Méprise de l’aviation turque près de la frontière avec le Kurdistan irakien

Au cours de l’été dernier, l’armée turque a repris ses opérations contre les positions occupées au Kurdistan irakien par le PKK, le parti séparatiste kurde par ailleurs considéré comme étant un mouvement terroriste par les Etats-Unis, ce qui permet à ces derniers d’apporter une aide à Ankara en matière de renseignement pour le combattre.

Ces opérations au Kurdistan irakien ont été décidées après plusieurs incidents au cours desquels une quarantaine de membres des forces de sécurité turques ont été tués par des activistes appartenant au PKK.

Jusqu’en septembre dernier, les frappes aériennes réalisées par l’aviation turque auraient « neutralisé » environ 260 membres du parti séparatiste kurde, qui compte près de 2.000 membres repliés au Kurdistan irakien, territoire à partir duquel ils mènent leurs actions en Turquie. Le Premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a prévenu : « Ceux qui ne s’écartent pas du terrorisme en paieront le prix ».

C’est donc dans ce contexte qu’une nouvelle frappe aérienne a été effectuée par des avions F-16, dans la nuit du 28 au 29 décembre, près de la localité d’Ortasu, située dans la sud-est de la Turquie et proche de la frontière avec le Kurdistan irakien.

Selon l’armée turque, des gardes-frontières avaient été placés en alerte sur la foi d’informations des services de renseignement, annonçant une attaque imminente du PKK. L’attaque a été lancée après que des drones ont repéré un groupe d’une quarantaine d’individus allant d’Irak vers la Turquie. Et 35 d’entre eux ont été tués.

Seulement, les personnes bombardées n’étaient pas des séparatistes kurdes… « Ces gens n’étaient pas des terroristes, mais faisaient de la contrebande » a admis Huseyin Celik, le vice-président du parti de la Justice et du Développement (AKP), le parti au pouvoir à Ankara.

« La plupart des victimes étaient des jeunes âgés de moins de 30 ans. Certains étaient des fils de villageois qui ont aidé les forces turques dans leur combat contre les séparatistes kurdes du PKK » a-t-il encore ajouté. « S’il y a eu une erreur, une faute, elle ne sera pas escamotée, et le nécessaire sera fait » a-t-il prévenu, tout en indiquant que cela ne remettrait pas en cause « la détermination de l’Etat » contre la rébellion kurde.

« Le résultat est malheureusement malencontreux et affligeant » a commenté Recep Tayyip Erdogan, qui a présenté ses condoléances aux proches des victimes. « Selon les images, un groupe de 40 personnes se trouvait dans la zone. Impossible de dire qui elles sont (…) Après, il a été déterminé qu’il s’agissait de contrebandiers transportant des cigarettes, du carburant à dos de mule » a-t-il expliqué. Et à l’intention de la presse turque, qui n’a pas ménagé ses critiques, il a déclaré qu' »aucun Etat ne bombarde son peuple délibérément ».

En attendant, cette bavure a, comme l’on pouvait s’y attendre, provoqué la colère des Kurdes. Plusieurs manifestations ont eu lieu à Istanbul, des villes du sud-est anatolien et même au Kurdistan irakien où le drapeau turc a été brûlé, à Erbil.

Et le PKK souffle sur les braises. « Nous appelons le peuple du Kurdistan (…) à réagir contre ce massacre et à demander des compter à ses auteurs en se soulevant », a ainsi déclaré, par voie de communiqué, un des cadres du mouvement séparatiste.

Depuis 1984, année à partir de laquelle le PKK apris les armes, le conflit avec Ankara a fait au moins 45.000 morts.

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