Des initiatives pour que l’Etat garde l’Hôtel de la Marine

Actuellement, l’état-major de la Marine nationale occupe l’Hôtel de la Marine, un somptueux bâtiment, jumeau de l’Hôtel Crillon, situé place de la Concorde à Paris. Seulement, comme il est prévu que les emprises parisiennes du ministère de la Défense – à l’exception des Invalides et de l’Ecole Militaire – soient transférées sur le site de Balard, dans le XVème arrondissement, l’avenir de ce superbe bâtiment construit par l’architecte Jacques-Ange Gabriel au XVIIIème siècle inquiète les amoureux du patrimoine.

Monument classé, l’Hôtel de la Marine, qui a été auparavant le Garde-Meubles de la Couronne avant la Révolution française, devrait être confié à un opérateur privé à l’issue d’un appel à projets lancé le 24 novembre dernier par le ministère de la Défense. L’Etat ne vendra donc pas ce bâtiment mais ce sera finalement tout comme si c’était le cas puisqu’il s’agit d’accorder un bail emphytéotique, c’est à dire de très longue durée, au candidat qui aura été sélectionné par une commission formée par les trois ministères concernés (Défense, Culture, Budget).

Pour l’instant, un seul projet est officiellement en lice. Et sa nature est loin de rassurer les « défenseurs » de l’Hôtel de la Marine puisque son promoteur, l’homme d’affaires Alexandre Allard, soutenu par l’ancien ministre de la Culture, Renaud Donnedieu de Vabres, compte en faire un hôtel de luxe doté d’une piscine et y installer des galeries d’art. Cela dit, il y a de quoi faire : le bâtiment compte 500 pièces, deux cours et un sous-sol.

Bien avant que ce projet soit connu, l’association, appelée « Les amis de l’Hôtel de la Marine » a été créée. Présidée par Olivier de Rohan, cette structure appelle à signer une lettre adressée au Premier ministre, l’invitant à « conserver l’Hôtel de la Marine dans son intégrité en lui maintenant une vocation éminente au service de la Nation », ainsi qu’une pétition, paraphée par l’ancien président de la République, Valéry Giscard d’Estaing, alors qu’il ne fait jamais ce genre d’action.

« J’ai signé la pétition lancée par Olivier de Rohan-Chabot pour que l’Etat garde ce monument. En effet, si nous pouvons comprendre que l’Etat soit conduit à se défaire de bâtiments dont il n’a plus l’usage et dont l’entretien constitue de trop lourdes charges, il doit cependant, auparavant, prendre en compte l’intérêt patrimonial du bâtiment » a expliqué VGE lors d’un entretien accordé à Paris Match, en avril dernier.

Dernière initiative en date, l’appel de plusieurs intellectuels (dont Régis Debray, Jacques Le Goff, Pierre Nora, Jean-Noël Jeanneney) publié par Le Monde afin que l’Etat ne « brade » pas un « lieu chargé d’histoire ».

Les signataires de ce document suggèrent que l’Hôtel de la Marine pourrait accueillir le futur musée de l’Histoire de France, au lieu de connaître le destin qui semble lui être promis.

«Quiconque éprouve encore un minimum de respect pour le passé national, pour les pierre chargées de symboles et d’une histoire qui touche tous les Français, ne peut qu’être révulsé à l’idée que l’Hôtel de la Marine soit alloué le 17 janvier (demain!) sans protestation aucune, affermé, disons le mot aliéné à un groupe financier international Alexandre Allard pour, derrière la façade inchangée, en faire un Barnum commercial assorti de suites de luxe», affirment-ils dans cet appel adressé au président de la République. Et les signataires ne ménagent pas Renaud Donnedieu de Vabres : Et que ce soit un ancien ministre de la Culture, qui, devenu salarié d’un ‘rénovateur’ d’hôtels, facilite auprès des politiques la réalisation juteuse d’un projet si évidemment contraire à l’intérêt général, cela lève le coeur ».

D’après le Figaro, le ministre de la Défense, Alain Juppé, qui a hérité du dossier, ne serait pas favorable à ce que l’Hôtel de la Marine soit confié à un opérateur privé. Il en serait même « gêné », selon son entourage.

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