Lancement réussi d’une fusée nord-coréenne

Les soupçons au sujet d’un lancement prochain d’une fusée nord-coréenne nés de l’étude de photographies satellites du site de Sohae ont rapidement été confirmés par Pyongyang et sa Commission de technologie spatiale (DPRK), ce dernier ayant annoncé son intention de mettre en orbite, entre les 10 et 22 décembre, du satellite d’observation terrestre Kwangmyongsong-3.

Par le passé, et alors que ce type d’activité lui est interdit par les résolutions 1718 et 1874 du Conseil de sécurité des Nations unies, la Corée du Nord avait déjà tenté, sans succès, de lancer deux fusées Unha-3, dérivées du missile balistique Taeopodong-2. Et à chaque fois, l’annonce de ces tirs avait conduit la Corée du Sud, le Japon et les Etats-Unis à prendre des mesures défensives.

Et le scénario a été le même après l’annonce du lancement imminent d’une troisième fusée Unha-3. Ainsi, le Japon a mis en alerte des batteries antimissiles Patriot PAC-3 sur l’île d’Okinawa ainsi que 3 destroyers AEGIS dotés d’intercepteurs SM-3 et averti qu’il n’hésiterait pas à détruire le « missile » nord-coréen s’il représentait une quelconque menace.

La Corée du Sud en a fait de même, en accélérant le déploiement de radars d’alerte de type Green Pine, acquis auprès d’Israël, des systèmes PAC-2 ainsi que deux navires dotés de capacités antimissiles.

Quant aux Etats-Unis, ils ont déployé dans le secteur deux destroyers AEGIS – les USS Benfold et USS Fitzgerald -, pour « surveiller tout lancement de missile éventuel par la Corée du Nord et également rassurer nos alliés dans la région si un tir a lieu. »

Seulement, le 9 décembre, la Pyongyang a fait savoir que la fenêtre de tir de sa fusée avait été prolongée d’une semaine afin de remédier à des problèmes, les ingénieurs nord-coréens ayant « détecté une défaillance technique dans le module de contrôle moteur du premier étage de la fusée (…) et décidé d’élargir la période de lancement. »

Etait-ce vrai ou bien était-ce pour ménager un effet de surprise? Car, finalement, la Corée du Nord a pris tout le monde de court en lançant sa fusée ce 12 décembre (12.12.12, un symbole?).

Et, pour une fois, cela a été, semble-t-il, un succès. « Le lancement de la seconde version de notre satellite Kwangmyongsong-3 depuis le centre spatial de Sohae […] est réussi » et « le satellite est entré en orbite comme prévu », a annoncé la télévision nord-coréenne.

La fusée a décollé à 00H49 GMT. Son premier étage s’est abîmé en mer Jaune et son second est tombé en mer des Philippines. L’engin qu’elle portait a été mis en orbite, entre 499,7 et 584,18 km au-dessus de la Terre, 9 minutes plus tard.

Et cela a été confirmé par le Norad, le commandement nord-américain de la défense aérospatiale, lequel a admis qu’un « objet » avait été placé en orbite suite au tir de la fusée Unha-3. S’agit-il véritablement d’un satellite d’observation ou d’un prétexte pour tester un missile balistique?

Toujours est-il que, par rapport au précédent lancement, effectué en avril dernier, la Corée du Nord a fait des progrès et qu’elle dispose désormais, comme l’a souligné Masao Okonogi, professeur honoraire à l’université Keio du Japon, de « la technologie pour envoyer une ogive sur une zone ciblée ». Et d’ajouter : Elle « représente maintenant une menace pour ses voisins mais aussi une menace réelle pour les Etats-Unis. »

Et cela, sans doute grâce à l’apport d’experts iraniens, dont la présence à Sohae a été signalée par le quotiden Chosun Ilbo, qui a cité des sources gouvernementales sud-coréennes.  » « Il semble que le lien entre la Corée du Nord et l’Iran en matière de (développement de) missiles, qui remonte aux années 80, est plus étendu que supposé jusqu’à présent » a confié un responsable au journal.

Cette présence iranienne en Corée du Nord avait déjà avancée par l’agence japonaise Kyodo, qui s’appuyait alors les confidences d’une source diplomatique occidentale selon lesquelles l’Iran avait envoyé du personnel militaire à Pyongyang dès le mois d’octobre afin de « renforcer leur coopération dans le domaine des missiles et du nucléaire. » Ce que Téhéran a formellement nié.

Quoi qu’il en soit, le lancement de la fusée Unha-3, n’a pas manqué de susciter la réaction indignée des Etats-Unis et de leurs alliés régionaux, la Maison Blanche ayant dénoncé un « acte hautement provocateur menaçant la sécurité de la région » et promis de travailler avec ses partenaires à une « action appropriée » contre le régime nord-coréen. Aussi, Washington, Tokyo et Séoul envisagent de porter l’affaire devant le Conseil de sécurité des Nations unies, avec l’objectif de faire adopter un nouveau train de sanctions à l’égard de la Corée du Nord.

Le ton est le même en Europe. « L’Union européenne va examiner une réponse appropriée, en étroite consultation avec ses principaux partenaires, et en conformité avec les délibérations du Conseil de sécurité des Nations unies, notamment sous la forme de possibles sanctions supplémentaires », a affirmé Catherine Ashton, la représentante pour la politique étrangère, par voie de communiqué.

La Russie a indiqué « déplorer profondément » le tir de cette fusée, lequel « ne va pas contribuer à la stabilité et aura un effet négatif sur la situation dans la région » et appelé Pyongyang à ne plus en effectuer d’autres.

Proche alliée de la Corée du Nord, la Chine a exprimé « ses regrets à propos du lancement » de la fusée Unha-3, « en dépit des graves inquiétudes de la communauté internationale. » Le porte-parole de la diplomatie chinoise a indiqué que Pékin « maintient que l’approche fondamentale pour assurer la paix et la stabilité dans la péninsule coréenne doit être trouvée par le dialogue. Nous espérons que les parties concernées vont conserver leur calme. »

Reste à voir quelle sera attitude de la Chine au Conseil de sécurité étant donné que, jusqu’à présent, elle a toujours menacé de faire valoir son droit de veto en cas de sanctions trop lourdes visant son encombrant allié.

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