Le projet de fusion d’EADS avec BAE Systems tombe à l’eau

La fusion d’EADS et de BAE Systems ne se fera pas. C’est par voie de communiqué que les deux groupes ont en effet annoncé, ce 10 octobre, la fin des discussions portant sur les modalités de cette opération, laquelle aurait pu donner naissance au numéro un mondial de l’aéronautique et de la défense.

Bien qu’il aurait été possible de prolonger de 28 jours les négocations pour finaliser cette fusion, conformément à la réglementation boursière britannique, les deux groupes ont donc préféré arrêter les frais devant les difficultés rencontrées avec les Etats concernés par cette opération et les réticences exprimées par certains actionnaires d’EADS et de BAE Systems.

Alors que Français et Britanniques avaient fini par se mettre d’accord au sujet de la gouvernance du nouvel ensemble, le gouvernement allemand porte visiblement une part de responsabilité importante dans l’échec des discussions. « Merkel s’oppose à l’opération mais elle ne s’est pas justifiée » a ainsi confié une source proche du dossier à l’AFP.

Jusqu’à présent, Berlin exigeait seulement la parité franco-allemande au sein du capital du nouvel ensemble. Outre le fait que cette opération concerne le secteur de la défense, Berlin a souhaité éviter que le scénario de la fusion entre Rhôle-Poulenc et Hoechst (qui a donné Sanofi-Aventis) se reproduise, avec des conséquences sur l’emploi du secteur pharmaceutique en Allemagne, au profit des sites français du groupe.

Et, comme les activités d’EADS dans le secteur de la défense sont implantées essentiellement outre-Rhin, l’idée d’une éventuelle relocalisation d’une partie d’entre elles au Royaume-Uni, pays d’origine de BAE Systems, a sans doute pesé lourd dans la balance. C’est ce qui explique aussi son exigence de faire revenir en Allemagne le siège de la maison-mère d’Airbus, alors qu’il est actuellement installé à Toulouse.

Qui plus est, Berlin , contrairement à Paris, n’est pas actionnaire d’EADS. Or, pour arriver à cette parité franco-allemande, il lui aurait fallu racheter les parts que détient Daimler au capital du groupe européen. Et il aurait fallu débourser plusieurs milliards d’euros pour cela. Le jeu en valait-il la chandelle étant donné que cette opération n’aurait rien apporté de plus que les droits liées à l’action spéciale prévue pour les gouvernements dans le projet de fusion? Pas certain…

Par ailleurs, si la fusion d’EADS et de BAE Systems fait sens sur le papier, l’un ayant une entrée sur le marché américain sur la défense, l’autre en anticipant la baisse des dépenses militaires en Europe et aux Etats-Unis, elle n’était pas forcément du goût des actionnaires.

Ainsi, côté EADS, le groupe Lagardère, qui aurait vu sa participation dans le nouveau groupe passer de 7,5 à 5% du capital, a donné le sentiment de se raviser, après avoir approuvé le principe du rapprochement avec BAE Systems. « Ce projet, en dépit du potentiel industriel et stratégique qui lui est prêté, n’a pas démontré à ce jour qu’il était créateur de valeur pour » la maison mère d’Airbus, a déclaré Arnaud Lagardère.

Pour BAE Systems, les réserves ont été formulés par son premier actionnaire, à savoir la société d’investissements Invesco Perpetual, qui a indiqué, le 8 octobre, ne pas comprendre « la logique stratégique du rapprochement qui est proposé », tout en affirmant craindre que la présence d’Etat au capital de la nouvelle entité soit de nature à fermer le marché américain de la défense au groupe britannique.

Autre sujet d’inquiétude poiur Inversco : la baisse du cours de l’action de BAE, le ratio retenu dans le projet de rapprochement, avec 40% pour l’industriel d’outre-Manche et 60% pour EADS, et le manque de visibilité pour les dividendes au-delà de 2013.

Au final, l’on pourrait penser que cette affaire a fait beaucoup de bruit pour rien. « C’est évidemment dommage que nous n’ayons pas réussi mais je suis heureux que nous ayons essayé. Je suis sûr que nous aurons d’autres défis à relever ensemble à l’avenir », a estimé Tom Enders, le patron d’EADS, à l’origine du projet de fusion.

Sauf que cet échec ne sera pas sans conséquence. A commencer sur BAE Systems, qui, faut de faire cause commune avec EADS, pourrait bien se faire racheter par un groupe américain.

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