La Centrafrique à nouveau déstabilisée

Ce ne sont pas les groupes rebelles qui manquent en Centrafrique. Il y a d’abord ceux viennent de l’étranger, comme le Front Populaire pour le Redressement (FPR) du rebelle tchadien Baba Laddé ou encore l’Armée de Résistance du Seigneur (LRA) de Joseph Kony, dont les combattants sont traqués par l’armée ougandaise, épaulée par des éléments des forces spéciales américaines.

Et puis il y a les groupes rebelles locaux, qui entretient une instabilité chronique dans le pays. Arrivé au pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat en 2003, le président centrafricain, le général François Bozizé, s’est attaché à tenter de contenir l’activité de ces derniers, en particulier celle de l’UFDR (Union des forces démocratiques pour le rassemblement ), avec notamment l’appui de la France à deux reprises, en novembre 2006 puis en mars 2007.

Un accord de paix fut finalement signé avec l’APRD (Armée populaire pour la Restauration de la Démocratie) et l’UFDR, avec le lancement du processus dit de « dialogue politique inclusif » visant à réintégrer les mouvements rebelles armés dans la vie politique. Seulement, en 2010, un autre groupe, la Convention des Patriotes pour la Justice et la Paix, prit les armes et attaqua de nouveau Birao, avant d’en être chassé par l’armée tchadienne, au nom du gouvernement centrafricain.

Pour stabiliser le pays, la Communauté économique des États d’Afrique centrale (CEEAC) a déployé en Centrafrique la Mission de consolidation de la paix en Centrafrique (MICOPAX) , qui, financée par la France et l’Union européenne, a remplacé, le 12 juillet 2008, la Force multinationale en Centrafrique (FOMUC). En soutien, l’armée française y a jusqu’à présent maintenu un contingent de 250 hommes dans le cadre de l’opération BOALI.

En septembre dernier, estimant satisfaisante la situation en RCA, la CEEAC a indiqué vouloir réduire progressivement les effectifs de la MICOPAX. Un mois auparavant, certains groupes rebelles se sont fédérés en une structure unique, le Séléka. L’on y trouve l’aile dissidente de la Convention des patriotes pour la justice et la paix (CPJP), la Convention patriotique pour le salut wa Kodro (CPSK) du général Dhaffane Mohamed Moussa et de dissidents de l’UFDR

Et la situation s’est progressivement dégradée, avec des attaques ciblant des officiels centrafricains dans la région de Sibut. Puis, le 10 décembre dernier, la ville de Ndélé, dans le nord du pays, a été le théâtre de violents combats, à l’initiative du Séléka.

Depuis, les rebelles, estimant que le gouvernement centrafricain n’a pas tenu ses engagements à leur égard, ont continué à progresser, prenant le contrôle de villes majeure de la RCA, pour arriver aux portes de la capitale, Bangui. Entre-temps, le Tchad y a déployé des troupes d’interposition, les Forces armées centrafricaines (FACA), qui, composées de soldats sous-payés, peu équipés et mal encadrés, étant complètement dépassées par les évènements.

Quant au président centrafricain, il se trouve désormais en mauvaise posture. Ce 26 décembre, les rebelles du Séléka ont demandé, par voie de communiqué, à « tous les fils et filles de Centrafrique, à tous les éléments de forces de défense et de sécurité encore fidèles au régime de François Bozizé (…) de déposer les armes immédiatement. »

« Par mesure de sécurité et de protection des populations civiles, nous ne considérons plus nécessaire de mener la bataille de Bangui et dy faire entrer nos troupes, car le Général François Bozizé (…) a déjà perdu le contrôle du pays », ont-ils encore fait valoir.

Pour le moment, Paris a seulement condamné « la poursuite des hostilités en République centrafricaine de la part des mouvements rebelles » en soulignant que ces derniers, « devront répondre de leurs agissements. » Mais l’inaction française a provoqué un mouvement de protestation, « particulièrement violent » et animé par des manifestants proche du régime, devant l’ambassade de France à Bangui.

« Nous sommes ici à l’ambassade de France, parce que c’est la France qui nous a colonisés. Mais la France a tendance à nous lâcher. On n’a plus besoin de la France, la France n’a qu’à prendre son ambassade et partir », a affirmé une manifestante, dont les propos ont été relayés par l’AFP. « La France n’a pas respecté la convention de défense entre elle et la République Centrafricaine. Nous dénonçons cette attitude » a renchérit un étudiant.

L’ambassadeur de France, Serge Mucetti, a quant à lui protesté contre cette prise à partie. « Ce matin, une manifestation violente s’est déroulée devant l’ambassade des Etats-unis d’Amérique, et s’est prolongée par une manifestation particulièrement violente devant la chancellerie de France, avec des jets de projectiles, avec des bris de vitres. Le drapeau français a été descendu de son mât et emporté par des manifestants » a-t-il raconté. « Cette situation est totalement inadmissible. Je demande au gouvernement de la République centrafricaine de faire respecter les accords internationaux en cette matière. Ceux qui ont agi de la sorte sont des ennemis de la République centrafricaine », a-t-il ajouté.

La France et la RCA ont revu leur accord de défense en avril 2010. Selon le Quai d’Orsay, « la coopération militaire structurelle française vise à soutenir les FACA de façon à ce qu’elles contrôlent mieux le territoire centrafricain. Elle s’inscrit dans le cadre global et multilatéral de la réforme du secteur de sécurité (RSS). Les principaux axes de notre coopération portent sur la formation du personnel, le conseil de haut niveau et la réorganisation des forces armées et de la gendarmerie. »

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