WikiLeaks enfonce des portes ouvertes

Ainsi, le site WikiLeaks a mis en ligne près de 400.000 documents « confidentiels » portant sur la guerre en Irak. Mais il apparaît qu’il s’agit surtout d’une opération médiatique servant de prétexte à son fondateur, l’australien Julian Assange, de faire parler de lui.

Présenté par le quotidien Le Monde (qui a eu la primeur des fuites) comme étant un hacker et un journaliste, le fondateur de WikiLeaks n’est rien de tout cela : il n’a pas piraté les serveurs du Pentagone pour récupérer les rapports qu’il a diffusés et le fait de jeter en pâture des milliers de documents, fussent-ils estampillés « confidentiels » ne fait pas de vous un journaliste, dont le métier est de vérifier, d’analyser et de mettre en perspective l’information. Et non, Julian Assange n’est pas le « chevalier blanc » qu’il prétend être. Juste un enfonceur de portes ouvertes.

Les documents diffusés par WikiLeaks n’apprennent rien de nouveau sur le conflit irakien. Tout comme le même type d’opération qui avait concerné l’Afghanistan l’été dernier. Ils permettent simplement de se rendre compte de la réalité d’une guerre, qui, comme toutes les autres, n’est pas « propre ». Et cela, même une candidate pour Miss France sait que « la guerre, c’est mal ».

« The Iraq Warlogs » ne fait donc que confirmer ce que l’on sait déjà. Comme, par exemple, le soutien de l’Iran à des groupes armés chiites : des rapports du Pentagone, dont il a été fait état sur ce blog, l’ont déjà mis en évidence. Ou encore les cas de tortures, qu’ils soient le fait des troupes de la coalition (au nombre de 300) ou des forces de sécurité irakiennes. A ce propos, il est étonnant de reprocher à l’armée américaine d’avoir « occupé l’Irak » et, dans le même temps, de lui tenir grief d’avoir fermé les yeux sur les méthodes d’interrogatoire de son homologue irakienne. Reste que le scandale d’Abou Ghraib n’a pas attendu WikiLeaks pour être mis sur la place publique et que des soldats américains, impliqués dans des exactions, sont passés devant une cour martiale.

Les agissements de certaines sociétés militaires privées sont pointés du doigt, en raison de la gâchette facile de leurs employés. Là encore, cela n’est pas une nouveauté et le cas de Blackwater, aujourd’hui Xe Services, reste emblématique de ces dérives.

Quant au nombre des victimes civiles, la fuite de WikiLeaks permet de conclure deux choses (et c’est sans doute son seul intérêt) : l’administration américaine l’a minimisé et  d’autres sources l’ont largement surestimé.

Ainsi, de janvier 2004 à décembre 2009, l’analyse des documents effectués par la presse montre qu 109.032 personnes ont été tuées (membres de la coalition compris), dont 66.061 civils irakiens. Ne sont donc pas comptabilisées les victimes à partir du déclenchement de l’opération Iraqi Freedom en mars 2003.

Quoi qu’il en soit, ce bilan est loin de celui avancé par The Lancet (655.000 morts de 2003 à 2006) ou de l’institut britannique « Opinion Research Business » (1.220.580 morts sur la même période). Travaillant sur la base des informations données par la presse et les communiqués officiels, l’ONG Iraqi Body Count avait estimé qu’entre 98.252 et 107.369 Irakiens avaient perdu la vie entre avril 2003 et octobre 2010. Là encore, WikiLeaks apporte donc une précision supplémentaire, sans pour autant apporter de « scoop ».

Sur les 109.132 morts recensés par l’analyse des documents publiés par WikiLeaks, l’on trouve 31.780 victimes de bombes artisanales, posés par les insurgés et 34.814 autres ont été tués lors de violences « sectaires ». Cela montre que la population irakienne a été prise pour cible par « l’insurrection », comprendre les groupes terroristes.

C’est d’ailleurs cela qui a poussé des Irakiens à prendre les armes pour combattre al-Qaïda aux côtés de l’armée américaine, au sein des milices Sahwas. Et, avec les renforts américains envoyés en Irak à partir de janvier 2007, c’est ce qui a permis de réduire considérablement le niveau de la violence dans le pays, sans toutefois l’éradiquer complètement.

De fait, et étant donné l’importance de se soulèvement de miliciens sunnites contre les exactions d’al-Qaïda dans la suite des évènements, il est étonnant que les commentaires qui ont été faits au sujet du coup médiatique de WikiLeaks ne les évoquent à peine, si ce n’est pas du tout. Pourtant, les attaques des groupes insurgés contre les troupes de la coalition représentent tout de même le quart des documents rendus publics.

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