Le coup de gueule d’un général indien

L’Inde a procédé avec succès, ce 28 mars, à un tir d’essai de son missile de croisière supersonique BrahMos, lequel serait, d’après les autorités indiennes, le « plus rapide du monde ».

Pourtant, cette nouvelle risque fort d’être éclipsé par le coup d’éclat que vient de réaliser le général Vijay Kumar Singh, le chef d’état-major des forces terrestres indiennes. A quelques mois de sa retraite, l’officier a ainsi décidé de dire ce qu’il avait sur le coeur dans un courrier adressé au Premier ministre indien.

« L’état des systèmes de combat des forces mécanisées, de l’artillerie, de la défense aérienne, de l’infanterie et des forces spéciales (…) est en effet alarmant » a estimé le général Singh dans sa lettre, qui a été publiée par la presse indienne alors qu’elle aurait dû rester confidentielle.

Selon lui, les chars manquent des munitions nécessaires, la défense aérienne est obsolète à « 97% », les troupes d’élite ne disposent pas des armes adéquates et l’infanterie est pleine de « carences » et manque de matériels pour combattre la nuit.

Un peu plus tôt cette semaine, le général Singh a déclaré, au journal The Hindu, avoir été l’objet d’une tentative de corruption via l’intermédiaire d’un industriel qui lui avait proposé un pot-de-vin pour obtenir un contrat portant sur l’achat de 600 véhicules. Bien qu’ayant rendu-compte à son ministre de tutelle, l’officier a constaté, selon ses dires, que cette affaire n’avait pas connu de suite.

Quoi qu’il en soit, afin de prendre en compte les risques de conflits avec le Pakistan et la Chine, l’Inde a considérablement augmenté ses dépenses militaires au cours de ces dernières années. Au point que ce pays représente le plus important marché pour les industriels de la défense était donné que le pays importe 70% des équipements destinés à ses forces armées.

Cela étant, le constat établi par le général Singh est déjà en partie connu. D’ailleurs, le magazine India Strategic l’a récemment souligné, de même que le journal India Today, qui, dans un article publié en octobre dernier, affirmait que les forces terrestres indiennes n’étaient pas prêtes à faire la guerre.

Pourtant, le budget indien de la défense a une nouvelle fois été annoncé en hausse (+17%) pour la prochaine année fiscale et plusieurs programmes importants et coûteux sont lancés, comme par exemplre le contrat MMRCA pour lequel Dassault Aviation est en négociation exclusive pour livrer 126 Rafale.

Et le prochain budget prévoit une augmentation de 74% des moyens accordés à la marine indienne afin d’absorber les surcoûts constatés lors de la fabrication en cours de 46 nouveaux bâtiments. En cause : la hausse du prix de l’acier en provenance de Russie. Ainsi, la remise en condition du porte-avions INS Vikramaditya (ex Amiral Gorshkov quand il était encore soviétique) a réservé de mauvaises surprises.

Qui plus est, le développement de sous-marins – dont le SNLE INS Arihant -, de missiles balistiques, d’une défense antimissile, du char Arjun ou encore de l’avion de 5e génération T-50 PAK/FA avec la Russie, l’Inde s’est focalisée sur les grands programmes d’armement. En revanche, elle a négligé, si l’on en croit le général Singh, les équipements dits de « cohérence opérationnelle », lesquels sont indispensables pour la bonne marche de l’ensemble des systèmes d’armes.

Ce problème n’est pas propre à l’Inde. En décembre 2007, le général Bruno Cuche, alors chef d’état-major de l’armée de Terre, avait fait le même constat et il s’en était ouvert dans un courrier adressé au chef d’état-major des armées (CEMA), qui était à l’époque le général Georgelin.

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