Les frégates légères LCS de l’US Navy seraient moins performantes que prévu

Le programme Littoral Combat Ship (LCS) prévoit de doter la marine américaine de 52 frégates légères furtives modulaires (55 étaient initialement prévues) pour un coût de 37 milliards de dollars. Ce projet a été confié à deux industriels (Lockheed-Martin et Austal) lesquels produisent chacun un type de bâtiment différent, l’un étant monocoque, l’autre étant un trimaran.

L’idée est de disposer d’une gamme de navires polyvalents, c’est à dire capables d’accomplir tout un panel de missions allant de lutte anti-sous-marine et anti-navire au déminage, en passant par le reanseignement, la surveillance côtière ou encore les opérations spéciales.

A l’origine, ce programme devait être peu onéreux. Mais comme cela est désormais souvent le cas, il a été victime de dépassements de coûts. Alors que le prix d’un LCS devait être de l’ordre de 220 millions de dollars, l’US Navy doit désormais en débourser le double.

Qui plus est, ces navires ne sont pas aussi performants qu’espéré. En janvier, l’on apprenait ainsi que l’USS Independence, conçu par Austal, n’avait pas les capacités anti-mines conformes aux attentes de l’US Navy. Un rapport de l’Operational Testing and Evaluation office (DOT&E, Bureau des évaluations et des essais opérationnels du Pentagone), avait en effet conclu que le sonar AN/AQS-20A Mine Detecting Set et l’Airborne Laser Mine Detection System (ALMDS), un système anti-mines, était « déficient ». Et cela s’ajoutait alors à des problèmes de corrosion, constatés sur ce bâtiment livré en 2010.

Le même document indiquait que les LCS avaient peu de chances de « survivre dans un environnement de combat hostile. » Ce qui a été confirmé par un autre rapport de 36 pages qui aurait dû rester confidentiel mais auquel l’agence Bloomberg a pu cependant avoir accès.

Rédigée en 2012 par le contre-amiral Samuel Perez, cette évalution insiste sur le fait que « l’écart entre les capacités des navires et les missions que l’US Navy entend faire exécuter » à ces navires. « L’impossibilité de faire correspondre les spécifications des LCS avec leurs capacités aura pour conséquence la construction d’un grand nombre de bâtiments mal adaptés pour répondre aux besoins de combat des commandants régionaux », a écrit l’officier.

Mais ce n’est pas tout : la largeur des navires est trop importante pour leur permettre d’accoster dans certains ports, voire même leur empêcher d’évoluer à leur aise dans les « eaux resserrées », la décision de construire deux modèles va compliquer l’entretien et la logistique (il fallait s’en douter…) et surtout, le concept de modularité y est remis en cause.

Pour être efficace, il doit être possible d’échanger les modules de missions en moins de 96 heures. Or, indique le rapport, cela n’est valable que si les équipements sont à proximité du quai où est amarré le LCS. En réalité, souligne le rapport, « réunir sur place tout le personnel nécessaire et le matériel adéquat pour procéder à l’échange pourrait prendre plusieurs semaines », ce qui, bien évidemment, amoindrit considérablement « l’utilité tactique initialement envisagée par les concepteurs. »

Autre point litigieux : l’équipage. Un LCS est mis en oeuvre par 40 marins, un effectif insuffisant pour le rapport du contre-amiral Perez. Il ressort des entretiens avec des personnels servant à bord de ces navires que « la fatigue » se fait ressentir « dès le 3e jour de mer ». En outre, « le faible effectif de l’équipage a des impacts significatifs opérationnels et de sécurité, avec une dégradation notable de la préparation, des niveaux de performance et de qualité de vie ».

Mais le plus embarrassant reste à venir. En effet, le rapport pointe la faiblesse de leur armement et donc sur leur capacité limitée de combat. Ainsi, un LCS « ne peut que neutraliser » de petits bateaux rapides et il « reste vulnérable face à des bâtiments » dotés de missiles de croisière anti-navire d’une portée de plus de 8 km. Or, l’Iran en possède 67…

Pour autant, le chef d’état-major de l’US Navy, l’amiral Jonathan Greenert, a relativé la portée de ce document. « Le rapport date de plus d’un an et nous avons corrigé beaucoup de choses depuis », a-t-il fait valoir. Récemment, l’amiral Copeman, commandant les flottes de surface de la marine américaine, a toutefois évoqué l’hypothèse d’une refonte du programme LCS, avec le choix d’un seul modèle et d’un armement plus conséquent.

En outre, avec les restrictions budgétaires liées à la séquestration outre-Atlantique, certains s’interrogent au Congrès sur « la petinence de mettre autant d’argent » dans le programme LCS. C’est notamment le cas du représentant démocrate James Moran.

Actuellement, le LCS-1, l’USS Freedom, est déployé à Singapour pour une durée de 8 mois. Or, un nouveau problème est venu s’ajouter à ceux mis en évidence dans le rapport du contre-amiral Perez : le réseau informatique du navire n’est pas sûr, étant donné que plusieurs failles y ont été découvertes par des experts en sécurité.

Photo : USS Independence (c) US Navy

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