temps de recevoir les conclusions des experts de l’ONU, c’est préparer une réponse la plus appropriée possible », a-t-elle expliqué, ce 29 août, à l’antenne de France 2.

« On laissera aussi un peu de temps au processus diplomatique. Mais pas trop non plus. On ne peut pas rester sans agir face à l’utilisation d’armes chimiques », avait pourtant affirmé, au début de cette semaine, le chef de l’Etat.

Cela étant, plusieurs pays membres de l’Otan ont émis des réserves. C’est notamment le cas de la Pologne, qui, par le passé, fut très engagée aux côtés des Etats-Unis en Irak et en Afghanistan. « Une telle opération (ndlr, en Syrie) n’apporterait pas les effets escomptés », a fait valoir Donald Tusk, le Premier ministre polonais. « n’ai pas de conviction qu’une attaque armée puisse arrêter les crimes », a-t-il ajouté.

« Je ne suis pas encore convaincu. Ce que nous demandons, c’est que nous recevions des informations démontrant qui a utilisé ces armes (chimiques). Si la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont des informations à ce sujet, qu’ils les partagent avec leurs alliés au sein de l’Otan », a affirmé Didier Reynders, le chef de la diplomatie belge. « Ce que nous demandons (et nous sommes 37 Etats à le demander) au secrétaire général des Nations unies, c’est un rapport des experts de l’ONU sur l’utilisation des armes chimiques », a-t-il insisté.

Enfin, l’Italie se montre également très prudente. « Il n’y a pas de solution militaire au conflit syrien. La seule solution est une solution politique négociée », a affirmé Emma Bonino, ministre des Affaires européennes, en estimant même qu’une « option d’intervention limitée risque de devenir illimitée ».

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