Les armes nucléaires tactiques américaines resteront en Europe

En février dernier, la Belgique, l’Allemagne, la Norvège, les Pays-Bas et le Luxembourg ont fait savoir qu’ils demanderaient le retrait des têtes nucléaires tactiques américaines présentes en Europe.

Il s’agissait ainsi de lancer un débat sur l’avenir de telles armes au sein de l’Otan, à la faveur de la révision de son concept stratégique, lequel sera dévoilé lors du prochain sommet de l’Alliance à Lisbonne à la fin de l’année.

Près de 200 armes nucléaires tactiques américaines sont actuellement déployées en Europe. Selon un rapport remis en 2009 au patron du Pentagone, Robert Gates, leur pertinence n’est plus d’actualité, d’autant plus que la guerre froide est terminée, même si la Russie a conservé 2.000 engins de ce type braqués sur l’Europe.

Aussi, le sujet de l’armement nucléaire a été abordé lors de la réunion des ministres des Affaires étrangères des Etats membres de l’Otan, organisée à Tallinn (Estonie), les 22 et 23 avril, sans qu’il y ait eu le moindre accord sur la question. Et moins que l’on puisse dire est que cette dernière divise.

En effet, deux clans s’opposent au sein de l’Alliance. D’un côté, il y a les pays qui veulent se débarrasser de ces armes tactiques, à la faveur du voeu du président Obama de voir un monde totalement dénucléarisé.

De l’autre, l’on trouve les Etats membres qui disposent d’une force de frappe autonome (France et Grande-Bretagne) qui voient ce retrait éventuel comme une remise en cause de leur politique de dissuasion, mais aussi la Turquie, qui pourrait chercher à se doter de telles bombes dans le cas où les Etats-Unis retireraient les leurs et laisseraient Ankara désarmé face à un Iran nucléarisé militairement. Sans oublier les pays de l’ancien bloc de l’Est, qui perçoivent toujours la Russie comme une menace.

Finalement, le débat aura tourné court. En effet, la secrétaire d’Etat américaine, Hillary Clinton, a exclu tout retrait de ces armes nucléaires tactiques d’Europe. « L’Otan restera une alliance nucléaire aussi longtemps qu’il subsistera des armes nucléaires » dans le monde et « le partage des risques et des responsabilités est fondamental », a-t-elle déclaré.

« Dans le cas de futures réductions, notre but devrait être d’obtenir l’accord des Russes pour une plus grande transparence en matière d’armes nucléaires pré-stratégiques en Europe et relocaliser ces armes hors des territoires des pays membres de l’Otan » a-t-elle également affirmé.

Cela étant, consciente de sa faiblesse militaire au niveau conventionnel face au potentiel américain, la Russie a toujours fait valoir qu’elle réduirait ses stocks d’armes nucléaires tactiques, dont ont ignore exactement le nombre (celui de 2.000 n’est qu’une estimation, ndlr), quand les Etats-Unis feraient le premier pas.

Aussi, Mme Clinton a suggéré que la réduction de ces bombes non stratégiques devrait être abordée lors de « la prochaine série de discussions » entre les deux pays « sur le contrôle des armements, ainsi que sur les armes stratégiques et celles qui ne sont pas déployées ».

Cela étant, le statu-quo annoncé par la secrétaire d’Etat américaine a de quoi satisfaire Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l’Otan, qui plaide à la fois pour le maintien de la dissuasion nucléaire et la mise en place d’un bouclier antimissile.

« Le coeur de métier de l’Otan, sa raison d’être, c’est de protéger nos territoires et nos populations (…) Je pense que la présence d’armes nucléaires en Europe est une partie essentielle d’une dissuasion crédible » a-t-il déclaré. Et devant l’instabilité croissante du monde, « deux choses ne doivent pas changer » pour Anders Fogh Rasmussen : le « centre de gravité transatlantique » de l’Otan et « l’engagement commun à la défense de chacun de nos membres ».

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