Le Quai d’Orsay va davantage se serrer la ceinture

La diplomatie et la défense sont deux des facteurs qui déterminent la puissance d’un pays. Et l’un ne va généralement pas sans l’autre. En juillet 2010, et dans une tribune commune publiée par le quotidien Le Monde, deux anciens ministres des Affaires étrangères, Hubert Védrine et Alain Juppé, s’étaient dits inquets de « l’affaiblissement sans précédent (des) réseaux diplomatiques et culturels » de la France après fait le constat que le Quai d’Orsay avait perdu, en 20 ans, « plus de 20% de ses moyens financiers ainsi qu’en personnels », pour un budget représentant 1,2 à 1,3% des dépenses de l’Etat.

Manifestement, les gouvernements passent et la situation de la diplomatie française ne change pas. Ainsi, d’après Le Point, la direction du Budget de Bercy a constaté un dérapage de 4,4 millions d’euros concernant la masse salariale des Affaires étrangères.

Et donc d’exiger un retour à la normale dans les plus brefs délais, même si la somme en question paraît relativement modeste, surtout si on la compare aux 465 millions de dérapage de la masse salariale au ministère de la Défense. Faute de quoi, les indemnités de résidence dues aux agents expatriés pourrait subir un sérieux coup de rabot dès cette année.

Du côté du Quai d’Orsay, l’on explique qu’une partie de ce dérapage est due aux ratés du logiciel de paie Louvois étant donné qu’il concerne les coopérants militaires en poste dans les ambassades. Mais il n’y a pas que cette raison. Dans un référé diffusé en février dernier, la Cour des comptes relevait que « les charges de personnels » constituaient « le premier poste de dépenses du réseau diplomatique », avec « une hausse de 20% depuis 2007 » alors que les effectifs avaient diminué de 5% entre 2007 et 2011.

Quoi qu’il en soit, le ministère des Affaires étrangères s’est engagé à réaliser des économies sur sa masse salariale dès 2013 ainsi que lors des deux prochaines années. Comment? Plusieurs pistes sont à l’étude, comme celles consistant à retoucher le tableau des vocations des fonctionnaires de catégorie A et B, ce qui permettrait de réduire subtilement les indemnités de résidence ou encore à jouer sur les primes de performance attribuée aux ambassadeurs. Une nouvelle réduction d’effectifs serait même envisagée, d’après Le Point, ainsi qu’une baisse des indemnités de résidence.

Mais le plus inquiétant reste la gestion du parc immobilier du Quai d’Orsay. Contraint à « rationaliser » ses implantations dans le monde, le ministère des Affaires étrangères a vendu 152 biens pour 307 millions de gains en l’espace de 6 ans. Cette somme a été intégralement réinvestie dans son budget afin de racheter pour moins cher des bâtiments plus modernes, plus fonctionnels et plus faciles à entretenir, l’idée générale étant de regrouper les services dans un même lieu. Mais pour les ventes futures, la règle va changer puisque 30% des produits des cessions seront affectés au désendettement du pays.

Mais cette politique a ses limites. Pour commencer, l’état du marché dans certains pays ne permet pas de vendre des emprises au meilleur prix. C’est notamment le cas en Espagne, où la crise immobilière bat son plein. Ensuite, cela revient à vendre les « bijoux de famille », ce qui peut être critiquable dans certaines situations, comme par exemple le projet (confirmé) de vendre, pour 40 millions de dollars, le logement de fonction, certes prestigieux mais idéalement placé, qu’occupe à New York l’ambassadeur de France auprès de l’ONU… Tel est le prix de l’influence d’un pays membre permanent du Conseil de sécurité…

Qui plus est, il arrive parfois que le Quai d’Orsay vende ses biens pour en louer d’autres. C’est ce qui s’est notamment passé à Hong Kong…. En outre, une partie des produits des ventes a servi à financer de grosses rénovations nécessaires dans d’autres emprises, faute de ligne de crédit ad hoc.

« Peut-on dire que les opérations de redéploiement effectuées dernièrement se sont faites dans de bonnes conditions pour l’État ou bien doit-on reconnaître que, dans certains cas, on a pu céder des bijoux de famille pour se reloger en location et s’infliger des coûts de gestion significatifs pour l’avenir ? » s’est interrogé Philippe Marini, président UMP de la commission des Finances du Sénat, lors de l’audition d’Yves Saint-Geours, le directeur général de l’administration et de la modernisation du ministère des Affaires étrangères, le 5 juin dernier.

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