Consensus large de la classe politique autour de l’intervention militaire française au Mali

La décision du président François de répondre favorable à la demande d’aide militaire que lui avait adressé son homologue malien et par conséquent d’engager les troupes françaises au Mali afin de stopper l’offensive de groupes jihadistes vers Bamako, est soutenue par la quasi totalité de la classe politique française.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Harlem Désir, a parlé d’une « décision courageuse dans le respect de la légalité internationale et de l’Organisation des Nations unies » et exprimé sa « solidarité avec le peuple malien et (son) soutien le plus complet à nos forces armées. »

« Nous ne sommes pas piégés, nous prenons nos responsabilités de lutter aussi contre le terrorisme. Si le pays tombe aux mains de ces terroristes, c’est l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest qui peut s’embraser. Il y a toujours des risques mais les risques sont plus grands si le pays basculait aux mains des terroristes car ils auraient une base pour des actions beaucoup plus grandes. Il y a 3 500 ressortissants français que l’on ne peut pas laisser dans la situation difficile dans laquelle ils allaient être » a pour sa part expliqué, à l’antenne d’I-Télé, Jean-Christophe Cambadélis, le secrétaire national du PS pour les questions internationales.

Dans les rangs l’opposition, le ton est identique. L’ancien Premier ministre, François Fillon a ainsi exprimé son « soutien aux forces armées françaises engagées dans une intervention militaire contre le terrorisme à la demande du Mali ». « la lutte contre le terrorisme exige l’unité de la Nation au-delà des clivages partisans » » a-t-il estimé. Le président de l’UMP, Jean-François Copé, a quant à lui estimé qu’il « était grand temps d’agir » pour « entraver l’établissement d’un Etat narcoterroriste. »

Pour l’UDI, Jean-Louis Borloo a salué « l’esprit de responsabilité du président de la République et du premier ministre dans cette situation d’extrême urgence et de danger pour la population malienne et pour les ressortissants français. » Et d’ajouter que « même si l’unité nationale ne se décrète pas, le rassemblement des forces politiques qui concourent à la démocratie est nécessaire dans ces moments-là. »

Au MoDem, François Bayrou a jugé que la décision du président Hollande était « fondée et explicable par l’urgence » car « la progression des djihadistes en direction du sud du pays, le franchissement imminent de la ligne de sécurité, la prise de villes sur leur passage est un élément de déstabilisation gravissime pour le Mali, pour ses autorités et pour ses habitants ». Pour l’ancien candidat à l’élection présidentielle, « il est légitime que la communauté nationale et la plupart des courants d’opinion qui la composent fassent bloc devant une situation dont chacun mesure l’importance et la gravité. »

De son côté, la président du Front national, Marine Le Pen a indiqué trouver « légitime » l’intervention militaire française au Mali et qu’elle « doit être soutenue dans la mesure où notre pays a été appelé à l’aide par le gouvernement légitime du Mali en application d’une coopération de défense entre nos deux pays, dans une zone francophone ».

Au cours de ces dernières années, le FN s’était opposé aux dernières opérations militaires française. Et Marine Le Pen de s’en expliquer : « Cette intervention légitime révèle cependant un cruel paradoxe quand on sait que les gouvernements français ont contribué à faire le lit des islamistes en Libye et en Syrie en apportant aide, assistance et armes aux fondamentalistes de ces pays, utilisés aujourd’hui pour attaquer un allié historique de la France. »

Cela étant, l’on compte aussi des soutiens plutôt « tièdes », comme celui apporté par Europe Ecologie – Les Verts, qui, membre de la majorité et présent au gouvernement, a « pris acte » de la décision du président Hollande d’engager l’armée française au Mali.

« Conscients de la gravité de la situation, en ayant une pensée pour les otages retenus dans la région, EELV, tout en regrettant que le Parlement n’ait pas été consulté en amont de cette décision, souhaite que l’opération engagée par la France soit strictement limitée dans le temps et que l’armée française laisse très rapidement la place à une force d’intervention africaine qui aura pour mission de veiller à la mise en place, en accord avec les populations concernées, d’un processus démocratique et d’une paix durable » a fait valoir le parti écologiste par voie de communiqué.

Par ailleurs, le député EELV Noël Mamère, s’il reconnaît la nécessité de « mettre un coup d’arrêt à la progression d’Aqmi », s’est étonné que « le président de la République reproduise les mêmes méthodes que son prédécesseur en ne saisissant le Parlement qu’une fois les opérations lancées. »

Et de préciser : « Les écologistes ont toujours exigé qu’avant toute intervention militaire française le Parlement débatte et vote, comme ce fut le cas pour l’Afghanistan, c’était aussi la position du PS mais ces exigences ont été oubliées. On a le triste sentiment de revenir aux méthodes anciennes de la Françafrique. S’il y avait un vote au Parlement, je refuserai de participer à cette mascarade. »

Cela étant, le parlementaire feint d’ignorer qu’une consultation des parlementaires n’était pas possible étant donné l’urgence de la situation, sauf à prévenir les jihadistes du Nord-Mali de l’imminence de l’intervention française. Qui plus est, l’article 35 de la Constitution (et après la révision de 2008 voulue par l’ex-président Sarkozy), exige seulement une information au Parlement dans les trois jours qui suivent le début d’une opération extérieure. Dans quatre mois, les députés et les sénateurs auront à se prononcer sur la poursuite ou non de la mission.

Enfin, l’opération française a aussi ses détracteurs. A droite, l’on trouve Dominique de Villepin, qui, dans une tribune publiée par le Journal du Dimanche, parle de « virus néoconservateur ». Sceptique quant aux chances de reconquérir le Nord-Mali et d’éradiquer les bases jihadistes, l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac estime que « nous nous battrons dans le vide, faute d’appui régional solide » et prône la poursuite d’un « processus politique », « seul capable d’amener la paix au Mali. »

Co-président du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon a quant à lui estimé « discutable » l’engagement militaire au Mali et, comme Noël Mamère, « condamnable » le faut qu’il a été décidé « sans en saisir préalablement ni le gouvernement ni le Parlement. »

« L’intérêt d’une intervention militaire extérieure pour régler le problème posé au nord du Mali est discutable. En décider alors que les intérêts fondamentaux de la France ne sont pas en cause, selon le chef de l’Etat lui-même, et alors que les troupes africaines sont engagées, est discutable » a-t-il poursuivi.

Enfin, à l’extrême gauche, l’on ne pouvait guère s’attendre à une adhésion à la décision du président Hollande. Fidèle à lui-même, le Nouveau parti anticapitaliste parle d’une « intervention militaire impérialiste décidée par Hollande, une fois de plus sur le dos des peuples », estimant que la « menace islamiste constitue le paravent de cette opération. »

Même chose pour Lutte ouvrière, qui, par la voix de Nathalie Arthaud, sa porte-parole, dénonce l’opération au Mali, décidée pour « maintenir un ordre économique qui permet aux grands groupes français de piller ces pays. »

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