Héros du Normandie-Niémen et compagnon de la Libération, Roland de la Poype nous a quittés

C’est non sans émotion que l’on a appris le décès, à l’âge de 92 ans, de Roland de la Poype, le dernier compagnon de la Libération ayant servi en qualité de pilote au Normandie-Niémen, qu’il avait rejoint dès sa création, en 1942.

Né le 28 juillet 1920 aux Pradeaux (Puy-de-Dôme), Roland Paulze d’Ivoy de la Poype se passionne très tôt pour l’aviation, alors qu’il est pensionnaire chez les Jésuites au Mans. A l’âge de 19 ans, il s’engage au Bataillon de l’Air 131 sans avoir terminé ses études. En février 1940, il obtient son brevet de pilote après avoir été affecté à l’Ecole élementaire de pilotage d’Angers. Il est alors promu au grade de caporal.

Pilote à l’Ecole principale d’aviation d’Etampes avant le début de la campagne de France de mai-juin 1940, au cours de laquelle son père, ingénieur de formation et colonel de réserve, est tué à l’ennemi, il refuse la défaite et décide de rejoindre l’Angleterre après avoir entendu l’appel lancé par le général de Gaulle sur les ondes de la BBC le 18 juin.

Arrivé à Plymouth au terme d’un voyage à bord d’un bateau polonais sur lequel il avait embarqué clandestinement, Roland de la Poype s’engage dans les Forces aériennes françaises libres (FAFL) avec les galons de sergent. C’est ainsi qu’il participe, en tant que mitrailleur du Groupe réservé de bombardement n°1 (GRB 1) à l’expédition de Dakar.

En novembre 1940, le jeune sous-officier regagne le Royaume-Uni et entame un stage dans les écoles de la Royal Air Force. Un an plus tard, il est affecté à l’Operationnal Training Unit de Llandow au Pays de Galles, puis au Squadron 602, qui, équipé de Spitfire, est basé au sud de Londres. Grâce à ses qualités, il devient alors l’équipier de l’as irlandais Paddy Finucane.

Promu aspirant en mars 1942, Roland de la Poype obtient sa première victoire aérienne le 22 août 1942 en abattant un Messerschmitt 109. Après la mort de Paddy Finucane, le jeune pilote se porte volontaire pour intégrer le Groupe de chasse n°3 « Normandie », qui sera connu plus tard sous le nom de « Normandie-Niémen ».

Avec son coéquipier Marcel Albert (dit « Bébert »), qui nous a quittés en août 2010, Roland de la Poype, surnommé « le Marquis » par ses camarades, s’illustre lors de toutes les opérations dans lesquelles le GC n°3 est engagé. Ainsi, il obtient 15 victoires aériennes lors des batailles du front de l’Est. Les 14 et 16 octobre 1944, il réussit à abattre, au cours de la même jourée, deux appareils ennemis.

Dans son livre intitulé « Normandie-Niémen », Yves Courrière écrit, à son sujet : « On pensait La Poype inconscient. Ce grand garçon, si jeune, empêtré, maladroit au sol, se révélait – dès qu’il avait décollé – d’une adresse et d’une lucidité affolantes. Si on l’avait interrogé (…) il eût répondu : ‘Je suis aveuglèment la théorie de Bébert : pas d’héroïsme, la logique froide. L’appréhension de la mort? Je ne l’ai pas. C’est une notion parfaitement subjective. En vol, si on ne joue pas les Tulasne ou les Littolff, si on sait bien piloter et si on a un bon appareil, il n’y a aucune raison de ne pas s’en sortir. (…) J’ai peur comme tout le monde, mais rétrospectivement, au retour, quand je vois les traces de balles sur mon taxi.' »

Fait « Héros de l’Union soviétique » avec son compagnon d’armes Marcel Albert, Roland de la Poype, alors promu capitaine, est autorisé par Staline à rejoindre la France avec son avion Yak. Avec 1.200 heures inscrites sur son carnet de vol, il termine la guerre avec 10 citations à l’ordre de l’armée aérienne et 2 citations à l’ordre de l’aviation de chasse.

Après un temps passé au 2e Bureau de l’état-major de l’armée de l’Air, Roland de la Poype décide de revenir une vie civile qui sera riche et variée. Il deviendra en effet agriculteur puis industriel (Société d’Etudes et d’Applications du Plastique) et inventeur (on lui doit le berlingot Dop et la voiture Méhari commercialisée par Citroën). Enfin, il sera aussi le fondateur du Marineland d’Antibes.

Compagnon de la Libération, Roland de la Poype était notamment Grand Croix de la Légion d’Honneur, Héros de l’Union soviétique et titulaire de la Croix de guerre 39/45 avec 12 citations, de l’Ordre du Drapeau Rouge, de l’Ordre de Lénine ainsi que du Mérite de la Guerre pour la Patrie.

Pour en savoir plus : L’épopée du Normandie-Niémen, par Roland de la Poype, Librairie Académique Perrin (3 mai 2007)

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