M. Le Drian : « L’Asie-Pacifique demeure un enjeu stratégique pour la France »

Qu’on le veuille ou non, avec la Polynésie et ses quelques 5.000.000 km2 de domaine maritime et la Nouvelle-Calédonie ainsi qu’un réseau diplomatique dense dans la région, la France est concernée par ce qui peut se passer en Asie-Pacifique. C’est ce qu’a rappelé Jean-Yves Le Drian, le ministre français de la Défense, lors d’un discours prononcé à l’occasion du forum sur la sécurité « Shangri-La Dialogue », organisé à Singapour par l’IISS (International Institute for Strategic Studies).

« Principal foyer de croissance économique du monde au cours des 30 dernières années, l’Asie-Pacifique demeure un enjeu stratégique pour la France, par les facteurs de tension qu’elle recèle au-delà de son objectif affiché de stabilité », a en effet déclaré M. Le Drian, le 2 juin. « Puissance riveraine de l’océan Indien et du Pacifique, liée à nombre de ses Etats par des relations singulières, la France ne peut s’en détourner, quelles que soient les contraintes de la géographie, l’impact de la contrainte budgétaire ou les présupposés erronés sur la dimension économique exclusive que revêtirait la relation euro-asiatique », a-t-il ajouté.

Le ministre a ensuite précisé deux types de menaces qui concernent directement l’Asie-Pacifique, et donc la France puisque, a-t-il dit, « vos intérêts de sécurité sont également nos intérêts de sécurité. »

Premier type de menaces, donc, celles dites « de la force ». Ainsi, le dernier Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale (LBDSN) note qu’une « crise majeure en Asie aurait des conséquences économiques, commerciales et financières très sérieuses pour l’Europe », et donc pour la France.

Le même document souligne également que « l’évolution des tensions géopolitiques en Asie est difficilement prévisible. Les dynamiques économiques font évoluer rapidement les rapports de force au sein de l’ensemble asiatique » et que « malgré des progrès importants constatés, notamment pour l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN), les organisations de coopération régionale asiatiques ne disposent pas encore toutes des moyens d’agir efficacement pour désamorcer les risques de crise et les conflits de souveraineté. »

Et c’est donc la raison pour laquelle M. Le Drian, estimant que « dans les années à venir, les mers d’Asie verront la présence de très nombreux bâtiments militaires, notamment des sous-marins », a plaidé pour la mise en place de « mesures de confiance nécessaires » entre les acteurs de la région.

Les autres menaces évoquées par le ministre français sont « transverses » et « amplifées par la mondialisation ». A ce titre, elles ne concernent pas seulement les pays de la région Asie-Pacfique. Il s’agit de prolifération nucléaire, chimique et balistique, les cyberattaques, la piraterie, la criminalité organisée avec le trafic de drogues, l’insécurité énergétique ou encore les attaques contre les satellites (à noter que la Chine travaille à acquérir une telle capacité).

Comment la France entend agir dans cette partie du monde? Par « l’intensification de ses dialogues politico-militaires à travers lesquels nous pouvons construire des relations de confiance, échanger nos expériences et nos connaissances sur le contexte régional et international », a répondu M. Le Drian. Puis par « la coopération militaire, afin d’aider nos partenaires à disposer d’un outil de défense efficace, et faciliter ainsi des actions coordonnées avec nos forces, y compris sous la forme d’exercices conjoints », la « coopération en matière d’armement et d’équipements de défense (…)avec les pays qui partagent nos valeurs de façon durable et constante » et, enfin, par la « promotion d’une architecture de sécurité régionale » en s’appuyant sur l’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est).

Quoi qu’il en soit, le rôle de la France, surtout dans le domaine militaire, ne peut être que limité dans cette région. Et ce n’est pas avec seulement 15 frégates de premier rang (et encore, en tirant sur la corde) que cela pourra changer dans les années à venir.

Reste donc la possibilité de nouer des accords de partenariats stratégiques, comme cela a été fait avec Singapour, en octobre 2012. Ou encore de soutenir la vente d’armes françaises dans cette zone, qui a dépassé l’Europe en terme de dépenses militaires. Déjà, l’an passé, 40% des exportations françaises dans le secteur naval militaire ont été effectuées dans la région Asie-Pacifique.

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