Benghazi : L’attaque du consulat américain a-t-elle été préméditée?

Qui est le responsable de l’attaque, à Benghazi, commise le 11 septembre contre le consulat américain et au cours de laquelle l’ambassadeur des Etats-Unis en Libye, Christopher Stevens, a été tué, ainsi que trois de ses compatriotes?

D’après une source officielle citée par CNN, une roquette ou une grenade aurait été lancée à l’intérieur du consulat, ce qui a provoqué un incendie dont la fumée a asphyxié les quatre victimes.

Dès le début, il a été avancé que cette attaque avait été lancée lors d’une manifestation contre un film, qui produit aux Etats-Unis, carricature le prophète Mahomet. De telles protestations ont en effet eu lieu au même moment au Caire.

Le vice-ministre de l’Intérieur chargé de la Cyrénaïque, Wanis al-Charef, a mis en cause le service de protection du bâtiment. « La tension est montée autour du consulat quand les gardes américains ont tiré en direction des manifestants » a-t-il affirmé, en reconnaissant toutefois que « des criminels et des hommes qui cherchent à semer la sédition et à déstabiliser la situation sécuritaire se sont infiltrés parmi » ces derniers.

Et, toujours selon le vice-ministre, cela a provoqué leur colère, alors qu’ils voulaient juste « arracher le drapeau américain (…) sans avoir l’intention de prendre d’assaut le consulat. »

A Washington, l’on peine à croire à ce récit des évènements. Et comme des manifestants « pacifique » ne sont pas supposés être armés de lance-roquettes et de mortiers, des responsables américains, cités par le New York Times, pensent qu’il existe des « suggérant qu’un groupe organisé a pu attendre de profiter de la manifestation, voire la provoquer, pour couvrir son attaque. »

A y regarder de plus près, plusieurs éléments plaident pour l’hypothèse d’une action préméditée. Tout d’abord, s’en prendre au consulat américain est une opération plus compliquée qu’il n’y paraît, ce qui suppose un minimum de préparation et écarte l’idée d’un mouvement « spontané ». Ensuite, le même bâtiment avait déjà été la cible, en juin dernier, d’une attaque commise avec une bombe artisanale, déposée près de sa clotûre de sécurité.

Autre élément, qui relève peut être d’une coïncidence, la date de l’attaque correspond à celle de l’anniversaire des attentats du 11 septembre 2001, ce qui suggère une action préparée par al-Qaïda, ou du moins un groupe s’en réclamant, d’autant plus que la Cyrénaïque a été – et reste – un foyer de l’islamisme radical.

D’ailleurs, depuis quelques mois, un groupe se faisant appeler les « Brigades du cheikh Omar Abdel-Rahman » a déjà revendiqué plusieurs attaques, dont ceux ayant visé les bureaux du Comité international de la Croix Rouge à Benghazi, le 22 mai dernier.

Cette organisation, qui porte le nom du responsable du premier attentat commis contre le World Trade Center, en 1993, et qui est actuellement détenu aux Etats-Unis, est également soupçonné d’être à l’origine des meurtres d’officiers ayant servi sous le régime de Kadhafi. Le dernier en date est celui du colonel Badr Khamis al-Abidi, des forces aériennes libyennes.

« Il y a des détails encore assez flous, mais clairement on a la signature d’al-Qaïda » a affirmé Mike Rodgers, le président républicain de la commission du renseignement au Congrès, à l’antenne de CNN. « Depuis des mois on a vu al-Qaïda chercher des cibles occidentales, partout en Afrique du nord. Nous avons observé certaines activités qui nous permettent de penser aujourd’hui qu’il s’agit d’un groupe affilié à al-Qaïda » a-t-il expliqué.

Sans doute plus probant que la coïncidence avec la commémoration des attaques contre le World Trade Center et le Pentagone, l’attaque contre le consulat fait suite à la confirmation par Ayman al-Zawahiri, le chef d’al-Qaïda, de la mort de son second, Abu Yaya al-Libi, tué en juin par un drone américain au Pakistan. Or, ce dernier était, comme son nom l’indique, d’origine libyenne. L’hypothèse d’une vengeance n’est donc pas à écarter.

En attendant, Washington a pris des mesures pour protéger ses ressortissants. Un détachement de 50 militaires de la Fleet Antiterrorism Security Team, une unité du corps des Marines, a été déployé à Benghazi. Et l’US Navy va envoyer au large des côtes libyennes deux destroyers, à savoir l’USS Laboon, actuellement en escale en Crète, et l’USS McFaul. Il s’agit ainsi de se tenir prêt en cas d’éventuelles représailles.

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