La Suisse et la Suède comptent renforcer leur coopération militaire

Selon le porte-parole du département suisse de la Défense, Berne et Stockhom souhaitent renforcer leur coopération militaire. Une déclaration d’intention allant dans ce sens devrait être signée à la fin du mois, à l’occasion de la visite, dans la capitale de la Confédération, de la ministre suédoise de la Défense, Karin Enström.

Les domaines de coopération évoqués concerneront les missions de maintien de la paix, la formation des soldats et l’armement. En outre, les deux pays ont en commun la volonté d’acquérir la version E/F du Gripen; l’avion développé par le constructeur suédois Saab.

Sur ce point, les négociations portant sur l’achat par Berne de 22 Gripen E/F « auraient beaucoup progressé », après la visite en Suède d’Ueli Maurer, le conseiller fédéral suisse en charge des affaires de défense. Mais l’accord final est toujours dans la phase de négociation.

Du moins, pour le moment. Car la question du Gripen suscite toujours autant de débat en Suisse. Outre le contre-offre de Dassault Aviation, qui a proposé 18 Rafale, l’Eurofighter n’aurait pas dit son dernier mot non plus.

Selon l’édition du 3 juin du journal Der Sonntag, « l’Allemagne lance une contre-offensive, oeuvrant en coulisse de manière intensive pour l’Eurofighter depuis des mois. » Car le Gripen n’a pas bonne presse, malgré les assurances données par Ueli Maurer, qui serait, selon le titre, le seul conseiller fédéral à en vouloir.

En mai, un autre journal suisse, Le Matin, a publié une longue enquête au sujet du Gripen (à la fois précise et très bien documentée), grâce à des fuites de procès verbaux qui auraient dû rester confidentiels (et du coup, une enquête a été ouverte). Et là encore, les informations concernant l’avion suédois ne sont guère encourageantes.

Ainsi, sur les 98 modifications à apporter à la version du Gripen évaluée en Suisse en 2008, seulement 6 ont été testées en vol, le reste étant soit à l’état de prototype, soit encore sur papier. Du coup, les essais menés sur le Gripen NG Demonstrator, qui sert à valider ces modifications, ont plutôt tourné court quand une délégation suisse a fait le déplacement en Suède le 4 mai dernier.

« Malgré ce poids en moins, le pilote d’essai d’Armasuisse Bernhard Berset n’a pas réussi à dépasser Mach 1.34, selon notre informateur. Il faut dire que le réacteur, qui doit permettre à l’avion d’atteindre Mach 2.0, n’a pu être poussé qu’aux trois quarts de ses possibilités, les arrivées d’air du Gripen NG n’ayant pas encore pu être agrandies. Les contraintes auxquelles les pilotes suisses ont pu soumettre l’avion étaient limitées sur de nombreux autres points. Et les nouveaux missiles AMRAAM et IRST montés sur l’avion n’étaient en réalité que des attrapes. Les vrais missiles, eux, sont loin d’être opérationnels » a écrit Le Matin.

Et selon un compte-rendu d’audition de Gérald Levrat, l’ingénieur en chef de l’équipe d’évaluation opérationnelle des Forces aériennes, devant la sous-commission parlementaire chargée d’examiner les conditions dans lesquelles l’avion suédois a été choisi, les performances du Gripen, « y compris dans sa future version E/F, resteront en effet très moyennes ». « Un peu comme un couteau qui ne coupe pas bien. On peut couper une ficelle, mais si c’est plus dur, on y arrivera plus difficilement » a-t-il ajouté. Et pour le chef de projet de remplacement des F-5 Tiger, Jürg Weber, les » faiblesses » de l’appareil demanderaient « peut-être un changement de doctrine d’engagement ».

Et tout cela ne prend pas en compte le « risque industriel » que supposent ces 98 modifications… Quoi qu’il en soit, d’après Le Matin, le rapport de la sous-commission parlementaire, qui doit être rendu d’ici fin juin, devrait « proposer qu’une nouvelle offre soit demandée aux trois avionneurs, pour un montant fixe. Quitte à descendre en dessous du nombre de vingt-deux avions. » En tout cas, ça risque de jeter un froid quand le ministre suédois de la Défense viendra à Berne.

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