Mali : « Extrême prudence » de l’ONU au sujet d’une intervention militaire

Cette semaine, Bamako et la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) se sont mis d’accord sur les grandes lignes d’une intervention militaire visant à reconquérir le nord du Mali, maintenant contrôlé par des groupes jihadistes à l’issue d’une conquête qui, lancée au début de cette année, a été rapide étant donné l’effondrement de l’armée malienne, sous équipée.

Pour l’organisation panafricaine, il s’agit de mettre sur pied une force, appelée la la Micema (Mission de la Cédéao au Mali) destinée à appuyer l’armée malienne dans sa phase de reconquête des territoires perdus.

La France, soutenue par d’autres pays européens comme le Royaume-Uni, envisage une participation indirecte à cette opération, notamment en fournissant des moyens logistiques. Et même si son ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, l’a réfuté, les forces spéciales françaises sont également présentes dans la région afin de former les troupes locales.

Pour que cette intervention de la Cédéao puisse avoir lieu, il faut le feu vert des Nations unies. D’où la demande faite en ce sens par le Premier ministre malien, Cheikh Modibi Diarra. « Nous sollicitons l’adoption d’une résolution du Conseil de sécurité pour la mise en place d’une force militaire internationale composée de tous ceux qui veulent et peuvent nous aider à reconquérir les territoires occupés dans le nord » a-t-il ainsi déclaré, lors d’une réunion tenue en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, le 26 septembre.

De son côté, le président français, François Hollande, a demandé que soit convoqué « au plus vite » le Conseil de sécurité de l’ONU pour examiner la requête malienne. « Quand un territoire grand comme la France est occupé par des groupes terroristes (…) alors nous sommes devant une menace qui concerne l’ensemble du monde », a-t-il déclaré.

Outre le fait que les intérêts français sont menacés dans la région, notamment par al-Qaïda au Maghreb islamique, le nord du Mali tend à devenir une sorte de « Malistan », c’est à dire un point de fixation des groupes jihadites non seulement africains mais aussi venus d’autres horizons. Et pour Paris, il y a urgence à intervenir.

Seulement, si le caractère urgent de la situation est partagé par presque tout le monde, en revanche, l’idée d’une intervention militaire internationale, même menée avec une force panafricaine, suscite des réserves.

« Toute solution militaire pour résoudre la crise sécuritaire dans le nord du Mali devrait être envisagée avec une extrême prudence. Elle pourrait avoir de graves conséquences humanitaires » a ainsi affirmé Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations unies. « Il n’y a pas de réponses faciles » a-t-il insisté.

Cela étant, et ce dernier le sait bien car ce sont les chiffres donnés en août dernier par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies, l’établissement des islamistes ainsi que la faim l’insécurité alimentaire poussé plus de 435.000 personnes à quitter le Nord-Mali pour trouver refuge dans les pays frontaliers.

En fait, ce qui suscite cette « extrême prudence » tient aux modalités de l’intervention militaire envisagée par la Cédéao, lesquelles sont jugées encore floues. Ainsi, pour le ministre belge des Affaires étrangères, ses objectifs doivent être « clairement définis ». Qui plus est, l’on ne sait pas grand chose au sujet de la composition et des capacités de la Micema.

Enfin, pour les Etats-Unis, avant toute intervention, il faudrait « rétablir l’état de droit au Mali » alors que le pays s’est doté d’institutions intérimaires suite au putsch du 22 mars dernier qui a renversé le président Amadou Amani Touré. Ce à quoi François Hollande a justement réponde que « l’on ne pouvait pas organiser des élections si le territoire était divisé et si le Nord n’était pas d’abord reconquis. »

Finalement, cette réunion aura accouché d’une souris, la seule décision prise étant la nomination par Ban Ki-moon d’un envoyé spécial de l’ONU pour le Sahel, « chargé de parachever la stratégie et de superviser sa mise en oeuvre. »

Conformément à l'article 38 de la Loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée, vous disposez d'un droit d'accès, de modification, de rectification et de suppression des données vous concernant. [Voir les règles de confidentialité]