Sur fond de scandale, le ministre suédois de la Défense démissionne

Quand, en septembre 2010, le quotidien économique Dagens Industri révéla que la firme Saab Bofors Dynamics avait vendu, trois ans plus tôt et en secret, des missiles antichars BILL-2 à l’Arabie Saoudite, le gouvernement suédois s’était montré gêné. Et le Premier ministre, Fredrik Reinfeldt, s’en était défendu en prétendant ne pas être au courant de cette vente, étant donné qu’elle avait été conclue avant son arrivée aux affaires.

Le quotidien suédois avait estimé que cette vente de 21,7 millions d’euros était « politiquement délicate » dans la mesure où elle risquait de « modifier l’équilibre des forces dans une région très sensible » et mis en avant le fait qu’en cas de guerre entre Israël et le monde arabe, ces missiles étaient susceptibles d’être « utilisés contre des chars israéliens ».

L’on en était resté là jusqu’à ce que la radio publique (SR), documents confindentiels et officiels à l’appui, révèle, le 6 mars dernier, le Projet Simoom, lequel « repousse les frontières de ce qui est faisable par les autorités suédoises ».

Ainsi, selon les révélations faites par cette radio, il aurait été question de construire, via une société écran pour garantir une plus grande discrétion, une usine destinée à produire des missiles antichars en Arabie Saoudite, en collaboration avec la FOI, c’est à dire l’Agence suédoise de recherche de defense.

« Le fait qu’une autorité comme la FOI soit impliquée dans un projet d’usine d’armement pour le compte d’un gouvernement dans une dictature comme l’Arabie saoudite est assez unique » a alors souligné la SR.

Mis en cause, le ministre suédois de la Défense, Sten Tolgfors, a dans un premier temps démenti ces informations en affirmant qu’il n’y avait « aucun collaboration » entre la société écran et ses services. « Le gouvernement n’a pris aucune décision donnant à la FOI le mandant pour construire une usine de production d’armes » avait-il insisté.

Le directeur de la FOI, Jan-Olof Lind, avait quant à lui assuré qu’un tel accord n’existait pas tout en faisant valoir que les éventuelles discussions entre la Suède et l’Arabie Saoudite étaient « classifiées ».

Mais ce dernier s’est, semble-t-il ravisé, puisque, la semaine passée, il a admis, à l’issue d’ inverstigations internes, qu’il y aurait « une suspicion de crime », ce qui a conduit la justice suédoise à ouvrir une enquête préliminaire.

Du coup, le ministre de la Défense est revenu sur ses premières déclarations après avoir reconnu avoir eu connaissance du projet Simoom ainsi que de l’existence de la société écran. Toutefois, il a assuré « qu’aucune loi suédois n’avait été transgressée ». Pour autant, ces aveux n’ont pas pour autant mis un terme aux critiques des médias et de l’opposition, cette dernière allant jusqu’à exiger sa démission.

Finalement, Sten Tolgfors, qui était ministre de la Défense depuis 2007, a décidé de jeter l’éponge. Officiellement, pour des raisons familiales. « L’attention des médias ces dernières semaines a facilité et accéléré ma décision » a-t-il indiqué, ce 29 mars. « En ce qui concerne les débats de ces dernières semaines sur l’Arabie saoudite, je n’ai rien à ajouter », a-t-il ajouté.

Cela étant, cette démission ne mettra évidemment pas fin à l’affaire. « J’espère que Sten Tolgfors (…) sera interrogé par la commission constitutionnelle du Parlement pour faire la lumière sur ce qu’il s’est passé » a fait valoir Urban Ahlin, le porte-parole du Pari social-démocrate (opposition). « L’enquête et les questions concernant cette affaire vont se poursuivre (…) et c’est bien sûr une bonne chose » a pour sa part déclaré le Premier ministre suédois.

En 2011, la Suède a vendu l’équivalent de 1,56 milliard d’euros d’armement à l’étranger, avec le royaume saoudien pour second meilleur client…

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