Forte tension dans la péninsule coréenne

Le 20 avril dernier, deux ressortissants nord-coréens ont été interpellés par la police sud-coréenne. Se faisant passer pour des réfugiés, ils avaient en fait l’intention d’assassiner un opposant au régime de Pyongyang, en la personnne de Hwang Jang-yop, 87 ans, qui fut pourtant le théoricien de la doctrine de l’autosuffisance en vigueur en Corée du Nord, avant de faire défection en 1997.

Pour son passage au Sud, Hwang Jang-yop est régulièrement l’objet de menaces de mort, au point qu’il a été placé dans une résidence surveillée pour le protéger. Quant aux deux hommes, si l’on en croit la police sud-coréenne, ils s’étaient d’abord rendu en Chine à la fin de l’année dernière, puis en Thaïlande avant de passer en Corée du Sud pour accomplir leur mission.

En fait, cette affaire n’est qu’un épisode de la tension croissante entre les deux frères ennemis de la péninsule, que l’on peut observer depuis le nauvrage de la corvette sud-coréenne Cheonan, le 26 mars dernier, à deux kilomètres de l’île de Baengnyeong, non loin des côtes nord-coréennes, en mer Jaune.

Cette situation suscite d’ailleurs l’inquiétude à Washington, qui dispose d’un contingent de 28.000 hommes en Corée du Sud. « J’espère qu’on ne parle pas de guerre, qu’il n’y a aucune action ou erreur qui risque de provoquer une réaction qui conduirait à un conflit » a ainsi déclaré Hillary Clinton, la secrétaire d’Etat américaine, lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays de l’Otan à Tallinn, le 23 avril dernier.

La question de la perte de la corvette Cheonan (46 tués), qui a ému la Corée du Sud, est susceptible d’être l’étincelle que redoute Mme Clinton. En effet, les militaires sud-coréens ont accusé la marine du nord d’en être responsable.

Après avoir avancé l’hypothèse d’une mine soviétique datant de la guerre de Corée pour expliquer le naufrage, il semblerait désormais que la corvette a été envoyée par le fonds à cause d’une explosion d’une force de 200 kilogrammes de TNT qui s’est produite sous le navire. C’est en tout les cas la piste retenue par l’armée sud-coréenne, après avoir étudié la poupe et la proue du bâtiment, qui ont pu être remontées à la surface la semaine passée.

Ces constatations vont dans le sens des informations publiées dès la fin mars par la presse de Séoul et selon lesquelles les services de renseignement sud-coréens et américains auraient repéré les mouvements d’un sous-marin venu de la base navale nord-coréenne de Sagot, à une cinquantaine de kilomètres de l’île de Baengnyeong. Le submersible aurait disparu quelques jours avant le naufrage de la corvette. Pour autant, cet élément de permet pas de conclusion définitive : les sous-marins du nord ont l’habitude de ce genre de manoeuvre.

Reste que la thèse d’une agression contre le Cheonan – le président sud-coréen Lee Myung-bak a parlé « d’agresseurs » – alimente la rumeur. Ainsi, le 21 avril dernier, un activiste du sud, Choi Sung-Yong, a affirmé savoir que des militaires nord-coréens pensaient que la corvette a été coulée lors d’une opération militaire préméditée par Pyongyang.

Même si le gouvernement sud-coréen prend toutes les précautions oratoires pour ne pas accuser directement le régime communiste du nord, il n’en demeure pas moins que ce dernier se sent visé. En représailles, Pyongyang a annoncé la saisie de biens immobiliers d’un site touristique situé sur son territoire et appartenant à des investisseurs sud-coréens. « La situation a atteint une phase si extrême que nous sommes à un point crucial entre la paix et la guerre » a justifié l’agence nord-coréenne chargée du tourisme.

Mais cette décision peut paraître anecdotique comparée à l’annonce faite par le général Ri Yong-Ho, le chef d’état-major des forces nord-coréennes, de « mobiliser tous les moyens, y compris la dissuasion nucléaires si les impérialistes américains et les marionnettes bellicistes sud-coréennes osent pénétrer dans l’espace aérien, les eaux territoriales et le territoire inviolables de la RPDC ne serait ce que de 0,001 millimètre ».

Mais que les dignitaires du régime de Pyongyang se rassurent : il n’est pas dans l’intention des autorités sud-coréennes de se lancer dans des représailles. Au contraire même, Séoul essaie même de calmer le jeu car il n’est pas dans son intérêt de se lancer dans une aventure militaire susceptible de faire fuir les investisseurs étrangers alors que le pays va recevoir le G20 en novembre prochain.

Cela étant, il n’est pas exclu que la Corée du Nord fasse de nouvelles provocations à l’approche de cette échéance. D’où les spéculations lancées la semaine dernière par la chaîne de télévision sud-coréenne YTN sur l’imminence d’un troisième essai nucléaire nord-coréen.

Même si Séoul et Washington sont officiellement sceptiques face à cette éventualité, des observateurs ainsi qu’un ancien haut responsable de Pyongyang estiment en revanche que la Corée du Nord donne à voir quelques signes avant-coureurs, notamment quand le régime du nord indique vouloir « augmenter et moderniser » son arsenal nucléaire « tant que le menace américaine existe », selon les propos d’un diplomate nord-coréen, rapportés par l’agence officielle KCNA.

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