Afghanistan : Le secrétaire américain à la Défense se rapproche de la position française

A l’occasion du sommet de Lisbonne, organisé en novembre 2010, les pays membres de l’Otan impliqués militairement en Afghanistan ont convenu d’un retrait de leurs forces de ce pays avant la fin de l’année 2014, c’est à dire au terme du transfert de la responsabilité de la sécurité aux forces de sécurité afghane.

Seulement, le 27 janvier dernier, le président Sarkozy, a pris l’Otan de court en annonçant la fin de la mission de combat des troupes françaises déployées en Afghanistan en 2013. Toutefois, le locataire de l’Elysée a précisé qu’au-delà de cette date, la France maintiendra « un effectif résiduel » de l’ordre de « quelques petites centaines » d’hommes pour poursuive la tâche de former les soldats de l’armée nationale afghane.

La décision du président Sarkozy d’avancer la fin de la mission de combat des forces françaises en Afghanistan a provoqué quelques remous au sein de l’Otan, mais aussi et surtout dans quelques cercles à Washington, certains parlant de « fissure » au sein du consensus entre les pays de l’Alliance.

« Pour ce qui est de la contribution française à nos opérations en Afghanistan, laissez-moi insister sur le fait que nous étions tous d’accord au sommet de Lisbonne sur un processus de transfert des responsabilités de sécurité aux forces afghanes selon un calendrier bien défini » avait averti Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l’Otan, la veille de l’annonce du président français. Et d’ajouter : « Nous avons exposé les grandes lignes d’un plan d’action et il est important pour le succès de nos opérations de maintenir notre engagement envers ce plan ».

Un ancien haut responsable du Pentagone pour les questions européennes entre 2001 et 2005, Ian Brzezinski, a été plus sévère encore. « Ce n’est pas la première fois qu’un allié dit qu’il en a assez et veut retirer ses troupes, mais le faire après un incident tragique, soudainement, c’est un peu hisser le drapeau blanc » a-t-il déclaré lors d’une conférence du très influent Atlantic Council. « Dire non seulement on s’en va, mais appeler tout le monde à faire de même plus tôt que prévu est simplement stupéfiant » a-t-il ajouté.

Est-ce à dire que Paris aurait, par la décision d’accélérer le calendrier de retrait de ses troupes d’Afghanistan, perdu sa crédibilité auprès de ses partenaires? Pas forcément, si l’on en croit les récentes déclarations de Leon Panetta, le secrétaire américain à la Défense.

En effet, le chef du Pentagone se pose lui aussi la question de savoir s’il ne vaudrait pas mieux accélérer le mouvement en Afghanistan, c’est à dire passer d’une mission de combat à des tâches de formation et de soutien à l’armée afghane dès la mi-2013 et non plus à la fin de l’année 2014.

« On peut espérer que vers la mi-2013 et dans la deuxième partie de l’année, nous pourrons passer d’un rôle de combat à un rôle d’entraînement et d’assistance » a-t-il déclaré le 1er février, à bord d’un avion l’amenant à Bruxelles pour assister à une réunion des ministres de la Défense de l’Otan.

« Nous y sommes allés ensemble et nous sortirons ensemble, mais nous devons le faire sur la base d’une alliance puissante et de l’engagement fort pris à Lisbonne », a-t-il précisé. En clair, il s’agit pour les pays membre de la coalition internationale déployée en Afghanistan de se coordonner, alors que, selon lui, les progrès de la coalition contre les taliban et la monté en puissance de l’armée afghane doivent « être consolidés cette année » et que 2013 sera « cruciale » étant donné que l’on entrera dans la dernière phase – délicate – du processus de transition.

Par ailleurs, Leon Panetta a déclaré comprendre la position de la France et s’est dit satisfait de la décision de cette dernière visant à maintenir un contingent d’instructeur après 2013. Pour autant, est-ce que le patron du Pentagone est sur la même ligne que le président français?

Selon un important responsable américain de la défense, cité anonymement par l’AFP, il n’y aurait « peut-être pas de différence fondamentale entre la position française et celle de l’Otan » et qu’il « s’agit peut-être de la description en termes différents des étapes du processus qui nous mène à la fin 2014 ». Et de préciser que les Etats-Unis veulent « savoir ce que les Français ont en tête, quel rôle ils envisagent en 2013 et en 2014 ».

Quoi qu’il en soit, l’évocation de la fin des missions de combat dès 2013 par Leon Panetta constitue une évolution majeure, même s’il reste à se mettre d’accord sur les modalités concernant les missions de formation de l’armée afghane. Il ne reste plus qu’aux pays membres de l’Otan à se mettre d’accord pour infléchir la stratégie élaborée à Lisbonne en 2010. Et compte tenu que l’heure est à la recherche d’économie pour la plupart d’entre eux, il est à parier que le calendrier de retrait d’Afghanistan sera avancé.

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