Un retrait des troupes françaises d’Afghanistan avant 2014?

La mort d’Oussama ben Laden, le chef d’al-Qaïda, lors d’une opération américaine au Pakistan, va-t-elle avoir des conséquences sur l’engagement militaire de la France en Afghanistan?

Si l’on en croit les déclarations faites ce 4 mai à l’antenne de France 24 par Alain Juppé, le ministre des Affaires étrangères, on pourrait le supposer. A la question de savoir si les troupes françaises déployées actuellement en Afghanistan pourraient commencer leur retrait avant la date butoir fixée lors du sommet de l’Otan en novembre dernier, patron du Quai d’Orsay, a répondu que « c’est l’une des options auxquelles nous allons réfléchir. Bien sûr. » Et de préciser que les Etats-Unis « y réfléchissent aussi, d’ailleurs ».

La veille, Alain Juppé avait déclaré devant les députés que a France allait « prendre le temps de la réflexion, de l’analyse pour voir les conséquences à tirer sur les prochains mois de ce qui vient de se passer ».

Toutefois, si la décision de se désengager militairement du théâtre afghan est prise, le retrait du contingent français, principalement déployé en Surobi et en Kapisa, ne se ferait pas du jour au lendemain.

« Nous y réfléchissons avec nos alliés et avec tous ceux qui sont sur le terrain. Nous n’avons pas vocation a rester indéfiniment en Afghanistan. Le président de la République l’a dit à plusieurs reprises. Il y a une période de transition » a expliqué le ministre des Affaires étrangères lors de son intervention sur France 24. Selon lui, un retrait « rapide » et « immédiat » serait de nature à « complètement déstabiliser la situation ».

Comme l’a rappelé Alain Juppé, la mission de l’Otan dans le pays est « d’aider le gouvernement afghan à établir son autorité sur l’ensemble du territoire de l’Afghanistan et à assurer la paix et la démocratie à sa population ». Et de constater que « Malheureusement, le résultat aujourd’hui n’est pas encore atteint ». « Est-ce que la mort de Ben Laden va nous permettre de progresser, je l’espère », a-t-il encore déclaré.

Cela étant, la disparition du chef terroriste aurait un impact direct sur la situation afghane si al-Qaïda y jouait un rôle central dans l’insurrection qui agite le pays. Or, ce n’est pas le cas, même si des liens ont été établis par le passé avec cette organisation par les différents mouvements qui combattent en Afghanistan.

Le réseau Haqqani, le Hezb-e-Islami de Gubbuldin Hekmatyar, le mouvement taleb du mollah Omar ou encore le Lashkar-e-Taïba, le groupe terroriste pakistanais dont la présence en Afghanistan s’est renforcée, selon le New York Times, partagent en grande partie l’idéologie d’al-Qaïda sans pour autant avoir les mêmes objectifs. D’ailleurs, la présence de l’organisation fondée par ben Laden sur le territoire afghan a été considérablement amoindrie, l’estimation d’une cinquantaine d’hommes étant généralement avancée.

En fait, c’est par le Pakistan que passe la solution au problème afghan. Si la disparition d’Oussama ben Laden peut avoir une conséquence, c’est sur la politique menée par Islamabad. Le fait que le chef d’al-Qaïda ait été retrouvé dans un complexe non loin de la capitale pakistanaise met le pays entre le marteau et l’enclume.

Le 3 mai, Alain Juppé a dénoncé le « manque de clarté » d’Islamabad. En visite à Paris, le Premier ministre pakistanais a parlé d’un « échec » de ses services de renseignement. Le chef de la diplomatie française s’est contenté de cette explication. « Dont acte » a-t-il dit. « En tout cas, je crois qu’il faut éviter tout antagonisme avec le Pakistan, c’est un grand pays, nous avons tout intérêt à avoir de bonnes relations avec lui, il faut qu’il coopère » a-t-il estimé.

« J’espère que ce sera un tournant favorable, dans la bonne direction, le Premier ministre pakistanais hier m’a assuré de sa volonté de coopération » a encore affirmé Alain Juppé. En tout cas, la pression pour qu’Islamabad s’en prenne (enfin) aux groupes rebelles afghans qui trouvent refuge sur son territoire risque d’être très forte dans les semaines à venir.

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