Soldes : De « très grosses inquiétudes » avant le passage à LOUVOIS

Peut-on imaginer qu’un industriel puisse lancer un nouveau produit sans s’assurer au préalable qu’il soit parfaitement au point? S’il le fait, alors il prend le risque énorme de mécontenter ses clients qui auront acquis un objet défectueux et sa réputation sera tellement mise à mal qu’au bout du compte, son entreprise connaîtra les pires difficultés pour remonter la pente, si elle n’a pas déposé le bilan avant.

Ce scénario, pour improbable qu’il soit, est pourtant celui du raccordement de CONCERTO, le système de gestion des ressources humaines de l’armée de Terre, au Logiciel unique à vocation interarmées de la solde (LOUVOIS), lequel donne lieu, un an après, à des incidents de paie dont certains ont des conséquences dramatiques pour les familles de militaires qui en sont les victimes.

Inviter à s’exprimer devant la commission de la Défense et des Forces armées de l’Assemblée nationale, dans le cadre des débats portant sur le projet de loi de finances 2013, le secrétaire général pour l’administration du ministère de la Défense (SGA), Jean-Paul Bodin, a ainsi évoqué les problèmes liès à LOUVOIS, qualifié de « sujet difficile. »

« C’est un projet ancien, piloté par le commissariat de l’armée de terre et repris depuis deux ans par la direction des ressources humaines du ministère parce qu’il a été décidé de l’utiliser pour l’ensemble de la rémunération des personnels militaires du ministère » a-t-il commencé par rappeler.

« La bascule des armées dans ce système se fait suivant un calendrier que nous avons aménagé au fil du temps, en fonction des difficultés rencontrées, et normalement après plusieurs mois de tests » a-t-il poursuivi.

Donc, si l’on comprend bien, avant de mettre en oeuvre LOUVOIS, des essais ont été réalisés. Et qui plus est, nous apprend M. Bodin, son raccordement au système de gestion RH du Service de santé des armées (SSA) avait déjà donné lieu à des problèmes.

« Cette bascule exige un gros travail d’harmonisation et d’adaptation à la réglementation. En effet, avec la bascule du service de santé, nous avons rencontré des difficultés par exemple de prise en compte des gardes hospitalières » a-t-il affirmé. Idem pour la Marine nationale, qui a adopté LOUVOIS au printemps dernier. Cela « nous a également permis de découvrir des régimes indemnitaires qui n’étaient pas toujours conformes à la réglementation » a-t-il confié.

Quant à l’armée de Terre, essentiellement affectée par les problèmes de soldes, le SGA a déclaré que cette dernière a « basculé avec retard, car nous avions de très grosses inquiétudes. »

Pourquoi alors avoir décidé de raccorder CONCERTO à LOUVOIS sans être absolument certain que l’opération allait bien se passer? N’a-t-on pas fait passer la charrue avant les boeufs dans cette histoire?

C’est en tout cas bien l’impression que l’on peut avoir quand M. Bodin rappelle que des indemnités de service en campagne (ISC) « dues au titre des années 2009 à 2011 » n’avaient pas été versées avant le passage à LOUVOIS et qu’il y a des problèmes  « liés à l’organisation de la fonction RH au sein de l’armée de terre et au fait que celle-ci a été très secouée par la fermeture des centres techniques et administratifs du Commissariat. »

Si le dossier LOUVOIS est traité de la même façon que les autres projets informatiques actuellement dans les cartons, il y a de quoi être inquiet. En 2017, le ministère de la Défense va « basculer dans une structure de paye unique pour l’ensemble de l’Etat, l’opérateur national de paye (ONP) » a précisé M. Bodin.

Mais auparavant, il faudra mettre en place un « système d’information RH unique pour l’ensemble des personnels, civils et militaires, du ministère de la défense ». « C’est donc une véritable course d’obstacles » a estimé le SGA…

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