Chuck Hagel veut rationaliser le fonctionnement du Pentagone

Juste après son élection à la Maison Blanche, le président Obama avait averti les industriels américain de la défense : « L’époque des chèques en blanc est révolue. » Nommé à la tête du Pentagone par George W Bush et maintenu à ce poste par le successeur de ce dernier, Robert Gates avait alors entrepris de revoir les grands programmes d’armements.

Compte tenu de la crise économique, il était attendu que les forces armées américaines, après avoir bénéficié de budgets en hausse constante depuis 2001, allaient devoir se serrer un peu la ceinture. De là date, par exemple, la fin de la production de l’avion furtif F-22. En 2009, le Government Account Office (GAO) avait indiqué que 96 programmes d’armement présentaient un surcoût de 25% par rapport aux estimations initiales, soit un dérapage de 1.600 milliards de dollars. « Chaque dollar dépensé pour s’assurer de manière excessive contre un risque lointain ou en déclin (…) est un dollar qui n’est pas disponible pour s’occuper » des Américains », avait alors expliqué Robert Gates.

Son successeur à la tête du Pentagone, Leon Panetta, a poursuivi cette politique, marquée par la réorientation stragique de Washington vers la région Asie-Pacifique et la baisse programmée des effectifs militaires, notamment au sein de l’US Army et de l’US Marine Corps. Reprenant l’expression du président Obama, il avait affirmé, en début d’année, que le temps des « chèques en blanc » signés au profit des forces armées américaines était terminé. Mais à l’époque, le mur budgétaire n’était pas encore une réalité.

Car depuis, faute d’accord sur le montant de la dette au Congrès, le nouveau secrétaire à la Défense, Chuck Hagel, doit trouver 41 milliards de dollars d’économies d’ici septembre prochain. Et ce n’est sans doute pas fini car si de nouvelles coupes automatiques sont décidées, le budget du Pentagone devra diminuer de 8% sur 10 ans et se passer de 50 milliards dollars par an sur cette période.

Le défi sera donc de faire tout aussi bien mais avec moins de moyens. « Le rôle des Etats-Unis dans le monde n’est pas en question car le pays ne peut pas se payer le luxe de se replier sur lui-même », a affirmé Chuck Hagel, lors de son premier grand discours depuis sa prise de fonctions prononcé le 3 avril devant l’Université de défense nationale (NDU) de Washington. Car, a-t-il poursuivi, « si nous refusons d’être les leaders, quelqu’un d’autre remplira le vide. »

« L’armée des Etats-Unis reste un outil essentiel de la puissance américaine, mais qui doit être utilisé judicieusement, avec une vision claire de ses limites », a encore avancé Chuck Hagel. « Nous devons remettre en question toutes les hypothèses passées et nous devons tout mettre sur la table », a-t-il ajouté.

Car, avec des ambitions élevées et des ressources en baisse, il faudra bien trouver des marges de manoeuvre pour financer les nouveaux équipements, les opérations et la préparation des forces. Et apparemment, Chuck Hagel a quelques idées là-dessus car il compte bien s’attaquer au mode de fonctionnement du Pentagone, et donc, à sa bureaucratie envahissante.

« A maints égards, le plus gros défi budgétaire à long terme auquel est confronté le département de la Défense n’est pas un budget inchangé ou en déclin, mais le déséquilibre grandissant dans la façon dont cet argent est dépensé », a-t-il ainsi estimé.

Et de constater que si le format des « forces opérationnelles » a été « radicalement réduit depuis la Guerre Froide », « le nombre de généraux 3 ou 4 étoiles, et la chaîne de commandement qui s’en suit, est loin d’avoir suivi cette tendance. »

En outre, Chuck Hagel a noté que « plus de 300.000 militaires accomplissent des tâches civils ou commerciales » et non le métier pour lequel ils ont été formés. Et comme un soldat bénéficie de prestations sociales et de santé plus élevées que dans le civil, il y voit un gisement d’économies… Car pour lui, « si l’armée n’est pas une entreprise », cela ne doit pas l’empêcher de « prendre exemple sur le privé pour rationnaliser son fonctionnement. »

Mais la charge sans doute la plus piquante a été adressée aux industriels de l’armement. La modernisation des forces armées, selon Chuck Hagel, « depend de systèmes qui sont largement plus onéreux et risqués technologiquement que ce qui était promis ou budgété. Comme par exemple le programme F-35, dont le coût a doublé depuis son lancement, en 2001. Fera-t-il mieux que Robert Gates?

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