Hommage à Clet Chevert, un combattant de la France Libre parti dans l’indifférence générale

Dans ses « Mémoires de Guerre », l’Homme du 18 juin a écrit : « Dans les derniers jours de juin, abordait en Cornouauilles une flottille de bateaux de pêche amenant au général de Gaulle tous les hommes valides de l’île de Sein. Jour après jour, le ralliement de ces garçons resplendissant d’ardeur et dont beaucoup, pour nous rejoindre, avaient accompli des exploits, affermissait notre résolution. » Ils étaient 124 à rallier la France Libre. Et Clet Chevert était l’un d’entre eux.

Isolés sur leur petite île située en face de la pointe du Raz, à l’extrémité sud-ouest de la Bretagne, ces hommes prirent leur décision de continuer le combat après avoir écouté le général de Gaulle sur les ondes de la BBC, le 22 juin 1940. Dans les heures qui suivirent, ils embarquèrent à destination de l’Angleterre à bord de 5 bateaux : le Velleda, le Rouanez ar Mor, le Corbeau des Mers, le Maris Stella et le Rouarnez ar Péoc’h, ce dernier étant celui où Clet Chevert, alors âgé de seulement 18 ans, prit place.

Engagé dans les Forces navales françaises  libres (FNFL), le jeune Senan, comme beaucoup de ses camarades, est affecté à bord du cuirassé Courbet en qualité de quartier-maître de manoeuvre. Après plusieurs mutations, notamment une à bord de la vedette rapide B12, sous les ordres du futur amiral Philippe de Gaulle, il sert à bord de L’Escarmouche, une frégate alors chargée d’assurer la protection du débarquement en Normandie.

Démobilisé à l’issue de la guerre, Clet Chevert reprendra son métier de pêcheur et fondera une famille. Pour donner une idée de son parcours militaire, il suffit de citer quelques distinctions qu’il a obtenues : médaille des Forces françaises libres, Croix du combattant, Croix de guerre avec citation, médaille commémorative de la guerre 1939-1945, et… la Légion d’honneur, remise en 2010 par Hubert Falco, alors secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens combattants. Mieux vaut tard que jamais.

Au lendemain du 68e anniversaire de la capitulation allemande, Clet Chevert, l’un des trois derniers survivants de l’épopée de ces 128 Senans, s’est éteint à l’âge de 92 ans. Ses obsèques ont eu lieu deux jours plus tard.

Photographe et journaliste, Patrick Crasnier se trouvait sur l’île de Sein ce jour-là. Il raconte : « Des anciens combattants marchaient en tête du cortège. Une très courte procession mena Clet Chevert de la petite église de l’île au cimetière, à moins de 300 mètres. Au moment de la mise en terre, les femmes de l’île ont entonné quelques chants bretons. » Aucun officiel n’a assisté à la cérémonie, selon lui. « Pas un seul n’est venu », écrit-il. Même « pas l’ombre d’un gaulliste ou autoproclamé tel. »

Que ces quelques lignes puissent permettre aux lecteurs de Zone Militaire d’avoir une pensée pour Clet Chevert, et à travers lui, pour tous ses camarades qui n’hésitèrent pas à tout quitter pour continuer le combat. Parce que, comme l’a dit l’un d’eux, Louis Fouquet, ils étaient « patriotes », parce qu’ils aimaient la France.

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