L’armée russe prend désormais soin de ses soldats

Depuis 2008, la Russie a entrepris une vaste réforme de ses forces armées, ce qui implique une refonte de ses structures et de son organisation territoriale, ainsi qu’une réduction de son format, en faisant moins appel, notamment, à la conscription. Bien évidemment, la mise en place de ces mesures ne va pas sans causer quelques grincements de dents, en particulier chez les officiers, dont le nombre sera drastiquement réduit.

Ainsi, en 4 ans, les effectifs des forces armées russes ont diminué de 400.000 hommes, dont 150.000 officiers. Dans le même temps, il est question de recruter des soldats professionnels. Actuellement au nombre de 186.000, le président Poutine a promis, en août dernier, qu’ils seraient 425.000 en 2017 si, toutefois, les conditions matérielles le permettent.

Mais même si les budgets suivent, cela risque de ne pas être suffisant pour recruter suffisamment d’hommes afin d’atteindre cet objectif. Car, en 2012, et pour la première fois en 4 ans, le nombre de conscrits de l’armée russe est reparti à la hausse, avec 155.000 appelés, soit 20.000 de plus que prévus. Une des raisons est que les candidats à un engagement ne se bousculent pas.

Il faut dire que l’armée russe n’a pas une excellente réputation, notamment à cause de la dedovchtchina, terme qui désigne les mauvais traitements infligés aux recrues en guise de bizutage. Et l’on peut également ajouter des conditions de vie plutôt rudes pour la troupes. En 2008, 471 soldats russes sont morts, dont 231 par suicide, d’autres en raison de maladies contractées pendant le service.

Au début de cette année, 5 militaires sont décédés des suites d’une pneumonie, ce qui a motivé l’ouverture d’une enquête pour négligences et provoqué le limogeage du directeur des services sanitaires militaires, Viatcheslav Novikov, à cause « d’un manque de travail dans un certain nombre de domaines. » Pour autant, ce problème est récurrent.

La présidente du Comité des mères de soldats russes, Valentina Melnikova, a expliqué que de nombreux militaires tombaient malades en raison du « non-respect des programmes de vaccination » dans l’armée. Toujours selon elle, il y aurait des centaines de soldats hospitalisés pour une pneumonie.

Aussi, l’amélioration des conditions sanitaires des soldats russes est désormais l’une des priorités du ministre de la Défense, Sergueï Choïgou. Ce dernier a affirmé, en décembre dernier, que 75% des établissements militaires de santé, ouverts depuis plus de 40 ans, avaient un besoin « urgent » d’être rénovés.

Un autre effort portera aussi sur les conditions de vie des soldats russes. En 2011, l’ancien ministre russe de la Défense, Anatoli Serdioukov, avait décidé d’améliorer leur ordinaire en interdisant de servir, sous peine d’une amende de 350 euros, la très impopulaire perlovka, une sorte de bouillie d’orge perlée, qui revenait à « mâcher du cuir bouilli » selon le quotidien Izvestia.

Une autre initiative portera sur l’hygiène. Aussi surprenant que cela puisse paraître, de nombreuses cités militaires russes ne sont actuellement pas dotées de douches. Elles seraient au moins 500, selon Grigori Naguinski, le directeur de l’Agence fédérale des Constructions spéciales de Russie.

Ce dernier a donc promis d’y remédier en afficher l’objectif d’en équiper « toutes les casernes permettre aux soldats de faire comme chez eux dans la vie quotidienne: après être rentrés le soir, prendre une douche et se coucher. » Ce responsable a en outre déploré l’actuel système selon lequel « les soldats ne se lavent que le visage et les mains six jours par semaine et ne visitent tous ensemble les bains (banya) que le samedi. »

Enfin, d’autres mesures vont concerner cette fois l’uniforme porté par les soldats russes, avec la fin annoncée de certains effets pourtant traditionnels. En 2008, pourtant, les tenues militaires avaient été revues et corrigées par le couturier Valentin Ioudachkine, accessoirement proche de Svetlana Medvedev, l’épouse du président de l’époque, Dmitri Medvedev.

Seulement, ces dernières avaient été accusées par la presse d’être la cause d’une épidémie de pneumonie étant donné qu’elles protégeaient mal du froid. En fait, il semblerait que les doublures des vareuses aient été conçues en matières synthétiques en lieu et place du tissu prévu par le couturier. Et cela pour des raisons d’économie (voire de corruption….).

Mais un nouvel uniforme est en cours d’élaboration. Et deux symboles de l’armée russe vont disparaître : la fameuse ushanka, avec ses rabats pour protéger les oreilles, et les « portianki », c’est à dire les bandes molletières (voir photo ci-dessus). Passeront à la trappe également les bottes « Kirza », les sous-cols et les ceintures de cuir à boucle.

L’abandon des « portianki », en vigueur depuis le tsar Pierre le Grand, au XVIIe siècle, a fait beacoup parler en Russie. Et elles ont leurs défenseurs, qui affirment qu’elles permettent de garder les pieds des fantassins au sec et qu’elles protègent du froid. Seulement, si elles sont mal mises, elle peuvent aussi blesser les pieds. Et cela, sans parler de l’hygiène…

Quoi qu’il en soit, pour le ministre russe de la Défense, « il est épouvantable de traiter des soldats » en les obligeant à ces bandes molletières. D’où sa décision de s’en débarrasser pour les chaussettes et les rangers.

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