Pour Serge Dassault, l’euro fort est un obstacle à la vente du Rafale

Selon le Pdg de Dassault Aviation, Charles Edelstenne, au moins 8 pays s’intéressent actuellement au Rafale, l’avion de combat multirôles français qui n’a pas encore trouvé preneur à l’étranger.

Plusieurs raisons ont été avancées pour expliquer les échecs successifs de cet appareil à l’exportation. Certaines sont sujettes à caution, comme celle défendue dans les colonnes de l’Expansion par l’économiste Elie Cohen. « C’est un appareil très cher et qui a été conçu pour répondre aux spécificités de l’armée française, ce qui le rend peu exportable » a-t-il affirmé, oubliant, sans doute, que c’est le cas de tous les nouveaux avions de combat…

Pour Serge Dassault, le président d’honneur du constructeur aéronautique, la politique commerciale agressive américaine est l’une des causes des mésaventures du Rafale. « On a quand même un ennemi politique qui est les Etats-Unis, qui fait tout pour qu’on ne vende rien nulle part, qui baisse les prix » a-t-il affirmé à l’antenne de la chaîne d’information I-télé, le 13 février.

Pour prendre le cas du Brésil, où Dassault, Saab et Boeing se livrent à une féroce compétition pour ventre 36 avions de combat, Washington fait miroiter à Brasilia l’achat d’une centaine, voire même plus, de Super Tucano ainsi que la participation au programme d’avion de transport militaire KC-390 du constructeur brésilien Embraer et des transferts de technologie dans le cas où le F-18 Super Hornet serait choisi au détriment du Rafale et du Gripen.

Mais Serge Dassault a reconnu que le prix du Rafale est trop élevé. « On vend plus cher que les Américains de 30% » a-t-il affirmé. Non parce que l’avion français est trop moderne comme l’avait dit Hervé Morin, en septembre 2007, alors qu’il était ministre de la Défense, mais à cause des taux de changes.

« On a un problème, c’est qu’on vend en euro, et si on vend en euro, on vend plus cher qu’en dollar » a-t-il expliqué. « Donc, c’est très difficile. On a le meilleur avion du monde, le Rafale, on a un bon système d’armes et on a des discussions. Ca va venir » a-t-il ajouté.

Le problème de l’industrie aéronautique européenne est que les coûts de production sont libellés en euros alors que les ventes des avions qui sortent de ses chaînes sont facturées en dollars.

Cela étant, l’euro fort est aussi un handicap pour Airbus, ce qui n’a pas empêché ce dernier de rivaliser avec Boeing, voire même de le dépasser en termes de commandes et de livraisons, au cours de ces dernières années.

Cependant, les contrats d’armement ont, par nature, une dimension politique. Et c’est justement là où le bât blesse pour le Rafale. Il a été ainsi dit, toujours pour le cas du contrat brésilien, que Brasilia chercherait à peser sur Paris pour obtenir des concessions dans le domaine agricole, dans le cadre des négociations portant sur le libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur.

Même chose pour ce qui concerne les négociations portant sur la vente de 60 Rafale aux Emirats arabes Unis. D’autres enjeux ont été mêlés aux discussions, comme la demande faite à Paris d’accorder des vols supplémentaires aux compagnies aériennes émiraties (Emirates et Etihad Airways). Ce qui a été récemment fait. Et en échange, la France pourrait vendre, outre son avion de combat, une centaine d’Airbus et obtenir un contrat d’approvisionnement en uranium pour Areva.

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