Radiographie des militaires français

Cela faisait près de 9 ans qu’il n’y avait pas eu de grande enquête sociologique sur la communauté militaire. Aussi, la Direction des ressources humaines du ministère de la Défense (DRH-MD) y a remédié en demandant à deux sociologues de mener une vaste étude sur ce sujet.

Dans les grandes lignes, le rapport qui a été rendu public confirme ce dont on pouvait se douter. L’âge moyen des militaires est relativement jeune : 59% d’entre eux ont moins de 35 ans. La moyenne d’âge de l’armée de Terre et de la Marine est la plus faible, avec 32 ans.

Il est à noter que le taux de féminisation des armées a progressé de 6% par rapport à 2001. Les personnels féminins représentent 15% des effectifs en 2009, contre 9% huit ans plus tôt. En proportion, c’est le Service de santé des armées (SSA) qui compte le plus de femmes (50%), suivi par l’armée de l’Air (21%), la gendarmerie (14%) la Marine nationale (12%) et l’armée de Terre (10%).

Autre évidence : seulement 35% des militaires sont propriétaires, contre 55% pour l’ensemble des Français. Cela s’explique en grande partie par la « mobilité géographique ». Cependant, les auteurs de l’étude ont remarqué que ce taux a fortement augmenté depuis 2001. Les mesures gouvernementales en faveur de l’accession à la propriété peuvent être un élément d’explication.

Souvent, pour un militaire en couple, être propriétaire veut souvent dire « célibat géographique ». Ils sont 10% à connaître cette situation, qui peut être également causée par le fait que leur conjoint a un emploi. A ce sujet, l’étude note le fait que « la mobilité géographique influe sur l’activité professionnelle, mais uniquement celle des conjoints féminins : plus l’ancienneté de l’affectation du militaire dans son poste actuel est importante, plus souvent le conjoint occupe un emploi et moins souvent il est au chômage ou inactif. »

Toujours selon ce rapport, 75% des militaires ont une vie de couple et cette proportion augmente avec l’âge pour se stabiliser autour de 85% à 35 ans. De même que le nombre de militaires ayant des enfants. Près de 55% d’entre eux sont dans ce cas.

Ce taux augmente aussi avec l’âge. « A partir de 45 ans, plus de neuf militaires sur dix sont pères de famille et huit femmes militaires sur dix sont mère » affirme l’étude. Et un tiers des militaires de plus de 40 ans ont une famille nombreuse.

La part des naissances « hors-mariage » est de 32%, contre 50% pour l’ensemble de la population civile. Près de deux tiers des militaires en couple sont d’ailleurs mariés. Le modèle familiale dominant est formé des deux conjoints et des enfants.

Les familles monoparentales représentent 3% du total alors que le taux est de 7% au niveau national. Cette différence a une explication : cette situation concerne le plus souvent des femmes âgées d’au moins 35 ans et elles seraient peu nombreuses au sein des armées.

Quant à la composition hiérarchique des armées, le corps des sous-officiers est le mieux représenté, avec 59% des effectifs. Viennent ensuite les militaires du rang (29%) et les officiers (12%). Là encore, il existe disparités.

L’armée de Terre emploie le plus de militaires du rang (49%), ce qui s’explique par son besoin d’avoir des soldats jeunes étant donné qu’un grenadier-voltigeur sera toujours en meilleure forme à 20 ans qu’à 45 ans. Les sous-officiers sont les plus nombreux au sein de la gendarmerie (80%), de la Marine nationale (67%) et de l’armée de l’Air (60%).

De là, la répartition des soldes ne constitue par une surprise. Ainsi, 33% des militaires gagnent mensuellement moins de 1.500 euros. Seulement 9% ont un salaire supérieur à 3.000 euros. Un quart d’entre eux touchent entre 1.500 et 1.999 euros par mois, 23% entre 2.000 et 2.499 euros et, enfin, 10% entre 2.500 et 2.999 euros.

Les données concernant l’origine des militaires devraient intéresser plus particulièrement les recruteurs. Ainsi, 50% des engagés sont issus d’une famille nombreuse et un tiers d’entre eux ont un parent qui porte (ou a porté) l’uniforme, voire un père militaire (21%). Plus généralement, 35% sont des enfants d’ouvriers et 26% de cadres moyens ou d’un père exerçant une profession intermédiaire.

Globalement, ceux qui choisissent la carrière des armes sont motivés. Ainsi, 52% des militaires se sont engagés dès leur sortie du système éducatif. Cette tendance est plus marquée quand il s’agit de viser une catégorie hiérarchique plus élevée (concours d’école d’officiers ou de sous-officiers). Et 30% d’entre eux ont quitté un emploi avant d’aller sous les drapeaux. Seulement 15% ont choisi cette carrière parce qu’ils étaient au chômage. La motivation des 3% restants est cependant plus difficile à évaluer.

Au-delà de tous ces chiffres, le plus intéressant reste les commentaires libres que 1369 militaires sur les 7993 sollicités pour cette enquête ont écrits sur les formulaires qu’ils ont renvoyés. Sur ce total, 940 messages ont été retenus et analysés. Généralement, ils portent sur des problèmes liés à la mobilité et à la famille (31%), la rémunération (23%) et le logement (19%). Enfin 13% d’entre eux ont fait part de leur amertume et leur déception au sujet de leur condition militaire et exprimé un « sentiment d’usure et de découragement ».

Ainsi, l’étude affirme qu’un « certain nombre de militaires souffrent des restrictions budgétaires programmées. L’inadéquation entre les tâches demandées et les moyens octroyés ainsi que l’état du matériel et la réduction des effectifs entraînent difficulté à remplir la mission et dégradation des conditions de travail. ». Et les auteurs du rapport d’avertir : « cette situation a un effet néfaste sur le moral et peut conduire à une démotivation ». Et les difficultés rencontrées par des sous-officiers et des militaires du rang pour boucler leurs fins de mois ainsi que les autres problèmes évoqués dans cette partie « commentaires » n’arrangeront certainement pas les choses.

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