Libye : La progression des rebelles confirmée par l’Etat-major des armées

Voilà trois mois que les opérations militaires ont été lancées en Libye afin d’instaurer une zone d’exclusion aérienne et de protéger les civils de la répression des forces du colonel Kadhafi. Un trimestre donc… et le « canard est toujours vivant », pour citer Robert Lamoureux, bien que le but, non officiellement avoué, est la chute du régime du guide libyen, laquelle mettrait un terme à la campagne actuellement menée par l’Otan.

Cette capacité à durer du colonel Kadhafi a suscité quelques signes d’impatience et des doutes au sujet de la capacité de l’Otan à continuer ses opérations, que soit aux Etats-Unis, en Italie, où les députés se sont mis d’accord sur une « guerre à durée déterminée », voire en Norvège, où il a été décidé de retirer les moyens militaires engagés d’ici au 1er août.

Une prolongation des opérations préoccupe également les responsables militaires, qui craignent de voir s’épuiser le potentiel de leurs forces.

« Nous consommons de façon intensive un potentiel qui devait l’être progressivement. La question qui me préoccupe c’est de savoir, quand nous aurons consommé le potentiel, comment le régénérer » a ainsi fait valoir l’amiral Forissier, le chef d’état-major de la Marine nationale. « On va avoir une période où il faudrait que les opérations passent au second plan et que la priorité redevienne la régénération » a-t-il également affirmé. Cela pourrait se traduire par l’impossibilité d’engager à nouveau le porte-avions Charles de Gaulle en cas de crise grave l’an prochain.

Outre-Manche, l’amiral Mark Stanhope a exprimé les mêmes inquétudes. « Combien de temps pourrons-nous rester dans la situation où nous nous trouvons actuellement en Libye? » s’est-il demandé cette semaine, après avoir estimé que le Royaume-Uni devrait revoir ses priorités en matière de défense dans le cas où les opérations dureraient 6 mois de plus et déploré – une fois de plus – la perte de capacité aéronavale de la Royal Navy.

Interrogé, le 16 juin, au sujet des opérations en cours, le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Elrick Irastorza, est quasiment sur la même longueur d’onde que son homologue marin. « La durée, c’est du potentiel. Est-ce qu’on aura la capacité à régénérer le potentiel ? Dans l’immédiat, au niveau d’engagement qui est le nôtre, on peut durer » a-t-il déclaré.

Pour le commandant supême allié pour la transformation, le général français (air) Stéphane Abrial, « la question des ressources deviendra critique » si jamais les « opérations durent plus longtemps ».

Quoi qu’il en soit, la situation sur le terrain évolue. Même si les rebelles ont subi des pertes dans le secteur de Brega, dans l’est du pays, ils ont cependant progressé à l’ouest de Tripoli. « Les forces d’opposition semblent avoir l’ascendant sur les forces de Kadhafi, ce qui traduit bien l’attrition que ces dernières subissent actuellement » a indiqué le colonel Thierry Burkhard, le porte-parole de l’Etat-major des armées à Paris.

Les avancées des insurgés se font « essentiellement dans l’ouest, sur la ceinture qu’ils sont en train de développer autour de la région de Tripoli » a-t-il précisé. « On n’a pas de troupes au sol donc c’est assez difficile d’avoir une vision exacte de la situation », a-t-il toutefois reconnu.

Ainsi, la rébellion a pris le contrôle de trois bourgades situées sur la route de Tripoli (Zawit al-Bagoul, al-Lawanya et Ghanymma) et progressent vers Yefren, afin de faire une jonction avec Zenten, qui est sous son contrôle. Ces deux localités sont localisées au sud-ouest de la capitale libyenne, à environ 80 km.

Par ailleurs, dans le cadre de l’opération Unified Protector, les avions et les hélicoptères français ont effectué, du 9 au 16 juin, plus de 250 sorties (soit 30 de plus par rapport à la semaine précédente) dont 146 ont eu pour objet des attaques au sol, lesquelles ont permis de détruire une soixantaine d’objectifs (20 bâtiments et plus de 40 véhicules militaires, notamment dans les régions de Misrata, Tripoli et Brega).

Les hélicoptères Gazelle et Tigre embarqués à bord du Bâtiment de Projection et de Commandement (BPC) Tonnerre, ont été engagés à 6 reprises. Selon l’Otan, l’une de ces missions a concerné le secteur de Zlitan, le 13 juin dernier, et visé des défenses antiaériennes, des véhicules ainsi que des bateaux.

Enfin, le dispositif de la Marine nationale a connu quelques changements, avec l’arrivée de la frégate de défense aérienne Chevalier Paul, dont c’est le premier déploiement opérationnel depuis sa mise en service prononcée le 10 juin, au sein de la Task Force 473 (autrement dit, le groupe aéronaval). Ce mouvement permet à la frégate antiaérienne Jean Bart de relever l’aviso Le Henaff, qui faisait jusqu’alors partie de la force navale de l’opération Unified Protector.

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