Pour le patron de Cassidian, l’Europe doit développer ses propres drones armés

Dans les années qui viennent, il n’y a peu de chances pour qu’un programme portant sur le développement d’un nouvel avion de combat soit lancé. Le F-35 de Lockheed-Martin devrait rester en service pendant plusieurs décennies, de même que le Rafale de Dassault Aviation ou encore l’Eurofighter, conçu par BAE Systems, Finmeccanica et Cassidian, la branche défense d’EADS.

Aussi, pour le patron de cette dernière, Bernhard Gerwert, il faudra bien occuper les bureaux d’étude pour maintenir et développer les compétence européennes en la matière. D’où son plaidoyer en faveur d’un drone armé de facture européenne, lors d’un forum sur l’avenir de l’aviation de combat organisé à Paris par l’Académie de l’Air et de l’Espace, le 16 mai dernier.

« L’Europe doit développer ses propres drones armés pour préserver son indépendance au lieu d’acheter des drones américains ou israéliens », a-t-il affirmé. Sur ce point, Bernhard Gerwert n’est pas le seul à tenir ce discours. Le constructeur français Dassault Aviation est dans la même logique, lui qui devait justement « francisé » le drone Heron TP israélien pour les besoins de l’armée de l’Air française.

Ce contrat, qui lui avait été attribué en juillet 2011, avait fait l’objet de vifs débats entre sénateurs et députés, les premiers souhaitant l’acquisition d’appareils américains moins chers tandis que les seconds allaient dans le sens de Gérard Longuet, alors à l’époque ministre de la Défense. Depuis, le choix du Heron TP a été invalidé en faveur du MQ-9 Reaper américain.

Quoi qu’il en soit, le patron de Cassidian a donné des arguments en faveur d’un drone armé européen. Notamment en prenant l’exemple des déboires du drone HALE (Haute Altitude Longue Endurance) Euro Hawk, une déclinaison du Global Hawk de l’américain Northrop Grumman qui n’a pas pu obtenir la certification pour évoluer dans les cieux du Vieux Continent, forçant ainsi Berlin a abandonner son projet d’en équiper la Bundeswehr avec 5 exemplaires.

Comme les clients n’ont pas accès aux codes sources des drones américains, il leur est impossible de les modifier pour les rendre compatibles avec leur propre réglementation aérienne. « Il faut changer les boîtes noires pour obtenir la certification, le coût est énorme, c’est pour cela qu’ils mettent fin au programme », a expliqué Bernhard Gerwert.

Toujours selon ce dernier, le coût de développement d’un drone armé européen serait de l’ordre d’un milliard d’euros. Et il pourrait être livré « aux alentours de 2020 ». Et d’ajouter : « Si un tel programme était lancé nous trouverions un accord entre industriels » pour partager le travail

Par le passé, EADS a travaillé sur le projet de drone Talarion. Lequel est tombé dans les oubliettes, ses clients potentiels l’ayant estimé trop onéreux dans un contexte marqué par des budgets militaires en diminution. En novembre 2010, le développement d’un drone MALE avait été confié à BAE Systems et Dassault Aviation. Basé sur le Mantis, ce programme appelé « Telemos » est actuellement au point mort, le contrat devant le lancer n’ayant pas été signé en juillet 2012, comme il aurait dû l’être.

Aussi, les options dans le domaine des drones MALE sont limitées et c’est ce qui explique les choix britannique et français en faveur du Reaper, appareil acheté « sur étagère », le dilemne étant de faire un choix entre le maintien du savoir faire des industriels européens et la nécessité que les forces puissent remplir leurs missions sur les théâtres où elles sont engagées.

Cela étant, Bernhard Gerwert semble avoir oublié que d’autres projets sont en cours, bien plus ambitieux que de mettre au point des drones MALE puisqu’il s’agit de développer des engins de combat pilotés à distance, voire autonomes (UCAV). C’est là tout l’enjeu du démonstrateur nEUROn, fruit d’une coopération européenne avec Dassault Aviation comme maître d’oeuvre. Ou encore celui du projet de Système de Combat Aérien Futur (SCAF) franco-britannique lancé l’an passé.

Plus sur le sujet : « Du drone armé à l’UCAV : Évolution ou rupture ?« , actes d’un colloque organisé par le Centre d’études stratégiques aérospatiales

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